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La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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avait appelé Peyrat.
    — Bien sûr, monsieur !
    Poulain avait deviné qu’ils avaient affaire à
des protestants.
    — Nous avons même un passeport de
monseigneur le roi de Navarre.
    Mots magiques !
    On les délia, et Poulain montra le précieux
document.
    — Pourquoi les soldats vous ont-ils
laissés passer ? demanda, toujours suspicieux, le paysan qui voulait les
torturer et les jeter dans la rivière.
    — Je suis prévôt d’Île-de-France. J’ai un
passeport. Leur capitaine a jugé que je n’étais pas un ennemi de sa cause. Nous
nous rendons à Montauban pour une importante affaire privée.
    — Accompagnez-moi ! décida M. Peyrat.
    — Nos chevaux et nos bagages sont à l’hôtellerie,
monsieur, je ne voudrais pas qu’on les pille.
    — Ils ne risquent rien, ils sont sous ma
protection, dit-il d’une voix calme. Il n’y a ici que des honnêtes gens.
    L’homme était un marchand, leur expliqua-t-il.
Il achetait du drap, vendait du miel et toutes sortes de condiments. Il les
invita à dîner avec son ami, marchand lui aussi, et leur demanda de lui parler
du roi de Navarre qu’il avait vu une fois à un synode protestant. Poulain lui
dit la vérité, comment ils avaient été capturés, et comment Henri de Bourbon
les avait graciés.
    — Ça ne m’étonne pas, dit le second
bourgeois avec un doux sourire. Monseigneur est un esprit tolérant et pénétrant.
Il a vu que vous étiez des hommes justes.
    — C’est sa familiarité qui m’a frappé, intervint
Olivier. Si rare pour un prince de sang.
    — Je le sais. On dit de lui qu’il aime à
se faire petit avec les petits. Lorsque je l’ai rencontré, chacun pouvait l’approcher.
Il frappait sur l’épaule de l’un, demandait à l’autre des nouvelles de sa femme
et de ses enfants, serrait la main à celui-ci, faisait un salut à celui-là, adressait
quelques paroles honnêtes à tous, et à ceux qui s’étonnaient de sa bonhomie, il
répondait : « Entre Gascons, nous ne tirons jamais à la courte paille.
Personne ne calcule avec moi, et je ne calcule avec personne. Nous vivons à la
bonne franquette, et l’amitié se mêle à toutes nos actions [71] . »
    Le bourgeois poursuivit avec ferveur :
    — Navarre mène une rude vie pour la cause
de notre religion. On dit qu’il n’a ni le temps de dormir ni celui de manger. Quand
il dort, il le fait vêtu et à même le sol. Quand il mange, c’est à n’importe
quelle heure, et n’importe quoi ! C’est pour cela que nous l’aimons. Il
sera notre roi… Il sera un bon roi.
    Ils repartirent, mais
le surlendemain ils tombèrent sur une autre troupe qui leur barra le chemin. Une
vingtaine d’hommes barbus, aux habits bariolés de vives couleurs avec des
découpures aux manches, aux trousses et aux jarretières, et des rubans sales
noués autour des bras et des jambes. Leurs trousses étaient de deux couleurs, en
tissu spiralé et bouffant. Certains avaient des corselets d’acier, d’autres des
cuirasses à tassettes. Certains portaient des chapeaux larges avec une masse de
plumes, et d’autres des cervelières protégeant la nuque.
    C’étaient des lansquenets, des mercenaires
germaniques, venus au secours des calvinistes français et qu’on avait dû
oublier de payer. Poulain savait que s’ils portaient des vêtements si larges et
si découpés, c’était pour ne pas être gênés dans leurs mouvements durant les
batailles.
    Celui qui paraissait commander, et qui portait
un manteau rouge, s’avança à pied, sa zweilhander – une épée à deux
mains – attachée dans le dos. C’était un colosse blond et hirsute, à la bouche
d’ogre, aux lèvres lippues surmontées d’une épaisse moustache, à la longue
barbe blonde tressée et nouée avec des rubans rouges et surtout aux épais
sourcils qui faisaient ressortir ses traits burinés. D’une main noueuse, il
tendait sa cervelière aux voyageurs :
    — Messeigneurs, leur dit-il avec un
accent guttural, vous devez payer votre passage en crachant à mon bassinet [72] .
    — Combien ? demanda Olivier, terrorisé
par cette troupe à l’allure de sauvages.
    — Ce que vous voulez, mais comme vous
êtes trois, si c’est moins de trois écus, je vous montrerai, avec ma zweilhander, de quelle couleur est votre cervelle, plaisanta le lansquenet.
    — Pour ma part, la couleur de ma cervelle
m’importe peu, messire ! ironisa Venetianelli.
    — Évidemment, vous pouvez préférer être
pendus ! s’esclaffa

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