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La grande Chasse

La grande Chasse

Titel: La grande Chasse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Heinz Knoke
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J'arrive cependant à l'arracher, après avoir parcouru environ deux cents mètres avec un pneu à plat. A la limite du terrain, j'évite de justesse un hangar.
    Le cap sur la mer, je grimpe au maximum de puissance. Au-dessus de moi, très haut dans le ciel bleu, les filets de condensation des Ricains et de mes camarades dessinent une dentelle mouvante. La grande bagarre est déjà engagée.
    Sept mille mètres. La charge inaccoutumée fatigue dangereusement mon coucou dont la vitesse ascensionnelle diminue de plus en plus. En intercalant des paliers toujours plus rapprochés, je parviens, en près de vingt-cinq minutes, à monter jusqu'à neuf mille. Manifestement, mon « Gustave » s'essouffle dans l'air raréfié.
    Les Américains ont déjà déchargé leurs bombes sur Wilhelmshafen dont les docks sont en flammes. La brise rabat les colonnes de fumée sur le quartier du port.
    L'ennemi, sur le chemin du retour, se trouve maintenant à la verticale de Héligoland. En sacrifiant un peu d'altitude, je le rattrape vite. Puis, réduisant l'allure, je me place au-dessus de la tête de la formation qui, cette fois, se compose uniquement de forteresses volantes. Pendant plusieurs minutes que les mitrailleurs américains mettent à profit pour m'arroser de leur mieux, je corrige ma visée, laissant retomber tantôt le plan gauche, tantôt celui de droite, afin de vérifier mes coordonnées. Pour une fois que j'ai réussi à emporter une bombe, je veux être sûr de mon coup.
    Tout de même, ce n'est pas le moment de m'attarder. Mon aile gauche montre déjà deux ou trois déchirures. J'amorce la bombe, contrôle de nouveau ma visée, puis, d'un coup de pouce, j'enfonce le bouton de déclenchement. Soulagé, mon appareil fait un bond en avant.
    La bombe tombe... tombe encore... Je cabre tout en amorçant un virage pour observer sa chute. Elle explose exactement au centre d'un groupe de trois forteresses. L'une, la plus rapprochée, perd immédiatement une aile, arrachée parle souffle. Les deux autres, effrayées, dégagent par un piqué à 45 degrés.
    A une trentaine de kilomètres à l'ouest de Héligoland, la forteresse estropiée — à ma surprise, elle n'a pas pris feu — s'abat dans l'eau, soulevant un immense geyser. Son aile, tournoyant comme une toupie, la suit à quelques secondes d'intervalle.
    Ma bombe fera du bruit, non seulement dans le camp allié, mais aussi chez nous, dans les « sphères supérieures » !
    Dès l'atterrissage, je dois me présenter chez le commandant de l'escadre. Le Vieux qui était parti en même temps que nous avait assisté, des premières loges en quelque sorte, à la destruction de la forteresse volante. Il est surexcité.
    — Formidable, Knoke, absolument formidable ! La prochaine fois, il faudra que vous fassiez ça avec tous les appareils de votre escadrille, hein, mon petit Knoke ?
    — C'est bien ce que j'ai l'intention de faire, mon commandant.
    — Et vous pensez que ça marchera ?
    Je suis sceptique.
    — Je ne pense encore rien, mon commandant. J'ai peut-être eu un coup heureux, tout simplement. Si, au contraire, ce coup résulte de l'application d'une méthode, nous arriverons sans doute à descendre un certain nombre de grosses bagnoles.
    — Hum. Je vois. Enfin, coup heureux ou méthode, vous allez continuer, j'espère, mon petit Knoke. Je vous fais confiance...
    Un peu plus tard, c'est le chef divisionnaire de la chasse qui me téléphone.
    — Très heureux de pouvoir vous féliciter, mon cher, nasille-t-il, jovial. Vraiment, une magnifique victoire...
    Il doit être fou de joie à l'idée d'avoir contribué indirectement à cette « magnifique victoire ». Pourvu que, dans son émotion, il ne lâche pas son monocle.
    Seuls les hommes de mon escadrille gardent leur flegme habituel. Ces jubilations officielles leur paraissent ridicules. Primo, cette bombe aurait pu être lancée, avec le même succès, par X., Y. ou Z. ; secondo, l'idée n'est pas de moi, mais du pauvre Dieter, et tertio, mon zinc a récolté huit trous dans l'aventure. Non, vraiment, il n'y a pas de quoi s'extasier !
    Au beau milieu de la nuit, le téléphone à côté de mon lit se met à sonner.
    — Mon lieutenant, une communication prioritaire du Haut Commandement de la Luftwaffe.
    — Ah ? Vous êtes sûr que c'est pour moi ?
    — Oui, mon lieutenant. Une seconde, je vous prie. Allo, allo ! Parlez...
    — Le lieutenant Knoke ? Ici le commandant X., de l'état-major du

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