La France et les étrangers: du milieu du XIXe siècle à nos jours
vivre.
Réprimant ses larmes, Ginger dit: Állez, il faut nous séparer à présent. ª
Avec Ned au volant, les sept qui devaient se rendre à Chicago et à Boston partirent les premiers, entassés dans la Cherokee. La neige tombait si dru que le véhicule n'était plus qu'un fantôme à une cinquantaine de mètres. Malgré tout, Ned ne prit pas la direction des collines, de peur d'être détecté par les observateurs que Jack avait repérés avec leur matériel. Au lieu de cela, la Cherokee s'engagea dans un plissement de terrain auquel une étroite faille donnait accès. Ned devait rester dans les fonds de vallons et les ravins aussi longtemps qu'il le pourrait. Le bruit du moteur s'était noyé
dans les hurlements du vent bien avant qu'il aient perdu le véhicule de vue.
Ginger, Dom et Jack grimpèrent dans la cabine de la camionnette des Sarver, et suivirent les traces de la Cherokee. Mais avec son avance, la jeep avait disparu dans la tourmente, et tandis qu'ils étaient secoués comme dans un panier à salade dans le fond du vallon, Ginger, assise entre Jack et Dom, se crevant les yeux à scruter la nuit au-delà du ballet des essuie-glaces, se demandait s'ils reverraient jamais les passagers de la jeep. En si peu de temps, elle avait appris à tous les aimer. Elle avait peur pour eux.
Ńous nous soucions des autres. C'est ce qui nous différencie des bêtes. ª C'est ce que Jacob, son père, lui avait toujours dit. L'intelligence, le courage, l'amour, l'amitié, la compassion et l'empathie-tou-tes ces choses étaient d'égale importance pour l'espèce humaine. Certains croyaient que seule comptait l'intelligence, la capacité à résoudre les problèmes, à deviner les avantages et à s'en emparer. Mais les nombreuses fonctions de l'intellect auraient été insuffisantes sans le reste. Ńous nous soucions des autres. C'est notre malédiction. Et notre bénédiction. ª
Parker Faine craignait que le pilote du minuscule appareil ne p˚t se frayer un chemin dans la tempête et ne renonç‚t à se poser à Elko, préférant un petit aéroport situé plus au sud du Nevada. Mais c'était à
un véritable as de l'aviation qu'il avait affaire et, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, l'avion roula sur la piste enneigée. quelques instants plus tard, l'aéroport d'Elko serait fermé pour cause de mauvais temps.
Parker Faine parcourut tête baissée les quelques dizaines de mètres qui séparaient l'avion de la petite aérogare.
A son arrivée à San Francisco, Faine s'était acheté
des ciseaux et un rasoir électrique, puis s'était rendu dans les toilettes des hommes pour se couper les cheveux et la barbe. Cela faisait une bonne décennie qu'il ne s'était pas vu ainsi. Le résultat ne lui déplut pas.
Pour éviter de laisser des traces derrière lui en réglant par carte de crédit, il avait payé en espèces un billet d'avion pour Reno. Après quarante-cinq minutes de vol au-dessus de la Sierra Nevada, il avait eu la chance de trouver une place dans un petit dix-places effectuant le trajet régulier Reno-Elko. Là encore, il avait payé cash. Il ne lui restait plus que vingt et un dollars dans son portefeuille. Pendant deux heures et quart, il avait subi les trépidations de l'avion qui l'emmenait vers cette partie du Nevada o˘, il en était persuadé, son ami courait un grand danger.
Dans l'aérogare, Parker Faine trouva deux cabines téléphoniques, dont une seule fonctionnait encore. Il chercha le numéro du Tranquility Motel, essaya d'appeler Dom, mais en vain. La ligne semblait coupée.
Le mauvais temps y était peut-être pour quelque chose. A moins qu'il n'y e˚t une autre raison à cette panne.
En moins de deux minutes, il découvrit qu'il n'y avait plus de voitures à louer et que l'attente pour avoir un taxi était de plus d'une heure et demie.
D'un pas rapide, il se dirigea vers le bureau d'informations. Et là, il se cogna violemment à un individu qui, comme lui, paraissait affolé. L'homme était distingué; il avait un certain ‚ge, des cheveux gris. Sous son pull-over, on apercevait un col romain. Il dit à Parker:
´ Pardonnez-moi, mon ami, je suis prêtre et c'est une question de vie ou de mort. Vous n'auriez pas une voiture, par hasard ? Il faut absolument que je me rende au Tranquility Motel. ª
Dom Corvaisis était assis sur la banquette de la camionnette des Sarver, coincé entre Ginger et la portière de droite, les yeux rivés sur les tourbillons de neige qui
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