Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La gigue du pendu

La gigue du pendu

Titel: La gigue du pendu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ann Featherstone
Vom Netzwerk:
ni le whisky de la reine, mais c’est une pension honorable ! »
    Totalement épuisé, je m’agrippais à la rambarde pour ne pas tomber, mais elle ne semblait pas s’en apercevoir.
    « Je n’ai rien non plus contre ce gentleman très fort, Mr Chapman. Il prétend être de vos amis, mais je ne me souviens pas de son nom. » Elle a réfléchi. « Un homme très raffiné, j’ai pensé, peut-être un Buff, mais il ne vient pas du monde du spectacle, c’est certain. Comme vous le savez, j’ai passé ma vie entourée de gens de théâtre et je n’ai pas besoin qu’on m’explique les choses. Mon père était comédien dans la troupe de Mr Whiston. Le King’s Lynn Circuit. Et ma mère, avant son mariage, s’appelait Miss Flygrove. »
    Mais je ne l’écoutais plus : j’étais abasourdi d’apprendre que le Grand Méchant était venu ici. Ainsi donc, il savait où j’habitais, où je travaillais, connaissait le nom de mes chiens, de mes amis. Il pouvait me retrouver à n’importe quel moment, me malmener, empoisonner mes compagnons. Peut-être en cet instant m’épiait-il, au coin de la rue. Ou allait-il grimper les marches pour m’attendre dans l’ombre.
    J’aurais dû sauter dans une diligence et filer le plus loin possible avant le lever du soleil. Cela m’aurait apaisé.
    Il faisait de plus en plus froid et la douleur dans mon dos et ma poitrine m’élançait de plus en plus. J’ai toussé. Trébuché. Mrs Twentyfold a claqué la langue et s’est empressée de me faire rentrer. M’effondrer devant sa pension n’aurait pas amélioré sa réputation.
    Dans ma petite chambre, Brutus et Néron ronflaient et le feu rougeoyait. Dehors, des voix s’élevaient, des portes claquaient. De lourds bruits de pas, des odeurs de côtelettes et de harengs annonçaient le retour de mes voisins. À cette heure, les comédiens se levaient, mangeaient des tartines beurrées, buvaient du thé sucré, mémorisaient quelques répliques de dernière minute. À l’Aquarium, Alf Pikemartin s’apprêtait à allumer l’éclairage et à balayer le hall d’entrée. Conn irait inspecter la ménagerie, soigner le lionceau, les singes. Moses Dann le Désossé se redressait sur son matelas, à la cave (où il allait dormir dès qu’il le pouvait), et réclamait sa chope de bière. Chaque jour, c’était la même chose.
    Mais plus pour moi. À présent, tout était différent.
    1 - The Royal Antediluvian Order of Buffaloes , association britannique divisée en loges, créée au début du XIX e  siècle par les comédiens, gens du spectacle ainsi que les techniciens des théâtres, non loin de Drury Lane, dans le but initial de faire valoir leur statut et leurs droits ; avec le temps, leurs objectifs sont devenus plus sociaux et humanitaires. Les Buffaloes sont toujours en activité.

10
    Une journée – Le prodigieux théâtre de Tipney
 et sa galerie – Le plan de Barney – Meurtre
    J’aurais dû enfiler mon manteau, mon cache-nez et filer dans la nuit. Les champs de Strong n’étaient pas si loin. En marchant tranquillement et en m’arrêtant de temps à autre, j’aurais pu y être au matin.
    Mais non, cette nuit-là, je suis demeuré dans mon lit. Comme le jour suivant. Et celui d’après. Je dormais, me réveillais, contemplais le mur, mais je ne bougeais plus. Je suis resté allongé jusqu’à ce que mes draps empestent, et moi avec, jusqu’à ce que l’empreinte de mon corps s’imprime dans le matelas. Mes chiens étaient inquiets, ils me laissaient seulement pour aller faire un tour, puis se hâtaient de revenir s’étendre au pied du lit. Mrs Twentyfold m’a appelé à travers la porte, Will a actionné la poignée, me suppliant de sortir, mais je n’ai pas répondu. Je ne pouvais supporter leur compagnie. Je ne voulais plus rien avoir affaire avec ce monde.
    Quand mes bleus ont viré du noir au violet, que la douleur a diminué, je me suis forcé à me lever. Je ne voulais pas penser à Barney et ses problèmes, au Grand Méchant et ses hommes de main. Ils n’avaient rien à voir avec moi. Je suis resté des jours sans me laver ni me raser, et si quelqu’un n’avait pas payé Mrs Twentyfold pour déposer devant ma porte du pain, du thé et du lait (Will ou Trim, je suppose), j’imagine que je serais mort de faim. Je n’avais rien pour m’occuper, ainsi donc j’aurais très bien pu rester mijoter dans mon lit, s’il n’y avait eu ce changement de temps. Debout à la fenêtre, un

Weitere Kostenlose Bücher