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La grande guerre chimique : 1914-1918

La grande guerre chimique : 1914-1918

Titel: La grande guerre chimique : 1914-1918 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Olivier Lepick
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par les forces britanniques.
Cette même technique (arrosage massif des flancs de l’offensive) fut utilisée
une nouvelle fois à la fin du mois d’avril lors de l’assaut allemand sur le
mont Kemmel. En cette occasion, l’offensive allemande fut même entravée par ses
propres gaz : voulant désorganiser l’arrivée des renforts alliés, les
Allemands avaient largement pilonné l’arrière des positions ennemies à l’ypérite
et se trouvèrent, une fois les premières lignes françaises et britanniques
conquises, stoppés par la barrière chimique qu’ils avaient eux-mêmes édifiée
quelques heures plus tôt. Les Allemands usèrent aussi du gaz moutarde à des
fins purement défensives lors de leur retraite au cours de l’été 1918.
Ainsi, quand l’état-major suspectait une offensive alliée, il ordonnait un
bombardement massif à l’ypérite de la zone qui séparait les armées
belligérantes dans le but de rendre ce territoire inviolable. Ces pilonnages
étaient décidés lorsque la probabilité d’une offensive était élevée et qu’il
était alors possible d’infliger de lourdes pertes aux importantes troupes
massées dans le secteur. Les 12 et 13 juillet 1917, lors des premiers
bombardements à l’ypérite près d’Ypres, les artilleurs allemands stoppèrent net
les velléités offensives de la 15 e  division britannique en la
soumettant à un pilonnage de plus de 50 000 obus croix jaune.
    Au cours du repli allemand des derniers mois du conflit, le
gaz moutarde se révéla être une arme défensive redoutable. De fait, si l’apport
du gaz lors d’opérations offensives était relatif, l’ypérite constituait, lors
des phases défensives, une alliée précieuse. À cette occasion, les artilleurs
réalisèrent l’efficacité des bombardements massifs sur des surfaces étendues
plutôt que des actions ponctuelles et nombreuses. En effet, la seconde
technique, contrairement à la première, permettait à l’ennemi de se replier sur
des positions alternatives et adjacentes tandis qu’une importante surface
souillée décuplait les difficultés d’une unité qui se voyait contrainte à se
mouvoir et à combattre dans un terrain contaminé. Une fois qu’un terrain était
contaminé par le sulfure d’éthyle dichloré, il fallait au moins trois jours (si
le temps était beau et chaud) pour pouvoir envisager d’occuper militairement la
zone et plus de six jours en cas de temps froid et sec [647] . Ce type de
bombardements était fréquemment utilisé lors du repli des unités allemandes.
Les artilleurs inondaient la zone qui séparait la ligne de front de gaz
moutarde, ce qui donnait le temps nécessaire aux régiments d’infanterie pour se
replier en bon ordre. Ainsi, lors de la bataille d’Albert (20-21 août 1918),
les artilleurs allemands pilonnèrent devant leurs positions une zone dont l’ennemi
devait impérativement s’emparer pour continuer l’offensive. L’ypérite coûta au
deuxième bataillon des Royal Fusiliers, qui devait occuper la zone, près de 400 hommes,
réduisant sa capacité de combat à 158 fantassins valides [648] .
    Pour ce qui fut de l’élaboration des doctrines chimiques,
force est de constater que leur maturation fut le fruit des enseignements
empiriques du front. En raison de ses propriétés spécifiques, chaque nouvel
agent introduit sur le théâtre des combats imposait une refonte des tactiques
chimiques. Ce processus fastidieux passait inévitablement par les résultats
observés sur le champ de bataille et dont l’interprétation n’était pas aisée,
de sorte que les tactiques chimiques ne furent jamais véritablement figées. Il
fallait de longs mois avant que les artilleurs, au terme de tâtonnements
successifs, ne parvinssent à cerner l’utilisation tactique optimale d’un agent.
À l’instar des règles du combat aérien tournoyant, dont les aviateurs
reconnaissent qu’elles furent élaborées pendant la Grande Guerre et qu’elles n’évoluèrent
ensuite que de façon marginale, les fondamentaux de la doctrine et des
tactiques chimiques furent concrétisés au cours des derniers mois de la
Première Guerre mondiale. Depuis cette date, et en dépit de la découverte de
substances incroyablement plus toxiques, ces principes tactiques ont conservé
leur pertinence. En définitive, l’apport des agents chimiques fut sans conteste
plus stratégique que tactique. L’arme chimique ne fut pas l’arme de la victoire
mais

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