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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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au duc et pourquoi.
    — Je n’ai rien à dire.
    — Comment va votre femme ? demanda Jeannette d’un
ton radouci.
    — Ses douleurs disparaissent avec la fin de l’hiver,
grâce à Dieu. Elle va bien, madame.
    — Eh bien, elle n’ira plus bien du tout lorsqu’elle
apprendra ce que vous faites avec la fille de votre clerc ! Quel âge
a-t-elle, Belas ? Douze ans ?
    — Madame !
    — Ne me servez pas du « madame » !
    Jeannette tapa sur la table et faillit renverser l’encrier.
    — Alors que s’est-il passé entre les hommes d’affaires
du duc et vous ?
    Belas poussa un soupir. Il remit le bouchon sur l’encrier,
posa la plume et se frotta les joues.
    — Je me suis toujours occupé, dit-il, des affaires de
votre famille. Cela est mon devoir, madame, et parfois il me faut faire des
choses dont je préférerais m’abstenir, mais de telles choses font aussi partie
de mon office…
    Il eut un petit sourire.
    — Vous avez des dettes, madame. Il vous serait facile
de rétablir vos finances en épousant un homme qui aurait du bien, mais vous
semblez répugner à suivre cette voie, aussi ne vois-je que la ruine dans vos
perspectives d’avenir. Oui, la ruine. Vous voulez un conseil ? Vendez
cette maison, cela vous permettra de vivre pendant deux ou trois ans.
Entre-temps, le duc aura certainement chassé les Anglais de Bretagne et ainsi
vous retrouverez votre fief de Plabennec.
    Jeannette tressaillit.
    — Vous pensez vraiment que ces démons vont être battus
aussi facilement ?
    Elle entendit un bruit de sabots dans la rue et vit les
hommes de Skeat entrer dans la cour. Hilares sur leurs chevaux, ils n’avaient
pas l’air d’être sur le point de subir une défaite. Elle craignait qu’ils ne
fussent imbattables, en raison précisément de cette joyeuse confiance en
eux-mêmes qui l’exaspérait.
    — Je pense, madame, qu’il vous faut choisir ce que vous
êtes. Êtes-vous la fille de Louis Halévy ? Ou bien la veuve d’Henri
Chénier ? Êtes-vous une marchande ou une aristocrate ? Si vous êtes
une marchande, madame, mariez-vous ici et soyez satisfaite. Si vous êtes une
aristocrate, rassemblez tout l’argent que vous pouvez, allez chez le duc et
prenez un nouveau mari avec un titre.
    Jeannette trouvait ce conseil impertinent mais elle se
contint.
    — Combien tirerons-nous de cette maison ?
demanda-t-elle.
    — Il faut que je me renseigne, madame, dit Belas.
    Il connaissait déjà la réponse et savait qu’elle ne plairait
pas à Jeannette. En ville, une maison occupée par l’ennemi perdait beaucoup de
sa valeur. Ce n’était pas le moment d’en informer Jeannette. Il était
préférable d’attendre qu’elle soit dans une situation désespérée, ainsi,
pensait l’avocat, il pourrait acheter la maison et les fermes ruinées pour une
bouchée de pain.
    — Y a-t-il un pont sur la rivière à Plabennec ?
demanda-t-il en tirant à lui le parchemin.
    — Oubliez cette requête, lui dit Jeannette.
    — Si vous le souhaitez, madame.
    — Je vais réfléchir à votre conseil, Belas.
    — Vous ne le regretterez pas, répondit-il sérieusement.
    Elle était perdue, se disait-il, perdue et vaincue. Il
allait lui prendre sa maison et ses fermes, le duc réclamerait Plabennec et il
ne lui resterait rien. C’était bien là ce qu’elle méritait, cette créature
bornée et fière qui s’était élevée au-dessus de son état.
    — Je suis toujours à votre service, dit Belas
humblement.
    Dans l’adversité, pensait-il, un homme intelligent trouve
toujours une occasion de profit. Jeannette était à point pour être plumée.
Quand on fait garder le troupeau par un chat, les loups font un bon repas.
    Jeannette ne savait que faire. Elle répugnait à vendre la
maison, craignant qu’on ne lui en offre un prix dérisoire, mais elle ne savait
comment trouver de l’argent autrement. Le duc l’accueillerait-il bien ? Il
n’en avait donné aucun signe, depuis qu’il s’était opposé à son mariage avec
son neveu, mais peut-être s’était-il radouci ? Peut-être accepterait-il de
la protéger ? Elle décida d’aller prier pour y voir plus clair. S’étant
enveloppé les épaules d’un châle, elle traversa la cour sans regarder les
soldats qui venaient de rentrer et pénétra dans l’église Saint-Renan. Il y
avait là une statue de la Vierge, tristement privée de son auréole d’or qui
avait été arrachée par les Anglais. Jeannette venait souvent lui

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