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La grande vadrouille

La grande vadrouille

Titel: La grande vadrouille
Autoren: Georges TABET , André TABET
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de la cuisine, achevaient de se vêtir en feldgendarmes allemands. Les plaques de cuivre sur la poitrine, ils se sentaient mal à l’aise dans ces uniformes que Germaine possédait, et qui lui servaient à faire passer en zone libre des malheureux traqués que les nazis pourchassaient en zone occupée.
    Germaine leur tendit des fusils :
    — Attention…, ils sont chargés…
    Stanislas, en éteignant sa cigarette, s’aperçut qu’il tremblait.
    — Décidément, ça continue… c’est le service militaire pour moi, et sous l’uniforme allemand ! Quelle effroyable dérision ! songeait-il. Si je m’en tire, j’en aurai, des choses à raconter après la guerre… Je serai le type barbant qui ressasse ses histoires et qu’on évite…
    On leur remit les laisses des chiens.
    — Ce sont eux qui vont vous faire passer… Laissez-vous guider… Ils connaissent leur chemin aussi bien que des pigeons voyageurs…
    — Des bergers allemands ! souligna Stanislas.
    — Allemands, mais pas nazis ! rectifia Juliette.
    — Avec mes chiens et mes uniformes, dit Germaine, vous êtes la patrouille.
    Un frisson d’insécurité précisa le malaise de Stanislas :
    — Et si on rencontre la vraie patrouille ?
    — Ils vous prendront pour une autre patrouille… L’essentiel, c’est évidemment de ne pas engager la conversation…, de marcher avec autorité…
    Á peine Germaine avait-elle ouvert la porte de la remise que César et Brutus, partant comme des flèches, entraînaient irrésistiblement les deux « feldgendarmes » de contrebande.
    Germaine avait une mémoire dure et fidèle de paysanne.
    — Surtout, ne les lâchez pas… ce serait terrible… c’est déjà arrivé, les types ont été perdus ! leur assena-t-elle.
    Augustin tenta un décisif effort pour retenir son chien et se rapprocha de Juliette :
    — Alors… au revoir… heu… vous rentrez à Paris ? fit-il.
    — Oui. Je m’en vais retrouver le guignol.
    — Le « général Augustin » ne sera plus là…
    — Mais il m’a promis…, hier soir…, de venir me voir, après les événements…
    Augustin, à ce rappel innocent, songea brusquement : « Mais alors, ce n’est pas si raté que je le croyais… » Il regarda Juliette : elle avait un doux sourire. En posant sa tasse, elle fit mouvoir dans son blouson, ses belles épaules.
    Une tendresse sauvage s’élança soudain du plus profond de lui…
    Augustin, en quelques secondes, se sentit tellement heureux qu’il oubliait tout…
    — Juliette, j’ai mille choses à vous dire…, commença-t-il.
    Mais il n’en put même pas dire une seule, car il fut, d’une poussée effrénée, entraîné par son chien. La tendresse sans doute avait-elle affaibli sa poigne pendant une seconde, cela avait suffi pour qu’en cet instant il fût projeté dehors.
    Il était déjà dans un matin gris, à l’orée d’un bois.
    Autour de l’hôtel c’était le lourd silence des campagnes.
    Devant la porte, Juliette lui disait au revoir de la main.
    La jeune fille songeait : « Pauvre garçon !… ; il se fait des idées… Je lui ai dit de venir me revoir, mais en camarade… ; c’était simplement pour l’encourager à franchir la ligne de démarcation… »
    Augustin, tiré par son chien, s’exaltait : « J’ai un ticket, pas de doute !… Elle est émue de me voir partir… Si un jour je la retrouve, j’aurai ma chance. Allons…, j’ai plus de succès avec les filles que je ne le crois… La journée s’annonce bien… »
    Dans le brouillard du petit jour, les arbres à la lisière de la forêt, sortaient de l’ombre nocturne, et sagement, reprenaient leurs places.

XXXI
    La forêt moussue renaissait au printemps. Le soleil s’étalait. Les feuilles de marronniers frappées par le vent du matin tourbillonnaient autour des deux « feldgendarmes », les ronces tendaient leurs lianes, éraflant les jambes au passage. Les chiens, tirant sur leurs laisses, sûrs de leur instinct, filaient sans hésitation, droit devant eux.
    Ils la connaissaient bien, dans la forêt, cette étrange ligne de démarcation.
    Le casque d’Augustin, trop petit, était bizarrement posé sur le haut de son crâne, en équilibre instable. Par contre, Stanislas semblait écrasé par un casque trop grand qui lui tombait au-dessous des oreilles. Il était obligé sans cesse de le relever, tant il se rabattait sur ses yeux.
    Dans les sentiers où ils marchaient, ombragés de rares chênes, pas
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