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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler
Autoren: Michel Folco
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Qu’entends-je ? Neuf Kronen  !
    Un blizzard cérébral se leva sous sa calotte crânienne, interdisant tout calcul mental.
    – Pourriez-vous me prouver, mein Herr , que vous avez réellement payé cette huile neuf Kronen  ? C’est très important !
    Le décorateur lui présenta le registre dans lequel la loi l’obligeait à consigner le nom du vendeur et le prix d’achat de chaque transaction.
    Acheté ce jeudi 21 juillet 1910 une huile représentant le Reichsrat signée A. Hitler. Vendue par M. Reinhold Hanisch, courtier en œuvres d’art, pour la somme de neuf (9) Kronen .
    Reinhold Hanisch ! Un grondement assourdi se fit entendre.
    – Quelque chose ne va pas ? Vous ne vous sentez pas bien ? demanda obligeamment le décorateur, voyant le jeune homme pâlir en portant la main à son ventre.
    Ainsi ce misérable Sudète avait osé l’escroquer… Depuis
combien de temps cela durait-il ? Sans doute depuis le premier jour…
    Feuilletant le registre, Adolf découvrit qu’une autre huile, La Porte de la Rotenturm vue côté ville , avait été vendue onze Kronen  : or, il se souvenait très bien en avoir reçu quatre !
    – Ce Reinhold Hanisch a bien des moustaches en guidon de vélo de course, un grand front bombé et l’ongle du petit doigt long comme ça ?
    – C’est bien lui.
    Adolf quitta la boutique, l’esprit sonnant le tocsin. Malgré la distance, il rentra à pied, mais, loin de l’apaiser, cette longue marche le remonta tel le ressort d’un réveil ficelé à des pains de dynamite (Comme il a dû rire de ma naïveté… et moi parfait idiot du village qui n’ai jamais vérifié… je vais lui arracher les tripes et je vais l’étrangler avec… mais avant il va me rembourser !).
    Hanisch disputait une partie de Schafkopf à un Heller le point quand Adolf fit irruption dans la salle de récréation.
    – Vous êtes démasqué, fripouille, je sais tout !
    Loin de se démonter, le Sudète toisa son associé :
    – Ah oui, eh bien dis-moi quelle est la hauteur du pic de Gerlach (le point culminant de la Tchécoslovaquie) ?
    Il éclata d’un rire gras, imité par ses compagnons de jeu, un trio de lugubres traîne-savates qui empestaient le vin rouge.
    – Je sors de chez Figl, le décorateur dans la Liechtensteinstrasse et il m’a montré son registre. J’ai donc la preuve absolue que vous lui avez vendu le Reichsrat du mois dernier pour neuf Kronen , alors que vous m’avez assuré l’avoir bradé six ! Qu’avez-vous à me répondre, Herr Reinhold Hanisch !
    Toute trace d’hilarité disparut chez Hanisch qui, faute de trouver mieux, simula l’innocence outragée.
    – Tu me déçois beaucoup, Adolf. Je n’aurais pas cru ça de toi ! Comment tu peux m’accuser publiquement d’une
pareille infamie sans même me laisser le temps de t’expliquer ?
    – Je n’ai pas besoin d’explication, tout vous accable ! Je veux la totalité des sommes que vous m’avez volées, et je les veux maintenant, tout de suite, à l’instant même et sur-le-champ !
    – Cet Itzig de Figl a inscrit n’importe quoi sur son registre… tu comprends pas que c’est son intérêt de gonfler ses prix d’achat pour les impôts ?
    – Et la petite huile de la porte de Rotenturm pour onze Kronen alors que je n’en ai reçu que quatre ! Vous n’êtes qu’un vulgaire voleur de très bas étage, Herr Reinhold Hanisch, et je veux mon argent TOUT DE SUITE… et pas en boutons de culotte !
    Ça devait arriver un jour, et c’est aujourd’hui, se dit Hanisch avec fatalisme.
    Attirés par les cris, les pensionnaires firent cercle autour d’eux, commentant les répliques, souhaitant quelques coups de poing, au pire une grande baffe…
    – Je préfère manger mes crottes de nez que vous redonner une seule de mes œuvres à vendre.
    Hanisch pâlit.
    – Ah, je comprends tout ! Tu t’es acoquiné avec Neumann, c’est ça, hein ! Et maintenant tu inventes n’importe quoi pour me saquer ! En tout cas, ça ne va pas se passer comme ça !
    – Vous ne voulez pas me rembourser ?
    – Même si je le voulais, je le ferais pas… Les gogos de ton acabit méritent de se faire plumer !
    Les joues d’Adolf s’enflèrent, rosirent, picotèrent. Ses narines frémirent, ses mains se formèrent en poings, l’assistance retint son souffle, une bonne bagarre égaierait l’après-midi.
    – Je jure sur la tête de Richard et d’Arthur que vous allez regretter de m’avoir
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