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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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yeux et les oreilles.
    Et il ne vit rien, sinon les noires nuées courant comme folles
dans le ciel et une large, grosse et courte forme noire, venant à
lui ; et il n’ouït rien, sinon le vent huïant plaintif, la mer
grondant comme un tonnerre et le chemin coquilleux criant sous un
pas pesant et tressautant.
    Feignant de se vouloir asseoir, il chut sur le chemin comme un
ivrogne pesamment. Et il cracha.
    Puis il ouït comme ferraille cliquetant à deux pas de son
oreille, puis le bruit de l’engin se fermant et un cri d’homme.
    – Le
weer-wolf
, dit-il, a les pattes de devant prises
dans le piège. Il se relève hurlant, secouant l’engin, voulant
courir. Mais il n’échappera point.
    Il lui tira un trait d’arbalète aux jambes.
    – Voici qu’il tombe blessé, dit-il.
    Et il siffla comme une mouette.
    Soudain la cloche de l’église sonna
wacharm
, une voix
de garçonnet aiguë criait dans le village :
    – Réveillez-vous, gens qui dormez, le
weer-wolf
est
pris.
    – Noël à Dieu ! dit Ulenspiegel.
    Toria, mère de Betkin, Lansaem, son homme, Josse et Michiel, ses
frères, vinrent les premiers avec des lanternes.
    – Il est pris ? dirent-ils.
    – Voyez-le sur le chemin, répondit Ulenspiegel.
    – Noël à Dieu ! dirent-ils.
    Et ils se signèrent.
    – Qui sonne-là ? demanda Ulenspiegel.
    Lansaem répondit :
    – C’est mon aîné, le cadet court dans le village frappant aux
portes et criant que le loup est pris. Noël à toi !
    – Les cendres battent sur mon cœur, répondit Ulenspiegel.
    Soudain le
weer-wolf
parla et dit :
    – Aie pitié de moi, pitié, Ulenspiegel.
    – Le loup parle, dirent-ils, se signant tous. Il est diable et
sait déjà le nom d’Ulenspiegel.
    – Aie pitié, dit la voix, mande à la cloche de se taire ;
elle sonne pour les morts, pitié, je ne suis point loup. Mes
poignets sont troués par l’engin ; je suis vieux et je saigne,
pitié. Quelle est cette voie aiguë d’enfant éveillant le
village ? Pitié !
    – Je t’ouïs parler jadis, dit véhémentement Ulenspiegel. Tu es
le poissonnier, meurtrier de Claes, vampire des pauvres fillettes.
Compères et commères, n’ayez nulle crainte. C’est le doyen, celui
par qui Soetkin mourut de douleur.
    Et d’une main le tenant au cou sous le menton, de l’autre il
tira son coutelas.
    Mais Toria, mère de Betkin, l’arrêta en ce mouvement :
    – Prenez-le vif, cria-t-elle.
    Et elle lui arracha ses cheveux blancs par poignées, lui
déchirant la face de ses ongles.
    Et elle hurlait de triste fureur.
    Le
weer-wolf
, les mains prises dans l’engin et
tressautant sur le chemin, à cause de la vive souffrance :
    – Pitié, disait-il, pitié ! ôtez cette femme. Je donnerai
deux carolus. Cassez ces cloches ! Où sont ces enfants qui
crient ?
    – Gardez-le vif ! criait Toria, gardez-le vif, qu’il
paye ! Les cloches des morts, les cloches des morts pour toi,
meurtrier. À petit feu, à tenailles ardentes. Gardez-le vif !
qu’il paye !
    Dans l’entretemps, Toria avait ramassé sur le chemin un gaufrier
à longs bras. Le considérant à la lueur des torches, elle le vit,
entre les deux plaques de fer profondément gravé de losanges à la
mode brabançonne, mais armé en outre, comme une gueule de fer, de
longues dents aiguës. Et quand elle l’ouvrit, ce fut comme une
gueule de lévrier.
    Toria alors, tenant le gaufrier, l’ouvrant et refermant et en
faisant résonner le fer, parut comme affolée de male rage et,
grinçant les dents, râlant comme agonisante, gémissante à cause de
la douleur d’amère soif de revanche, mordit de l’engin le
prisonnier aux bras, aux jambes, partout, cherchant surtout le col,
et à toutes fois qu’elle le mordait disant :
    – Ainsi fit-il à Betkin avec les dents de fer. Saignes-tu,
meurtrier ? Dieu est juste. Les cloches des morts !
Betkin m’appelle à la revanche. Sens-tu les dents, c’est la gueule
de Dieu !
    Et elle le mordait sans cesse ni pitié, frappant du gaufrier
quand elle n’en pouvait mordre. Et à cause de sa grande impatience
de revanche, elle ne le tuait point.
    – Faites miséricorde, criait le prisonnier. Ulenspiegel,
frappe-moi du couteau, je mourrai plus tôt. Ôte cette femme. Casse
les cloches des morts, tue les enfants qui crient.
    Et Toria le mordait toujours, jusqu’à ce qu’un homme vieux,
ayant pitié, lui prit des mains le gaufrier.
    Mais Toria alors cracha au visage du
weer-wolf
et lui
arrachant les cheveux

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