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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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vivantes   ! - et très peu les légumes, où la façon de découper les produits comptait autant que leur assaisonnement et leur cuisson. Chine administrative, corrompue du haut en bas, où chacun monnayait ses services ou achetait des avantages… Mais aussi Chine des lettrés, des poètes et des calligraphes, capables de s’enthousiasmer devant le plumage d’un oiseau ou le son d’une source…
    Allongée sur son lit, les yeux fixés au plafond de sa chambre, consciente, devant l’immensité du fossé qui la séparait d’un Chinois, que tout jugement par trop hâtif risquait d’être prématuré, Laura avait fini par s’endormir d’épuisement.
    Au moment où elle fermait l’œil, l’unique conclusion qu’elle avait tirée de sa journée était que son père avait fort peu de chances d’arriver à ses fins.
    Et la suite des événements allait - hélas   ! - lui donner raison…
     
    *
    *   *
     
    Aile de Phénix, dont l’efficacité, une fois l’argent empoché, ne pouvait pas être contestée, avait, comme il s’y était engagé, réussi à obtenir une audience dès le début de la semaine suivante.
    Mais un malheur n’arrive jamais seul.
    Le grand jour tant attendu, Brandon Clearstone s’était retrouvé le dos courbé comme celui d’un vieillard. La veille, il s’était démis une vertèbre lombaire alors qu’il hissait sur une charrette, avec l’aide de Wang le Chanceux et de deux coolies, l’instrument qu’il comptait montrer au vice-roi. Il souffrait le martyre et arrivait à peine à marcher en raison d’une abominable douleur qui lui irradiait tout le torse. Au prix de mille efforts et après s’être bandé le dos, il s’était traîné jusqu’au palais sous les regards accablés de sa femme et de sa fille. Car la famille Clearstone avait tenu à partir unie au combat, Barbara tenant fermement la main de son pauvre Joe qui, ce jour-là, était encore plus nerveux et grimaçant que d’habitude.
    C’est dire la déception et l’accablement des Clearstone quand un vieux mandarin chenu et court sur pattes avait intimé à Wang l’ordre de recharger sur la charrette l’instrument de musique que l’interprète venait de faire déposer par des coolies au pied des marches du palais du vice-roi.
    —  Ici, pas de meubles   ! avait déclaré le fonctionnaire dont les mains osseuses et parcheminées avaient obstinément refusé de donner le coup de tampon nécessaire à l’entrée du piano dans l’enceinte du pouvoir cantonais.
    Laura avait eu le plus grand mal à Contenir ses larmes tandis que Brandon, indigné et réprimant une grimace de douleur, apostrophait Wang.
    —  Dis-lui que ce n’est pas un meuble mais un instrument de musique destiné à une démonstration pour le vice-roi   !
    —  Les cadeaux, ce n’est pas par ici que ça rentre. Il faut les déposer au Bureau des Présents, juste de l’autre côté de la rue. Il n’ouvre que le matin   ! avait sèchement précisé le mandarin.
    Wang avait eu beau appeler discrètement Aile de Phénix à l’aide, le jeune eunuque, impavide et qui semblait ne pas le voir, n’avait pas bougé du banc sur lequel il était assis. Ayant empoché la monnaie pour une audience qu’il avait obtenue, il n’avait pas la moindre intention de faire du zèle.
    Tandis que Laura, accablée, constatait que ses craintes étaient fondées, Brandon, la mort dans l’âme, s’était rendu à l’évidence : une audience sans piano était un coup d’épée dans l’eau. Quant à Barbara, trop occupée à contrôler son fils, elle assistait, impuissante, à la débâcle des entreprises de son mari.
    Contrairement à ses espoirs, Laura n’avait même pas pu assister à l’audience. Posté devant la salle où le vice-roi de Canton recevait les hommages de ses visiteurs, l’un de ses secrétaires, un petit homme raide des pieds à la tête et dont les jambes flottaient dans des bottes molles trop larges pour sa taille, avait fait remarquer à Wang que seul le nom de Brandon figurait sur le registre des audiences, ce qui en excluait le reste de la famille. Brandon Clearstone avait eu beau tempêter et protester, arguant du fait qu’ils étaient venus exprès de Londres pour saluer le commissaire impérial et lui présenter une « requête extraordinaire   », rien n’y avait fait.
    C’est à peine si on l’avait écouté…
    Paysage bien étrange que celui de cette Chine mandchoue en pleine déliquescence mais confite dans ses

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