La grande déesse
et remonter à quelque 30 000 ans avant notre ère.
La France est le pays européen où l’on a recensé le plus de Vierges noires ou dites telles, mais il en existe dans d’autres pays, en Belgique par exemple, à Bruxelles, à Halle et à Scherpenheuvel. La statue de Bruxelles, qui se trouve dans l’église Sainte-Catherine, paraît une antique Diane ou Aphrodite gallo-romaine qui aurait été retouchée de nombreuses fois au cours des siècles. Celle de Halle trône au-dessus du maître autel de la basilique Saint-Martin qu’on appelle très souvent « basilique Notre-Dame-de-Halle ». Celle de Scherpenheuvel (Montaigu) est également au-dessus du maître autel de la basilique d’Onze Lieve Vrouw, au centre même de la ville, et son culte est attesté depuis le IX e siècle : c’est en effet une Vierge guérisseuse que l’on invoque dans le but d’épargner les épidémies aux habitants de la région. Chaque année, le premier dimanche après la Toussaint, a lieu une procession aux chandelles : la date et le rituel font penser à la survivance d’un antique culte celtique d’une divinité féminine guérisseuse et protectrice des malades pendant la période hivernale.
À Beauraing, toujours en Belgique, c’est un culte marial très récent qui s’est instauré. En 1932, en effet, le 8 décembre – le jour de la fête de l’Immaculée Conception –, cinq enfants du petit bourg de Beauraing, non loin de Dinant, affirmèrent avoir été témoins de l’apparition d’une femme vêtue d’une longue robe blanche en qui ils avaient reconnu la Vierge Marie. Et pendant plusieurs semaines, à intervalles réguliers, la même vision saisit les enfants, ce qui déclencha un mouvement de ferveur extraordinaire dans toute l’Europe catholique. On construisit un sanctuaire sur le lieu de l’apparition et, à proximité, un musée marial très visité. Actuellement, Beauraing est un véritable Lourdes belge, témoignant ainsi de la permanence du culte de la déesse mère sur une terre souvent ravagée par les invasions et qui semble imprégnée de spiritualité celtique.
Le lien avec le passé est à Walcourt, au sud de Charleroi, dans un pays dont on ne sait plus très bien s’il est français ou wallon. Les alentours sont particulièrement riches en vestiges gallo-romains, mais au centre de la ville de Walcourt se dresse la basilique de Saint-Materne : la tradition prétend que ce Materne, évêque de Tongres, aurait découvert en cet endroit une statue de la Vierge Marie et aurait fait construire à cet emplacement un premier sanctuaire qui aurait été plusieurs fois rebâti avant de devenir la basilique actuelle. Cette statue, si c’est bien l’authentique, échappée aux guerres et à la Réforme, est l’objet d’une grande vénération. Mais quand on réfléchit quelque peu sur la tradition, on est en droit d’affirmer que ce « saint » Materne n’est autre que la figure masculinisée et canonisée (seulement par la voix du peuple !) d’une Matrona gallo-romaine retrouvée dans la terre par hasard et identifiée, à l’instar de bien d’autres, par la piété populaire, comme étant une statue miraculeuse de la Vierge. La permanence du culte de la Déesse n’en est que plus évidente.
L’Allemagne occupe, dans cette exploration des domaines de la Déesse, une situation tout à fait particulière. Les anciens cultes germaniques n’y ont guère laissé de traces visibles tant ils ont été détruits et rayés de la carte au temps de la christianisation forcée entreprise par Charlemagne et ses successeurs. Quant à la dévotion envers la Vierge Marie, elle semble avoir été peu importante : certes, les pays du nord, après la Réforme luthérienne, n’y étaient guère favorables, mais les pays du sud, demeurés catholiques, la Bavière en particulier, ne comportent guère de sanctuaires importants consacrés à la Mère de Dieu. L’Allemagne n’est pas un pays marial – c’est une constatation –, mais cela n’implique pas que la Déesse des Commencements n’y ait point été honorée.
Au temps de l’empire romain dont l’ouest de l’Allemagne actuelle faisait partie, de nombreux sanctuaires ont été construits dans les nouvelles villes qui étaient des « colonies », comme Cologne, et tout au long de cette frontière impériale qu’on appelle le limes , à l’usage des garnisons qui s’y trouvaient en résidence. C’est le cas à Aalen, à l’est
Weitere Kostenlose Bücher