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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Guesclin.
    « N’est-il bon ce coquin qu’à frapper par-derrière ? »
    En riant, ses gardiens le relevèrent.
    Ce fut alors que Blainville apparut, massette levée, au grand galop sur Melkart cheval-monstre.
    – Hé ! cria un sergent, il ne va pas…
    – Baisse-le ! dit l’autre. Baisse-le !
    Avant que le Normand ne fût passé à l’action, Ogier entendit la foule protester. Il tenta d’éviter le coup, mais le reçut sur l’oreille.
    Un heaume de ténèbres et de plomb l’embroncha jusqu’aux épaules.

TROISIÈME PARTIE

LES GRANDS TOURMENTS

I
    D’un rose nacré au levant, le ciel ne s’entachait d’aucun nuage.
    – Il fera beau, affirma Guichard d’Oyré.
    Il rit, et tourné vers les captifs :
    – Profitez-en ! Vous ne verrez guère la couleur de ce jour d’hui et jamais, une fois dans Angle, celle des autres !
    Les deux prisonniers échangèrent un regard. Ce malandrin se délectait à l’avance du sort qu’il leur réservait.
    – Cesse de faire une pareille goule, Fenouillet ! Respire l’air léger de cette aube. Celui du reclusoir où je vais t’enchartrer (177) sentira moins bon, surtout quand tu y auras chié et pissé quelques jours !
    Ogier cracha loin devant lui. Depuis leur départ de Chauvigny, il exprimait ainsi son mépris pour cet homme. Adossé à la ridelle de la charrette, il heurta le bras de son compagnon qui chuchota :
    – Ne l’excitez pas trop. Il faut parfois savoir plier comme un roseau.
    Le grand Anglais s’exprimait à la perfection, et sa sérénité paraissait authentique. Était-il de connivence avec Oyré ? Sauvaient-ils l’un et l’autre les apparences ? À quoi bon parler. Pourquoi se regimber ?
    – J’aimerais mieux ployer comme un arc, messire Calveley, avec une sagette encochée dans la corde.
    L’Anglais acquiesça sans paraître ébahi que ce prud’homme de France, dont il ignorait tout, connût son nom.
    – Soyons quiets, dit-il. Du moins en apparence.
    Ils s’abandonnèrent aux brimbalements de la voiture en feignant d’ignorer combien il était insultant, pour des chevaliers, d’être transportés dans une carriole attelée, comble d’infamie, à deux vieilles juments noires. La moindre montée devenait un tourment pour ces bêtes que Raoul de Leignes aiguillonnait au sang, de la pointe d’un épieu (178) . Regardant le dos du sergent puis le sourire oblique d’Oyré, Ogier domina mal un accès d’angoisse :
    « Avec ces deux larrons pour geôliers, je vais endurer moult rudesses… Blainville a bien fait les choses !… Et c’est en partie par lui, paraît-il, que je serai jugé vendredi !… Que fait Alençon ? Ne va-t-il pas me secourir ? Ont-ils réussi à l’occire ? »
    L’Anglais lui adressa un sourire chargé de compassion.
    « Il est grand et roux, je l’avais cru blond ; or, il est vrai que nous étions à l’ombre. Il se souvient de moi. Il veut sa liberté, mais que pourrions-nous faire avec ces liens aux poignets ? »
    On les avait tirés de leurs cachots vers la mi-nuit. Talebast avait marché à leur rencontre. « Adonques vous voilà, Fenouillet !… Par Dieu, vous semblez pâle !… Auriez-vous peur ? » Il s’ébaudissait. Une jouée (179) à toute volée, le poids du gantelet de fer s’ajoutant à celui de la main. « Il a fait exprès de m’atteindre à l’oreille. J’ai crié, gémi : je ne pouvais hélas ! m’en empêcher… » L’autre : «  T’ai-je fait mal ?… Il est vrai que ton ouïe est aussi gonflée qu’un chou de novembre… » Six guisarmiers à cheval étaient apparus. Au bout de chaque hampe, le fer acéré brillait comme une étoile. «  Ils vont te conduire à Angle avec le Goddon », avait continué Talebast. «  Ah ! tu parais moins fier que lorsque tu me commandais d’aller creuser les latrines à cent toises de ton pavillon ! » Blainville et Oyré étaient sortis de l’ombre ; le Normand riait : «  Vendredi, tu seras jugé pour sorcellerie, Fenouillet, mais tu n’iras pas au bûcher : Oyré m’a promis de te laisser périr… à petit feu ! » Le félon s’abstenait de regarder Calveley. Se connaissaient-ils ? Comment le savoir ? Un flambeau s’était approché : c’était Leignes, couvert de ses peaux de bêtes. Il sifflait, heureux. Blainville avait poursuivi : « Hé oui, tu vas avoir deux bons anges gardiens : Oyré et ce gars-là… sans compter ceux que tu trouveras là-bas ! » Ne rien dire, et

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