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La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler

Titel: La jeunesse mélancolique et très désabusée d'Adolf Hitler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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cœur à la vue du nouveau locataire, un étudiant en pharmacie de Graz qui lisait assis sur le lit d’Adolf.
    August passa une mauvaise nuit dans son ancien lit, et les punaises ne furent qu’à demi responsables.
    Le lendemain, il loua un Kabinett quelques rues plus loin et revint à la Stumpergasse déposer son adresse, persuadé qu’Adolf chercherait à le contacter, tôt ou tard.
    ***
    Lorsque August revit son meilleur ami d’adolescence, trois décennies et une guerre mondiale étaient passées.

24
    « Celui qui, dans un domaine quelconque, est considéré comme anormal au point de vue social et moral, celui-là d’après mon expérience est toujours anormal dans sa vie sexuelle. »
    Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie de la sexualité .
    Mardi 29 septembre 1908.
    Palais Hansen, Vienne.

    – Une monumentale erreur a encore été commise à mon encontre, je dois parler à monsieur le recteur tout de suite.
    Avec un air de déjà-vu, Adolf suivit le fonctionnaire jusqu’au rectorat.
    – Sauf votre respect, monsieur le recteur, il est tout à fait injuste de me recaler à une épreuve que j’ai si brillement réussie l’année dernière !
    Avant que le recteur ait pu l’en dissuader, Adolf déballa sur le bureau les quarante-quatre aquarelles et huiles que l’on venait de lui rendre : comme la surface du bureau ne suffisait pas, il en déposa sur le tapis.
    – Regardez, monsieur le recteur, regardez bien, et dites moi si je mérite d’être recalé !
    Après un petit moment, le recteur réajusta ses lorgnons, renifla, déclara :
    – Vous vous fourvoyez, jeune homme, ces quelques portraits confirment d’une manière patente votre manque d’aptitude… En revanche, si l’on observe de plus près vos paysages urbains… par exemple cette perspective de la Franz-Josefsplatz de Linz… on note une certaine disposition pour l’architecture… mais regardez vos personnages ! On dirait des figurines de plomb… et leur disproportion… Prenez ces deux femmes qui contemplent les vitrines, eh bien, selon votre échelle, elles auraient dans la réalité deux mètres de haut…
    Les joues en feu, la mèche sur l’œil, Adolf regroupa ses travaux avec des gestes d’automate déréglé. Sa détresse émut le recteur.
    – Tentez votre chance au concours d’architecture, les inscriptions sont ouvertes jusqu’à la fin du mois. Si vous avez votre Reifeprüfungszeugnis sur vous, vous pouvez vous y rendre dès maintenant, les bureaux sont ici même dans le palais, au rez-de-chaussée.
    La lueur qui s’était allumée dans l’œil d’Adolf s’éteignit : il releva sa mèche et déclara :
    – Je ne l’ai pas passé, monsieur le recteur, j’étais malade.
    Le recteur eut une mimique d’impuissance.
    – Dans ce cas…
    – Il n’y a pas d’autre solution ?
    – Si, une seule : passez votre Reifeprüfung et revenez vous inscrire.
    Adolf se revit à Spital, plongé jusqu’au cou dans la rivière, grelottant toute la nuit. Il s’était cru si malin !
    L’esprit naufragé, le sens de l’orientation perdu, il sortit du palais Hansen et marcha droit devant lui. Passant à proximité d’un lampadaire, il brisa dessus sa canne d’étudiant. Après quoi, les larmes aux yeux parce qu’il y tenait
beaucoup, il ramassa les morceaux et les jeta dans un taillis de la Karlsplatz.
    Il marcha toute la journée, jusqu’à l’épuisement, ruminant sur son grand désarroi : qu’allait-il faire ? Il n’avait jamais envisagé une telle déconfiture ; il n’avait aucun plan de rechange.
    Jour après jour, argument après argument, Adolf s’ingénia à reconstruire son moral, tel un maçon lève son mur. Il finit par se persuader d’avoir été injustement évincé de l’Académie, ainsi son talent de peintre architecte n’était pas remis en cause… Si je suis un génie, il n’y a qu’un autre génie qui peut le reconnaître… et comme il n’y en avait aucun dans ce jury…
    ***
    Le 15 novembre, la carte postale d’August annonçant son retour de l’armée arriva au courrier du matin. Le sang d’Adolf ne fit qu’un tour. Incapable d’assurer le second rôle après avoir toujours tenu le premier, il déménagea le lendemain et s’installa dans un Kabinett , au 22 de la Felberstrasse, porte 16. Sa nouvelle logeuse, Helene Riedl, était la veuve d’un cheminot qui s’était fracassé l’occiput sur une plaque de verglas. La chambrette à six Kronen était plutôt

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