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La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours

Titel: La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christophe Verneuil
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innombra-bles.
    Puis après un instant infini, d'autres bruits retentirent à chaque coin de la pièce. Le son bien reconnaissable d'un morceau de ruban adhésif qu'on arrache. Les autres posters se dégageaient à leur tour des murs, du plafond, des fenêtres. Et une cinquantaine d'affiches foncèrent en même temps vers Dom, qui poussa un cri de surprise et de frayeur.
    Elles s'immobilisèrent alors à près d'un mètre du sol, toutes frissonnantes, avant de commencer à tournoyer dans la pièce comme les chevaux d'un manège.
    Curieusement, Dom ne s'affola pas. …merveillé, il contempla l'étrange spectacle de ces cinquante lunes virevoltant avec gr‚ce dans la salle de séjour. Et comme il commençait à y trouver un certain plaisir, le manège s'immobilisa. Dans une cacophonie de battements d'ailes, les posters s'élancèrent à nouveau vers Dom comme des chauves-souris géantes, effleurant son visage, se prenant à ses cheveux, frappant son dos.
    Dom tomba à quatre pattes et chercha à fuir cet enfer, mais toute issue lui était interdite. Il ne voyait plus ni portes ni fenêtres, rien que des formes mouvantes qui se jetaient sur lui.
    Le vacarme empira lorsque, dans les autres pièces et dans le couloir, des milliers de formes lunaires se détachèrent des murs, déchiquetant les bandes adhési-ves, faisant sauter les agrafes, arrachant le pl‚tre.
    Elles s'introduisirent en file dans la cuisine et se joi-gnirent au manège infernal, se mettant en orbite autour de Dom, sifflant et grondant comme les flammes d'un brasier.
    Dom se boucha les oreilles, ferma les yeux. Ássez !
    Assez ! ª Son coeur battait à tout rompre. Ássez ! ª Ses cris lui déchiraient la gorge. Ássez je vous en supplie ! ª
    Le tumulte cessa d'un seul coup comme si les milliers de photos de la lune lui avaient obéi.
    Il dégagea ses oreilles, ouvrit les yeux.
    Une galaxie de lunes tournait toujours autour de sa tête, dans le silence le plus absolu.

    Ćomment faites-vous ? dit-il, comme si les lunes capables de l'éviter pouvaient aussi lui répondre. Comment faites-vous ? Comment ? Pourquoi ? ª
    Les lunes s'affalèrent toutes ensemble comme si un charme venait de se rompre. Les bottes de Dom furent recouvertes d'un tas de papiers inertes.
    Abasourdi, il se traîna vers la porte donnant sur le couloir. Sous ses pas, les lunes crissaient comme des feuilles mortes. Il ne restait plus une seule photo au mur.
    Faisant demi-tour, il revint dans la salle de séjour et s'agenouilla parmi les débris. Il posa sa lampe et prit des feuilles de papier entre ses doigts, cherchant à comprendre ce qui avait pu se passer.
    La peur et l'émerveillement, la terreur et l'étonnement s'emparaient tour à tour de son esprit. Mais en vérité, il ne savait quel sentiment éprouver car ce qu'il venait de vivre n'avait aucun précédent.
    A un moment donné, il se sentait pris d'un fou rire incontrôlable, l'instant suivant une vague glaciale d'horreur venait l'arrêter abruptement. Il avait l'impression de se trouver en présence de quelque chose d'indiciblement mauvais, puis de quelque chose de bon et de pur, avec tout autant de conviction. Le mal. Le bien. Peut-être les deux... ou aucun des deux.
    Simplement... quelque chose. quelque chose de mystérieux échappant au pouvoir descriptif limité des mots.
    Il ne savait qu'une chose: ce qui s'était passé l'été
    de l'année dernière était encore plus étrange que tout ce qu'il avait pu imaginer jusqu'ici.
    Il continua pendant plusieurs minutes de froisser des photos de la lune. Jusqu'au moment o˘ il remarqua quelque chose de curieux quand les paumes de ses mains entrèrent par hasard dans le faisceau lumineux.
    Des cercles. Au beau milieu de chaque paume, se dessinait un cercle de chair rouge, gonflée, aussi parfait que s'il avait été dessiné au compas.
    Et sous ses yeux, les stigmates disparurent quasi instantanément.
    C'était le mardi 7 janvier.

    Chicago, Illinois
    Dans sa chambre au deuxième étage du rectorat Sainte-Bernadette, le père Stefan Wycazik fut tiré de son sommeil par un rythme martelé, des notes aussi basses que celles d'une grosse caisse, aussi sonores que celles de timbales. On aurait dit les pulsations d'un gigantesque coeur, bien que le rythme martelé ici f˚t à trois temps: LEUB-DEUB-deuh... LEUB-DEUB-deuh... LEUB-DEUB-deuh...
    …tonné, mal réveillé, Wycazik alluma sa lampe de chevet, cligna des yeux et regarda l'heure. Deux heures sept du matin. Pas

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