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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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yeux !… Encore du rouge… Les tournoyeurs en haubert rouge. Il semblait qu’ils voulussent le secourir… ou le capturer… Une main s’acharnait sur son étrier… Non ! Non ! Non : il ne tomberait pas !… Il écrasa cette main contre le flanc de Marchegai et entendit crier l’homme. Il fut certain que c’était Leignes.
    « Marchegai ! Marchegai ! Défends-toi, toi aussi. »
    Le cheval hennit de fureur et de douleur. Que lui faisait-on ? Il rua. Un malicieux venu de l’arrière tomba. Et comme, un moment, Ogier se trouvait dans l’incapacité de manier son arme, deux mains saisirent son bassinet et le retournèrent.
    Aveugle, perdant son souffle et le nez endolori, Ogier continua de mouliner sa massette, tel un andabate romain aux jeux du cirque (173) .
    L’averse des coups redoubla.
    Il y eut une sonnerie de trompette. La mortelle marée s’éloigna en criant son indignation d’avoir été arrêtée à l’instant même de la tuerie.
    – Les maufaiteurs ! Les indignes ! protestait une femme. Et l’infecte male reine qui a réclamé cela !
    Radegonde Bochet. Était-ce sur son intervention que cessait le cruel châtiment ?
    – Les infâmes !
    Ogier sanglotait, étouffait sous son fer. Il lâcha sa massette et sa main demeura douloureusement serrée par une crampe.
    On le fit choir de Marchegai. Des gantelets l’empoignèrent, des insultes crachèrent, et sans trop savoir comment, il se retrouva, pantelant, à califourchon sur une barrière, sans doute songea-t-il devant la reine, puisqu’il l’entendait s’ébaudir.
    « Comme mon père quand il fut dégradé ! »
    Honte ! Honte ! Honte ! Et imméritée comme celle de Godefroy d’Argouges. La différence, entre eux, c’était qu’on avait juché ainsi son père après son jugement et qu’on l’y mettait, lui, avant : car on le jugerait pour quelques diableries imaginaires !
    « Ah ! Dieu, pourquoi m’abandonnez-vous si près du but ?… Qu’ai-je commis de mal pour Vous courroucer à ce point contre moi ? »
    On le renversa, le temps de retirer son bassinet. Qui ? Olivier de Fontenay :
    – Il pleure ! ricana le Roi d’armes. Voyez, reine, il pleure !
    On rit ; les dames seulement, sauf Radegonde Bochet, toujours en robe rouge et toujours obstinée :
    – Il n’est sûrement pas ce que vous prétendez, Isabelle !… C’est vous, malebouche, qui êtes pleine à ras bord de derverie (174) et de méchanceté !… Nul ne l’ignore, d’ailleurs, à Morthemer, Chauvigny et ailleurs… Par quel miracle ou quelle sorcellerie, oui, quelle sorcellerie, êtes-vous devenue reine ?… Hein, dites-le ?… Avec votre potron (175) , sans doute. Cette robe blanche offense toutes les dames présentes ici !… Elle ne fait que souligner votre turpitude !… Et par la Sainte Vierge, cette couronne qui vous coiffe si mal devrait être chargée de grelots… Hé oui, de grillettes (176) , encore qu’à ma connaissance, les fous de certains rois et barons sont des modèles de sapience !
    – Ma parole !… Pour le défendre ainsi, Radegonde, vous avez couché cette nuit avec lui !… Il vous a enfourné sa sorcellerie dans le corps en même temps que son braquemart !
    – Paix ! Paix ! hurla l’évêque penché à sa tribune. Nous saurons bien qui a menti !
    Les escadrons à nouveau se chargeaient. Chaque fois que des tournoyeurs passaient à portée de la barrière, Ogier, que deux sergents maintenaient assis en immobilisant ses pieds et ses hanches, recevait un coup dans le dos ou la poitrine.
    Espagne lui tapa dessus avec acharnement ; puis Guichard d’Oyré voulut l’atteindre à la tête : il n’eut que le temps de se protéger de son bras droit, en se félicitant d’avoir conservé son aumusse et son camail.
    – Son armure est belle, dit un sergent.
    – Elle écherra à qui ?… Et son cheval ?
    Les larmes d’Ogier redoublèrent. L’armure n’était rien auprès de Marchegai… Où se trouvait Thierry ? Il fallait qu’il délivrât son hardi compagnon à défaut de le délivrer lui, Ogier. Il fallait sauver Marchegai !
    Un coup, puis un autre atteignirent le bras droit immobile, et bien que son brassard et sa cubitière eussent encore amorti la souffrance, sans se fausser ni ployer, il sut qu’il atteignait ses limites.
    Un rire, un heurt terrible entre les épaules.
    Le dos brûlant, la tête bourdonnante, Ogier, précipité en avant, aperçut l’aigle de

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