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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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Penchemel, très las.
    Satisfait, Blacfort reprit son interrogatoire:
    – Parlez-moi de ce chef, ce capitaine de vaisseau.
    Renchérissant sur les fois précédentes, le baron, pressé d’en finir, fit une description très exhaustive:
    – À peine quarante ans. Grand, large d’épaules, taille bien prise. Beaucoup d’élégance naturelle. Un visage tourmenté mais passionnant et attachant, hâlé par le soleil et le vent du large. Des yeux gris-vert, un regard très pénétrant. À ses manières, mais je n’en ai pas la preuve, je le crois aristocrate. Mais c’est un républicain farouche. Que vous dire d’autre si ce n’est, en le citant, qu’il vous veut tuer?
    Blacfort était satisfait. Ce portrait lui plaisait et, après treize ans de rupture et de silence, il correspondait assez précisément à l’idée que Blacfort se faisait de Valencey d’Adana aujourd’hui. Par effet de ricochet, le baron de Penchemel fut cette fois crédité d’une bonne opinion car pour Blacfort, qui pensait comme Blacfort trouvait grâce aux yeux de Blacfort!
    Le général vendéen se détendit légèrement.
    – Je crois, baron, que vous venez de sauver votre vie. Votre vie, mais pas votre château car après ce dont il fut le théâtre, je m’en vais le brûler.
    L'abbé, qui trouvait ce château tout de commodités et de confort, dressa l’oreille.
    Le baron, affolé, songea à la marquise et au jeune garçon dans les souterrains. Certes, ils survivraient à l’incendie mais qui déblaierait les ruines accumulées au-dessus d’eux?
    Il affecta la seule attitude qui pouvait ébranler la résolution de Blacfort, l’indifférence:
    – Autant que ce soit vous!… Au reste, les républicains l’auraient incendié tôt ou tard. Et puis je suis las d’ouvrir ma maison à tous les individus armés qui pénètrent ici par la force. J’ai un frère à La Rochelle, il m’accueillera.
    L'abbé, qui espérait bien revenir en ces lieux, intervint en se frottant onctueusement les mains:
    – Général, le baron a fait un effort, la chose est incontestable. Et il ne se trouve certes pas dans la fausseté lorsqu’il affirme qu’il ne pouvait guère s’opposer à six assassins républicains fortement armés.
    Blacfort, quoiqu’un peu surpris, réfléchit de nouveau à la question. Brusquement, une idée lui vint, de celles qui confortaient son obsession:
    – Trouvez-moi des détails, des choses que vous ne m’avez point dites encore sur ce capitaine de vaisseau et vous sauverez votre château.
    – Mais… quel genre de détails?
    – Comment pourrais-je le savoir?… s’emporta Blacfort.
    L'abbé suggéra:
    – Des petites choses qui vous parurent insignifiantes… Réfléchissez, baron, il serait fort regrettable que ce château fût brûlé!
    Le baron se leva et, mains derrière le dos, alla de long en large pendant deux minutes, sans s’apercevoir qu’il mettait à rude épreuve les nerfs fragiles de Blacfort. Puis il s’immobilisa:
    – Trois choses!
    – Elles sont les bienvenues!… répondit le général vendéen avec gourmandise.
    – La première est que ce républicain farouche porte la croix d’or de Saint-Louis, ce qui est étonnant.
    Blacfort ébaucha une légère grimace:
    – Poursuivez!
    Mais le baron se tut en raison de l’arrivée d’un jeune officier vendéen:
    – Nous sommes prêts à partir, général!
    – C'est parfait, attendez dehors. Ah, il faudra peut-être incendier ce château.
    L'officier jeta un regard gêné au baron, salua et quitta la pièce. Penchemel reprit aussitôt:
    – Il porte une bague à armoiries, ce qui me confirme dans la croyance qu’il appartient à la noblesse, et sans doute très haute car j’ai de mes yeux vu une tour, la licorne et le dragon: les croisades, ou plus ancien encore!
    Blacfort pâlit: toute allusion aux croisades et à la très ancienne noblesse de Valencey d’Adana le crucifiait en même temps que son âme perverse y prenait un douloureux plaisir, comme certains hommes trompés se grisent jusqu’à l’ivresse des détails de leur infortune.
    Cependant, devant le baron de Penchemel, il affecta désinvolture et mépris:
    – Les croisades, la belle affaire que voilà!… Pour finir au service d’une République d’avocats ambitieux et de boutiquiers envieux, il n’était point nécessaire de prendre Jérusalem!
    Penchemel garda prudemment le silence, laissant au général le temps de se calmer, ce qui ne tarda pas:
    – Vous parliez de trois

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