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La guerre des rats(1999)

La guerre des rats(1999)

Titel: La guerre des rats(1999) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Robbins
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ne les entendra que lorsque je gravirai le perron. Il enverra chercher ma sœur à l’hôpital et, en l’attendant, nous prendrons le petit-déjeuner ensemble, nous parlerons non de la guerre mais des vaches et du chien.
    Un faible grondement pareil à un coup de tonnerre lointain parvint à la conscience de Mond. Non, pas le tonnerre. Une tôle qu’on soulève et qui tremble.
    Thorvald pousse le toit de son abri sur le côté. Que se
passe-t-il ?
    Nikki rampa jusqu’au bout du mur, pencha la tête de l’autre côté, juste assez pour voir la cachette du colonel. Deux spectres sous le clair de lune, deux hommes en tenue de camouflage blanche, faisaient glisser la tôle sur la droite. L’un d’eux, qui portait un fusil à lunette, en braqua le canon vers le trou.
    Le caporal retint sa respiration. La lune éclairait uniquement les bouts éraflés des bottes de Thorvald. Elles étaient l’une sur l’autre, il gisait sur le flanc. Le soldat au fusil descendit dans le trou, donna un coup de pied. Les bottes de Thorvald se redressèrent, leurs pointes noires montrant maintenant le ciel. L’autre soldat se pencha, tira sur quelque chose, se releva avec une poignée de papiers à la main. Il les approcha de son visage, sous la capuche, les tourna vers la lune grêlée, en laissa tomber quelques-uns et garda le reste, adressa un hochement de tête à son compagnon. Celui-ci prit le fusil de Thorvald, le Moisin-Nagant russe, puis les deux hommes repartirent au petit trot avec leur butin vers l’autre bout du parc.
    Nikki regarda leurs silhouettes s’estomper. Même s’il avait emporté son fusil, il n’aurait pas pu les abattre tous les deux. Il en aurait tué au moins un, peut-être le Lièvre. Peu importe. C’était fini.
    Il s’approcha du trou à quatre pattes. Thorvald gisait sur le dos dans la terre russe, le bras droit levé comme pour faire signe à quelqu’un. Sa parka blanche était déboutonnée ; en dessous, la veste avait été fouillée. Le bras gauche reposait le long du corps. La partie supérieure du bras droit, là où la tête fracassée était retombée après avoir reçu la balle, était souillée. Sous le coude, la terre s’était assombrie. La lune blanche qui contemplait la scène en même temps que Nikki avait, par quelque procédé alchimique grossier, décoloré le sang séché et transformé le rouge en noir.
    Nikki se leva. Il dominait Thorvald, maintenant ; c’était la première fois qu’il avait cette impression. Il n’éprouvait aucune peur à se tenir debout dans le parc. Le Lièvre était parti, le colonel aussi. Les devinettes, les astuces, la paranoïa, les heures passées à guetter, les tours et détours de ce duel de tireurs d’élite : c’était fini. Le parc était redevenu une partie de Stalingrad ; il n’était plus un lieu étrange balayé par des réticules mortels, mais un endroit délabré, familier.
    Mond regarda la lune, lointaine et blanche, qui brillait aussi au-dessus de chez lui. Il aurait voulu pouvoir sauter au-dessus du cadavre de cette crypte ouverte, s’élancer dans le ciel, attraper le bord de la lune, s’y hisser et ramper dans un tunnel nacré, pardessus la Russie et la Pologne, jusqu’en Allemagne, jusqu’à ce qu’il soit au-dessus des pâtures de Westphalie. Alors, il descendrait, à cheval sur les flocons de neige, comme les gnomes des contes de fées.
    Thorvald avait été son seul espoir de rentrer au pays. Depuis qu’il avait fait la connaissance du colonel, une semaine plus tôt, sur la piste de Goumrak, Nikki rêvait de son père, de sa sœur et de leur ferme. Maintenant son rêve n’était plus, comme la lune, qu’un petit signe blanc accroché sur l’immensité noire
au-dessus de Stalingrad. Il fit demi-tour, résistant à l’envie de se baisser pour prendre le sac de sandwiches du colonel.
    Il s’enfonça dans la nuit, marchant sur la route que le colonel et lui avaient prise ces trois derniers soirs pour regagner le bureau du lieutenant Ostarhild. Ses pas claquaient, solitaires, sans Thorvald à ses côtés. Il chercha en lui une once de chagrin pour le colonel, pour l’officier qui lui avait témoigné un peu de confiance et de gentillesse. Il n’y en avait pas. Rien que de la déception.
    Il regagna ses quartiers au sous-sol de la boulangerie sans prendre la peine de se mettre de temps en temps à couvert, sans s’arrêter pour écouter les aboiements d’armes à feu légères, comme le colonel et lui le

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