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La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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attendit ensuite sur le parvis.
    Quand Olivier sortit et ne fut plus qu’à
quelques pas d’elle, elle baissa son masque comme s’il la gênait et elle planta
ses yeux dans les siens avec impudence. Mais le jeune homme ne lui prêta aucune
attention et poursuivit son chemin. Tant d’indifférence la bouleversa à un
point qu’elle n’aurait jamais cru ressentir. Elle resta immobile, douloureusement
muette, le regardant s’éloigner alors que son cœur plein d’amertume battait le
tambour.
    Le roi de France l’avait rejetée. Ce petit
bourgeois roturier faisait de même. Était-elle désormais incapable de séduire
un homme ? Ceux-ci n’éprouveraient-ils plus jamais d’appétence pour elle ?
Était-elle devenue si peu désirable ?
    Elle en vint à songer qu’on lui avait
peut-être jeté un sort. Après tout, les sorciers étaient capables de nouer l’aiguillette
chez les hommes [44] , pourquoi n’y parviendraient-ils pas chez les femmes ? Quelque
magicien aurait-il pu la rendre déplaisante, disgracieuse ? Comment savoir ?
    — Je me suis renseignée, madame.
    C’était sa dame de compagnie qui la fit sortir
de ses pensées.
    — Qui est-il ?
    — Il est avocat à la Chambre des comptes,
madame, et bourgeois de Paris.
    — Rentrons !
    Dans le coche, elle ne pensa qu’à lui. Certaine
d’avoir reçu une malédiction, il lui vint à l’idée que ce sortilège
disparaîtrait si elle parvenait à se faire aimer de lui. Elle avait le
sentiment que si elle y parvenait, elle se ferait aussi fatalement aimer du roi.
Finalement, la mort de Navarre et l’amour de ce jeune homme n’étaient que les
deux facettes du même problème. Navarre disparu, à nouveau aimée des hommes, elle
gouvernerait le roi à sa guise.
    Mais comment faire ? Comment se faire
désirer de quelqu’un qui affichait son indifférence ? Comment l’ensorceler
à son tour ?… C’est en songeant à ce mot qu’elle se souvint de cette
effroyable histoire survenue à la Cour, douze ans plus tôt.
    Deux gentilshommes du duc d’Alençon avaient
participé à un obscur complot permettant la fuite du duc et d’Henri de Navarre,
alors prisonniers au Louvre. Ils se nommaient Boniface de La Mole et Annibal de
Coconnat. Piémontais venu en France pour défendre la cause catholique, Coconnat
s’était tellement fait remarquer pour sa cruauté envers les protestants durant
la Saint-Barthélemy que le roi Charles IX l’avait qualifié d’un des plus
méchants hommes de son royaume. Pendant le massacre, il avait racheté trente
huguenots des mains du peuple. Sous la promesse de les laisser saufs, il leur
avait fait renier leur religion avant de les poignarder à petits coups pour qu’ils
meurent le plus douloureusement possible. Contrairement à lui, son ami La Mole
était fort doux. On l’appelait le baladin de la Cour tant il était aimé des
dames. C’était aussi un homme fort religieux, persuadé que la messe expiait
tous les péchés. Ainsi, pour éviter d’être damné, il en entendait cinq à six
par jour et on se gaussait de lui en disant que, pour tenir registre de ses
débauches, on n’avait qu’à compter les messes auxquelles il assistait.
    Après la fuite d’Alençon, les deux hommes
furent emprisonnés et leur logis fouillé. Chez La Mole, on découvrit une figure
de cire et de fer représentant un homme ayant le cœur et la tête percés. Or le
roi était au plus mal, cruellement tourmenté par des maux de tête et de ventre.
Charles IX fut convaincu que Cosimo Ruggieri, le mage de sa mère, avait
fabriqué la statuette et était à l’origine de son envoûtement.
    La Mole avait été interrogé à la Bastille en
présence du souverain. Bien qu’ayant juré n’avoir jamais rien entrepris, on l’avait
mis à la torture. Sous les brodequins, il avait reconnu que la statuette avait
été faite par Ruggieri, mais c’était pour se faire aimer d’une maîtresse dont
il avait refusé de donner le nom.
    Torturé à son tour, Coconnat avait, lui, reconnu
l’envoûtement du roi. Catherine de Médicis avait donc été contrainte d’autoriser
l’interrogatoire de Ruggieri : Faites-lui tout dire… Que l’on sache la
vérité du mal du roi et qu’on lui fasse défaire s’il a fait quelque
enchantement pour nuire à sa santé… avait-elle écrit au lieutenant civil.
    Bien qu’ayant tout nié, Ruggieri avait été
condamné aux galères et les deux gentilshommes avaient eu la tête tranchée en
place

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