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La guerre de l'opium

La guerre de l'opium

Titel: La guerre de l'opium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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le bastingage va toucher la mer, ce qui vous fait risquer à tout moment de devoir vous mettre à nager dans une eau froide et noire   ! Brr   ! J’en ai de ces frissons… fit Homsley en élevant sa chope pour trinquer.
    —  J’ai une sainte horreur des trajets en bateau. Au bout de cinq minutes, sur une barge de la Tamise, je commence à tourner de l’œil… Les livres de comptes de Jardine & Matheson, heureusement, voyagent sans moi…
    —  Vous avez un métier idéal, Nash, dans une des firmes les plus prestigieuses du pays. Je l’ai toujours pensé. Rémunérateur, sédentaire… Bref, en tous points ce dont j’aurais rêvé pour ma petite personne… si je n’avais pas été un cancre à l’école. Si j’avais su   ! soupira Arthur avant de lamper sa chopine comme si l’alcool de houblon était l’unique remède susceptible de lui faire oublier ses frasques de jeunesse.
    Était-ce du lard ou du cochon, se demanda Stocklett, méfiant, en scrutant le visage de son interlocuteur pour essayer d’y découvrir la trace d’ironie attestant qu’il se fichait de lui.
    —  Vous ne m’avez toujours pas dit comment s’était passée votre dernière expédition, mon cher Homsley   ! insista-t-il, mi-figue, mi- raisin.
    —  Expédition… quel bien grand mot pour un pauvre petit marchand de laine de mon espèce   ! Pas folichon, ce voyage… et puis, vous savez, quand on arrive au large de Calais, l’insupportable odeur du continent vous prend à la gorge   ! Un remugle d’arrogant petit Français enfermé dans ses certitudes… Pire qu’une écurie d’étalons jamais nettoyée…
    L’escogriffe brandissait une nouvelle chope de bière aux trois quarts vide en s’esclaffant du bon mot qu’il venait de proférer - à vrai dire, il faisait fureur dans la plupart des clubs de Londres, à l’instar de celui où les deux hommes se retrouvaient tous les deuxièmes mercredis du mois en début d’après-midi pour s’adonner à leur sempiternelle partie de tarot. Homsley était un marchand de laine qui, tous les trimestres, acheminait vers la France, où elle était cardée à Amiens et tissée à Abbeville, une belle cargaison de laine coupée que les éleveurs du Yorkshire prélevaient sur le dos de leurs énormes bêtes à la pilosité très abondante et dont certaines pouvaient atteindre la taille d’un jeune veau bientôt sevré.
    —  Vous faites preuve d’un tel esprit antifrançais que cela finira par vous jouer des tours, mon cher Homsley… Un bon commerçant ne doit pas avoir d’ennemis. Et après tout, le continent restera pour longtemps notre plus grand débouché commercial… sans compter que les Français sont capables de tout acheter, y compris une paire de lunettes pour un aveugle   ! lui lança sévèrement l’expert-comptable, persuadé - à tort - que l’autre se payait sa tête.
    Arthur Homsley continuait à rire, aussi hilare de son bon mot que Nash Stocklett était contrarié de n’avoir pas réussi à lui clouer le bec avec le sien.
    Il est vrai que Homsley lui resservait à tout bout de champ ses sempiternelles plaisanteries antifrançaises, lorsqu’il était un tant soit peu éméché, sans se rendre compte qu’il répétait toujours les mêmes.
    Par exemple, cette histoire de singe rescapé d’un combat naval mené par une frégate britannique contre une goélette napoléonienne, au large de Hartlepool, et qui avait failli être pendu par la population locale après avoir été retrouvé sur la plage, au motif qu’il ne pouvait s’agir que d’un espion français, puisqu’il ne comprenait pas les questions qui lui étaient posées…
    En se tapant sur les cuisses, le marchand de laine, de plus en plus content de ses bons mots, fit signe au serveur de leur apporter le nécessaire à tarot, qui comprenait un jeu de cartes et un tapis vert.
    Stocklett l’interrompit :
    —  En fait, Arthur, nous ne pourrons pas jouer aujourd’hui… J’ai un rendez-vous important à 5 heures, au bureau.
    —  Avec votre chef   ?
    —  Avec une jeune fille…
    —  Voyons donc… Tiens, tiens… lâcha Homsley dont l’œil gauche s’allumait d’une lueur égrillarde tandis que le droit se fermait dans un clin d’œil.
    Agacé, Nash fit une mise au point :
    —  Ce n’est pas du tout ce que vous croyez. Il s’agit de ma filleule… La fille d’amis…
    —  C’est gentil d’être venu me le dire   ! Au fait, lors de notre dernière rencontre, vous deviez

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