La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
plus de la moitié de ses gains, sans parler des impôts qui lui en piquaient une bonne partie", a ajouté Garfork.
ª La nuit de NoÎl, suite à l'appel d'un voisin ayant entendu un coup de feu, les policiers ont découvert le corps de Lomack gisant dans sa cuisine. La pièce était jonchée d'ordures. En visitant le reste de la maison, ils eurent la surprise de trouver des milliers de photographies de la lune collées sur les murs, les plafonds et les meubles. ª
Cet accident, vieux d'une quinzaine de jours, avait visiblement suscité l'émotion de la population locale.
Dom lut l'article avec une fascination mêlée de gêne.
Il reposa le journal, le reprit, relut plusieurs fois l'article. Et à neuf heures et quart, il décida d'aller jeter un coup d'oeil à la maison de Lomack.
Il demanda à un employé du motel comment gagner Wass Valley Road et prit sa voiture. La route était sèche, Reno ayant été épargné par la neige. Dom s'arrêta dans un drugstore ouvert toute la nuit pour acheter une torche électrique. Il arriva au 1420 Wass Valley Road peu après dix heures et demie et se gara de l'autre côté de la rue.
En fait, la maison était un bungalow modeste entouré de porches, exactement comme l'avait décrit le journal. Il restait de la neige, par plaques, sur le toit et le bout de terrain qui l'entourait; elle faisait ployer les branches de quelques sapins. Les fenêtres étaient noires.
D'après l'article du journal, la soeur de Lomack venue de Floride en avion à l'annonce de sa mort, était restée sur place pour procéder à la vente de la maison mais n'y habitait pas, la trouvant trop déprimante.
Dom était un citoyen respectueux des lois; la perspective d'entrer ici par effraction ne l'enchantait pas.
Mais il n'avait pas le choix; il ne voyait pas comment demander l'autorisation de la soeur de Lomack, qui se disait écoeurée par la curiosité malsaine des gens.
Cinq minutes plus tard, sur la terrasse de la maison, il se rendit compte que la serrure de la porte était trop compliquée pour être forcée. Il essaya les fenêtres.
Celle donnant sur la paillasse de la cuisine n'était pas bloquée. Il l'ouvrit facilement et se glissa à l'intérieur.
Masquant d'une main le faisceau lumineux pour ne pas être vu de l'extérieur, il balaya de sa torche la cui-
sine, laquelle n'était plus dans l'état lamentable dans lequel l'avait découverte la police de Reno. La soeur de Lomack avait entrepris de remettre la maison en état dans le but de la vendre. Visiblement, elle avait commencé par la cuisine. Tout était immaculé. Dans l'air régnait une odeur de désinfectant. De la poudre contre les insectes était répandue le long des murs. Un unique cafard se réfugia derrière le réfrigérateur. Il n'y avait pas la moindre photographie de la lune.
Dom se dit que toutes les traces de l'obsession de Zeb Lomack avaient peut-être déjà disparu, mais il fut rassuré en entrant dans la salle de séjour et quand le faisceau de la lampe éclaira les murs. La pièce tout entière était tapissée de posters de la lune. Dom eut l'impression de se trouver dans l'espace, quelque part entre Mars et Jupiter, entouré de centaines d'astéroi-des se ressemblant tous par leurs surfaces criblées de cratères. Ce spectacle troublant le mit mal à l'aise.
Il quitta la salle de séjour pour un couloir aux murs recouverts de photos de la lune, en noir et blanc ou en couleurs scotchées collées ou agrafées aux murs.
Les chambres à coucher étaient pareillement décorées et les lunes omniprésentes ressemblaient à de gros champignons qui auraient envahi le moindre recoin de la maison.
Selon les journaux, les voisins disaient que le joueur s'était rapidement changé de noctambule en reclus.
Apparemment, sa fascination pour la lune avait débuté
l'été de l'année dernière.
L'été de l'année dernière... Les changements survenus dans la vie de Dom coincidaient mystérieusement.
Il se sentit de plus en plus mal à l'aise. Les lunes ne l'hypnotisaient pas, ainsi qu'elles l'avaient fait avec Lomack, mais il ressentit une sorte de picotement dans la nuque. En les contemplant, il comprit que ce qui avait poussé Lomack a tapisser sa maison de clichés de la lune était cette même chose qui l'avait contraint, lui, Dom, à rêver à l'astre des nuits.
Lomack et lui avaient partagé une même expérience dans laquelle la lune tenait une part importante ou dont elle était le symbole parfait.
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