La fuite du temps
à ses côtés pour recevoir les félicitations des parents
et amis venus participer à la noce.
De nombreux
invités profitèrent de l'occasion pour glisser une enveloppe à Gilles avant
d'embrasser Florence.
242
Lorsque le défilé
prit fin, un violoniste et un pianiste s'installèrent sur une petite estrade
dressée à gauche de la table d'honneur tandis qu'un jeune maître de cérémonie
s'emparait du micro pour inviter les gens à prendre place aux tables rondes
pouvant accommoder huit convives. Les nouveaux mariés, accompagnés de leurs
parents et de l'abbé Nantel, un ami de la famille Messier, s'installèrent à la
table d'honneur. A l'invitation du maître de cérémonie, on but à la santé de
Gilles et Florence avant que les serveuses ne commencent à circuler entre les
tables.
— On peut pas
dire que Florence m'a fait une ben grosse façon aujourd'hui, chuchota Laurette,
un peu amère, à son mari alors que sa nouvelle bru souriait et adressait
quelques mots gentils à un couple de personnes âgées qui s'était arrêté devant
la table d'honneur.
— Elle a ben
d'autres choses à penser qu'à te faire des façons, rétorqua Gérard à voix
basse. Elle est nerveuse et il faut qu'elle soit polie avec tout le monde.
En réalité, son
mari aurait pu lui faire remarquer qu'elle n'avait jamais fait le moindre
effort pour que la jeune femme se sente bien accueillie dans sa nouvelle
famille.
Dès la première
fois où Gilles l'avait présentée aux siens, Laurette lui avait battu froid.
Dans son dos, elle n'avait jamais cessé de lui reprocher d'être «fraîche» et
surtout, d'être beaucoup plus âgée que son fils. Les sept ans qui les
séparaient lui avaient toujours semblé un obstacle majeur. Dans ces conditions,
il était pour le moins étrange que la belle-mère se plaigne d'être un peu
boudée par sa bru.
Les musiciens
agrémentèrent le repas avec de la musique classique. Ils ne furent interrompus
qu'en deux ou trois occasions lorsque des invités frappèrent sur les tables
avec un ustensile pour exiger que les nouveaux époux se lèvent et s'embrassent.
243
Denise et Pierre
avaient pris place à une table en compagnie de Marthe, Jean-Louis, Richard et
jocelyne. Ils avaient réservé une place pour Carole, mais celle-ci avait
préféré s'installer avec ses cousines Louise et Suzanne à une table voisine où
les trois enfants de Denise étaient assis. Les deux places libres furent vite
occupées par Rosaire et Colombe Nadeau. Si Colombe demeura aussi collet monté
que d'habitude, son mari, par contre, se fit un devoir d'animer la table avec
ses plaisanteries.
— C'est drôle que
tes cousines se soient pas installées avec leur père et leur mère, fit
remarquer Pierre Crevier à Richard.
— Il y a juste à
regarder la tête de ma tante Pauline pour s'apercevoir qu'elle est pas de bonne
humeur, répondit ce dernier. Même les farces de mon oncle Bernard la font pas
sourire. C'est peut-être pour ça que les filles ont aimé mieux manger à la
table des enfants.
— C'est plate
qu'il y ait pas de chanteur, dit Jocelyne, un peu dépitée, aux autres convives
assis à sa table. Un peu de rock n’roll aurait réveillé tout le monde.
— Voyons,
Jocelyne, la reprit Colombe Nadeau, offusquée. De la belle musique classique
peut pas être ennuyante.
— Vous aimez
peut-être ça, ma tante, répliqua la petite femme d'une voix acide, mais moi, je
trouve ça plate à mort. Moi, le pianiste, je lui fermerais le couvercle du
piano sur les doigts si je m'écoutais. Il est en train de m'endormir ben raide.
Colombe Nadeau
renifla avec mépris, mais se tut.
— Est-ce que ça
fait longtemps que vous vous connaissez? demanda Rosaire à Marthe Paradis en
désignant Jean-
Louis du bout de
son cigare.
— Quatre ou cinq
mois, monsieur Nadeau, répondit la jeune femme avec un sourire.
244
— On peut pas
dire que mon neveu manque de goût en tout cas, renchérit Rosaire.
— Marthe est
juste une amie, mon oncle, tint à préciser Jean-Louis, l'air empesé.
— Ben oui, ben
oui, intervint son frère Richard, un sourire moqueur aux lèvres. On a tous
commencé comme ça, pas vrai, Pierre? Son beau-frère s'empressa d'entrer dans
son jeu.
— C'est vrai.
Puis, un beau jour, tu te réveilles coincé.
Tu te dis que ta
petite amie te ferait peut-être une sacrifice de bonne femme.
Marthe rougit
légèrement et
Weitere Kostenlose Bücher