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La lance de Saint Georges

La lance de Saint Georges

Titel: La lance de Saint Georges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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rares. À force de pillage, les hommes
de Skeat s’enrichirent. Il y avait des jours pénibles où il fallait progresser
dans la pluie froide avec des mains gercées et des vêtements humides. Thomas détestait
qu’on le charge, lui et ses hommes, de rassembler les chevaux et de ramener le
bétail à la ville. Pour les oies, c’était facile. On leur tordait le cou et on
les accrochait à la selle. Mais les vaches étaient lentes, les chèvres
erratiques, les moutons stupides et les cochons têtus. Néanmoins, il y avait
dans les rangs suffisamment d’hommes qui avaient été élevés dans des fermes
pour être certain que les animaux seraient conduits en toute sécurité à La
Roche-Derrien. Là, ils étaient rassemblés sur une petite place qui était
devenue un lieu d’abattage et une cuve à sang. Will Skeat envoyait aussi en
ville des charretées de butin dont la plus grande part était expédiée par
bateau en Angleterre. Le plus souvent il s’agissait d’objets ordinaires –
des pots, des couteaux, des lames de charrue, des pointes de herse, des
tabourets, des seaux, des fuseaux, tout ce qui pouvait se vendre, au point
qu’on disait qu’il n’y avait pas une seule maison du sud de l’Angleterre qui ne
possédât pas au moins l’un de ces objets pillés en Bretagne.
    En Angleterre, on chantait Arthur, Lancelot, Gauvin et
Perceval, mais en Bretagne les hellequins avaient la bride sur le cou.
    Et Thomas était un homme heureux.
     
    Bien que Jeannette l’admît avec répugnance, la présence des
hommes de Skeat représentait un avantage pour elle. Tant qu’ils campaient dans
sa cour, elle se sentait en sécurité dans la maison et bientôt elle se mit à
craindre les longues périodes qu’ils passaient loin de la ville, car c’était
alors que sir Simon Jekyll venait la hanter. Au début elle l’avait considéré
comme le diable en personne, un diable stupide, assurément, mais un individu
dépourvu de sentiments et de remords qui s’était persuadé que Jeannette ne
souhaitait rien tant que de devenir sa femme. De temps à autre, il se forçait à
une courtoisie maladroite, bien que le plus souvent il fût suffisant et
grossier. En toute occasion il la regardait comme un chien regarde un quartier
de bœuf. Il allait entendre la messe à l’église Saint-Renan dans le but de la
courtiser et Jeannette avait l’impression de ne pouvoir faire un pas dans les
rues de la ville sans tomber sur lui. Un jour, ayant rencontré Jeannette dans
l’allée qui longe l’église de la Sainte-Vierge, il la coinça contre le mur et
passa ses gros doigts sur sa poitrine.
    — Je pense, madame, que vous et moi sommes bien
assortis, lui dit-il avec le plus grand sérieux.
    — Il vous faut une femme qui ait de l’argent, lui
dit-elle car elle avait eu vent de l’état des finances de sir Simon.
    — J’ai votre argent, lui fit-il remarquer, cela a
effacé la moitié de mes dettes et les bateaux paieront la plus grande part du
reste. Ce n’est pas votre argent que je désire, ma jolie, mais vous.
    Jeannette essaya de s’échapper mais il la maintenait
fermement contre le mur.
    — Vous avez besoin d’un protecteur, ma chère, dit-il
avant de l’embrasser tendrement sur le front.
    Il avait une bouche très charnue, avec de grosses lèvres
toujours humectées comme si sa langue était trop grande. Le baiser était humide
et sentait le vin tourné. Quand il lui mit la main sur le ventre, elle se
débattit encore plus mais il se contenta de se presser contre elle et de
défaire ses cheveux.
    — Vous aimeriez le Berkshire, ma chère.
    — Je préférerais vivre en enfer.
    Il entreprit de défaire les lacets de son corsage pendant
que Jeannette essayait vainement de le repousser. Elle ne fut sauvée que par
l’apparition d’un groupe de cavaliers. Leur chef salua sir Simon et, comme
celui-ci tournait la tête pour répondre, elle parvint à se dégager. Laissant
son chapeau entre ses mains, elle se précipita chez elle et mit la barre, puis
elle s’assit en pleurant, envahie par la colère et le désespoir. Elle le
haïssait.
    Elle haïssait tous les Anglais, bien qu’elle vît, au fil des
semaines, les habitants en venir à considérer d’un meilleur œil leurs
occupants, qui dépensaient du bon argent à La Roche-Derrien. Les pièces
d’argent anglaises étaient dignes de confiance, à la différence des pièces
françaises qui contenaient du plomb ou de l’étain. La présence des Anglais

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