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La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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Mayenne.
    Tous deux correspondaient assez régulièrement
depuis le début des opérations militaires contre les huguenots en Gascogne et
en Périgord. Après un début de campagne très lent, paralysé par la mollesse de
Matignon, Charles de Mayenne avait finalement pris Tulle. Avec sa puissante
armée, il aurait dû être rapidement maître de tout le pays s’il n’y avait eu l’hiver,
un des plus froids jamais connu, la peste qui décimait ses troupes, et surtout
la famine. Vivant sur un pays ruiné, l’armée de Mayenne s’étendait sur des
dizaines de lieues, pillant fermes et villages pour se nourrir et ne respectait
aucun commandement. Il était donc difficile au duc de conduire la guerre à son
gré.
    Mayenne avait pourtant bien cru prendre
Navarre à Nérac, mais le Béarnais s’était enfui comme un lâche, sans livrer
bataille. Le duc avait alors choisi de réduire toute la Gascogne avant de
remonter vers le Poitou et d’assiéger La Rochelle. En avril, il avait pris la
ville de Saint-Bazile, mais sans y trouver plus de profits que quelques rats
affamés.
    Par malheur, un peu plus tard, lors du siège
de Montségur, il était tombé malade d’une fièvre tierce et avait été transporté
à Bordeaux. C’est de là qu’il lui écrivait pour lui annoncer qu’il y resterait
quelques semaines tant le mal l’avait affaibli.
    Mauvaises nouvelles ! constata la
duchesse en jetant avec fureur le pli sur une table. L’été approchait, le
meilleur moment pour les armées qui pouvaient se déplacer et livrer bataille. Or,
celle de son frère n’était pas en ordre de marche et son général ne pouvait la
commander. Cette année risquait fort d’être perdue, comme l’avait été la
précédente. Il était loin le mois de novembre 1585 où Charles lui écrivait, après
sa victoire sur le prince de Condé qu’il avait contraint à fuir en Angleterre :
    … Je vous dirais en vérité que ceci est une
œuvre de Dieu… La plus grande part de la noblesse [huguenote]… s’est sauvée… le
reste s’est jeté dans les bois quittant leurs armes et leurs chevaux… ceux qui
sont attrapés criaient miséricorde… les soldats… disent qu’on les a menés à la
boucherie et qu’ils ne seront jamais commandés d’un tel chef [Condé].
    Hélas, Charles n’avait pu exploiter cette
déroute, rageait-elle. Comme son frère Henri, d’ailleurs, qui avait eu Paris et
le royaume à portée de main, en 1585, lorsqu’il avait imposé au roi le traité
de Joinville. Mais Henri était trop légitimiste, trop prudent. Il soutenait les
seize mais ne voulait pas se mêler à leurs basses intrigues. Il aspirait au
trône tout en refusant d’y accéder par des moyens bas et honteux. Il affirmait
ses droits à la couronne, mais il était incapable de les exercer par la force. Finalement,
il se contentait de sa popularité.
    Ce pusillanime lui coûterait le royaume. Décidément
ses deux frères la décevaient !
    Dans la fratrie des Guise, la duchesse était
certainement celle qui avait le plus de caractère. Elle possédait l’habileté de
son aîné le cardinal de Guise, la capacité de se faire aimer de son frère Henri,
et l’audace furieuse de Charles de Mayenne. De surcroît, contrairement à eux, elle
n’était arrêtée par aucune barrière morale, car elle était persuadée que Dieu
guidait ses pas.
    Elle était aussi nantie d’une étonnante
perspicacité, qu’elle tenait sans doute de son oncle, le cardinal de Lorraine –
celui qui avait longtemps dirigé les actes de son père François de Guise –, aussi
avait-elle deviné le danger que représentait le roi de Navarre pour sa famille.
    Pour son frère Mayenne, le Béarnais n’était qu’un
hérétique qu’il réduirait par la force. Pour Guise, le Bourbon n’était qu’un
prétendant à la couronne sans aucun droit puisque le pape l’avait excommunié. Elle
seule avait perçu la redoutable habileté militaire du Béarnais, ce don qu’il
avait d’anticiper les avantages et les dangers d’une position lors d’une
escarmouche. Tout aussi menaçantes étaient son audace et sa ruse dans la
conduite des coups de main. Plus inquiétante encore était cette capacité qu’il
avait à inspirer confiance à tous ceux qui l’approchaient.
    Ces qualités en faisaient le plus formidable
adversaire que les Guise aient jamais trouvé devant eux.
    Son frère Mayenne ne vaincrait pas Henri de
Navarre par la force, se disait-elle, et si le Bourbon

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