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La grande vadrouille

La grande vadrouille

Titel: La grande vadrouille
Autoren: Georges TABET , André TABET
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la statuette et le mangea, avec délice, puis une jambe, puis la tête en disant :
    — Goûtez !
    — Non, répondit l’autre en souriant, je ne mange pas mes supérieurs… On dit que nous sommes des barbares…, mais quand même pas des cannibales !
    Le lieutenant jeta un coup d’œil navré sur les buffets fermés :
    — Puisque vous me dites qu’il n’y a rien à dîner… tant pis ! Je vais me coucher… bonne nuit !
    Dès que l’Allemand eut disparu, Stanislas ouvrit le monte-charge et vérifia si son souper était toujours là. Rassuré, il se dirigea, d’un pas léger, vers la porte. Stürmer qui l’avait observé sans être vu, s’éclipsa légèrement par l’escalier qui remontait aux étages.
    Pendant ce temps, dans sa chambre, le major Achbach rangeait son linge dans l’armoire. Sa sortie de bain lui donna l’idée de prendre une bonne douche. Il avait, au passage, vu un écriteau au fond du couloir : salle de bains. Il saisit sa serviette éponge, sortit, et referma sa porte, avec un geste brutal, comme tous ses gestes même les plus quotidiens. Le clou qui tenait le n° 9, sous la poussée, se détacha, et la petite plaquette d’émail, basculant sur le deuxième clou, devint un n° 6, en s’immobilisant, bas en haut.
    Dès lors, il n’y avait plus de n° 9. Il n’existait que deux chambres, identiquement meublées d’un seul lit, et portant le n° 6…
    Or le n° 6… c’était le numéro de la chambre occupée par Stanislas et Augustin.
    Un tout petit détail, sans importance, mais qui allait être gros de conséquences.
    Quelques instants après, l’autre chambre n° 6 s’ouvrit et Augustin en sortit, inquiet, le front plissé.
    Il avait pris une héroïque décision : aller dire bonsoir à Juliette. Mais sous quel prétexte ? Lui offrir une cigarette, il n’en avait pas. Un journal, un livre… non plus.
    Soudain, il pensa, se souvenant des fanfaronnades de copains :
    — L’audace, avec les femmes, ça réussit souvent…, il paraît.
    Le cœur d’Augustin cognait follement dans sa poitrine. Une idée venait de l’inspirer. Comme un acteur débutant, il supputa ses chances de succès, puis carrément frappa à la porte de la jeune femme.
    Juliette était couchée, en chemise de nuit transparente. Elle répandait une odeur délicate de blonde.
    Elle bondit du lit et enfila un petit déshabillé léger.
    La porte s’ouvrit en grinçant lentement. Deux mains tendues en avant apparurent, et Augustin, jouant les somnambules, se montra, les yeux fixes…
    Le pauvre garçon écoutait son cœur battre, pendant qu’il marchait d’un pas d’automate.
    Comme s’il parlait dans un sommeil hypnotique, avec une voix de rêve, Augustin débita d’un trait :
    — Il y avait une fois un peintre en bâtiment qui rencontra une jeune fille… ; elle faisait jouer des marionnettes… Il lui avait promis de venir la voir dès que la guerre serait finie… Alors, il est venu, voilà… On a eu de la chance de s’en être tirés, pas vrai ?
    Elle eut le rire poli avec lequel on accueille une boutade qu’on ne trouve pas très drôle.
    IL continua encouragé :
    — Comme on s’est rencontré pendant la guerre, on pourrait peut-être bien rester ensemble pendant la paix… Parce que la paix, en général, c’est plus long que la guerre…
    Ses mains se tendaient vers la jeune fille, pour la saisir… Mais Juliette, fine mouche, se dirigea vers la porte… Augustin la suivit… Elle ouvrit alors le battant pendant qu’Augustin avançait, comme poussé par un rêve intérieur…
    Si bien que le pauvre garçon, entraîné par son propre mouvement, se retrouva bel et bien dans le couloir.
    — Maintenant, il faut aller dormir, mais cette fois, pour de bon, dit Juliette avec un sourire au coin des lèvres.
    Confus, il baissa les bras, voyant bien l’échec de son puéril stratagème. Il rougit d’humiliation :
    — Oui, c’est loupé, quoi…
    La bouche de Juliette s’entrouvrit, enfantine et tentatrice. Elle l’embrassa sur la joue, du bout des lèvres.
    La beauté de la jolie blonde, nue sous une fine robe de chambre lui était passée sous le nez.
    Augustin réintégra sa chambre, l’un des n os 6 – celui des Allemands qui était vide – et se coucha, en proie à des idées désabusées :
    — L’audace… n’est pas faite pour les timides, soupirait-il, pas plus que l’alcool n’est fait pour ceux qui ont le foie délicat… Ah !… je parlerai
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