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La Fille de l’Archer

La Fille de l’Archer

Titel: La Fille de l’Archer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Serge Brussolo
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champ de foire, vite ! On démonte la tente et on disparaît.
    La troupe reflue, profitant de la bousculade générale. Javotte pousse Wallah pour lui ôter la tentation d’aller se recueillir sur la momie charbonneuse de l’homme tombé de la lune.
     
    Bézélios a raison, il serait prudent d’avoir quitté les lieux avant que Ponsarrat ne décrète que l’incendie de son château est imputable aux saltimbanques.
    Le champ de foire est vide, la populace s’étant massée sous les remparts. Wallah et les autres en profitent pour se mettre à l’ouvrage. Ils besognent vite et bien, abattant les toiles, roulant les cordages, arrachant les piquets. De temps à autre, l’un d’eux relève la tête pour suivre les progrès de l’incendie. Au-dessus des murailles, le nuage noir s’épaissit. Il semblerait que les écuries soient en feu car on a libéré les chevaux qui galopent au hasard sur la plaine après avoir, en franchissant le pont-levis, piétiné quelques paysans qui ne s’écartaient pas assez vite.
    — On ferait mieux de tout abandonner et de se carapater sans demander notre reste ! gémit la grosse Javotte. C’est encore sur nous que ça va retomber.
    Une mauvaise surprise les attend dans l’animalerie. Profitant de l’absence des baladins, des malfaisants ont tué la « licorne » et les « rats géants ». Les pauvres bestioles gisent sur la paille de leur cage, le pelage taché de sang.
    — Tant pis, souffle Bézélios. Abandonnons les cages, on ira plus vite.
    Enfin, les bâches sont chargées sur les chariots. On fouette la croupe des percherons. Le convoi s’ébranle, laissant le castel incendié derrière lui.
    Bézélios pique vers la forêt, espérant ainsi se mettre hors de vue. Il a peur du baron.
    « C’est un coup à finir écartelé… », se répète-t-il en maudissant la lenteur des chevaux de trait.
    Wallah, elle, s’est installée à l’arrière, près de son père qui dort d’un mauvais sommeil ponctué de râles.
    Les chariots entrent sous le couvert. Le chemin est certes encaissé, mais il a l’avantage de serpenter sous l’épais feuillage des chênes. On s’y sent davantage à l’abri que sur la plaine.
     
    Jusqu’au soir le convoi poursuit sa route cahotante. Souvent, les saltimbanques regardent en arrière, persuadés qu’une troupe en armes va les rattraper ; mais rien ne se produit.
    — On les a bien eus ! se rengorge Bézélios qui retrouve ses habituelles fanfaronnades au fur et à mesure que le danger s’éloigne.

5
    Wallah dort mal, harcelée dans ses cauchemars par l’image du singe enveloppé de flammes qui court dans sa direction pour se jeter dans ses bras.
    Quand elle s’éveille, à l’aube, elle touche la main du père. Elle est froide. Gunar est mort pendant la nuit.
    La jeune fille se maudit de n’avoir pu recueillir son dernier soupir, mais elle ne pleurera pas ; le père n’aurait guère aimé cela. Il l’a élevée comme il l’aurait fait d’un garçon. Wallah veut rester fidèle à l’image qu’il se faisait d’elle, même si elle sait qu’elle l’a toujours déçu.
    Elle descend du chariot et s’approche du bivouac pour annoncer la nouvelle à Bézélios. Le maître ne dit rien. Javotte se signe par convenance et habitude. Personne n’est surpris ; en fait, pour l’ensemble des frimants, Gunar était mort depuis longtemps. Wallah dit qu’elle s’occupera seule des funérailles, elle ne veut rien de chrétien. Javotte pince les lèvres et grogne quelque chose à propos des religions barbares.
     
    Wallah s’enfonce dans la forêt en quête d’un lieu d’inhumation. Elle finit par dénicher un tertre au sommet duquel elle creuse une fosse en forme de barque, à la mode viking. Ainsi sont enterrés la plupart des hommes du Nord. Gunar lui a souvent répété que les vaisseaux incendiés qui s’éloignent dans le couchant, et sur le pont desquels on a entassé chevaux et serviteurs égorgés, appartiennent davantage à la légende qu’à la réalité.
    — Ces funérailles étaient réservées aux rois ou aux princes, expliquait-il. Elles étaient rares. Personne n’a envie de détruire un bon bateau dont la construction a nécessité beaucoup d’efforts. Pas plus qu’on a envie de sacrifier des chevaux ou des serviteurs fidèles. Si de telles choses ont eu lieu, c’était jadis, aux époques de sauvagerie… mais la plupart du temps il s’agit de calomnies inventées par les chrétiens.
    Wallah

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