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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles De Coster
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fenêtre, courut dans la chambre,
sauta sur les chaises et les tables, les mains tendues vers le
plafond. Soetkin et Claes virent qu’il ne se démenait si fort que
pour atteindre un oiselet tout mignon et petit qui, les ailes
frémissantes, criait de peur, blotti contre une poutre dans un
recoin du plafond.
    Ulenspiegel allait se saisir de lui, lorsque Claes, parlant
vivement, lui dit :
    – Pourquoi sautes-tu ainsi ?
    – Pour le prendre, répondit Ulenspiegel, le mettre en cage, lui
donner des graines et le faire chanter pour moi.
    Cependant l’oiseau, criant d’angoisse, voletait dans la chambre
en heurtant de la tête les vitraux de la fenêtre.
    Ulenspiegel ne cessait de sauter, Claes lui mit pesamment la
main sur l’épaule :
    – Prends-le, dit-il, mets-le en cage, fais-le chanter pour toi,
mais, moi aussi, je te mettrai dans une cage fermée de bons
barreaux de fer et je te ferai aussi chanter. Tu aimes à courir, tu
ne le pourras plus ; tu seras à l’ombre quand tu auras froid
au soleil quand tu auras chaud. Puis un dimanche, nous sortirons
ayant oublié de te donner de la nourriture et nous ne reviendrons
que le jeudi, et au retour, nous retrouverons Thyl mort de faim et
tout raide.
    Soetkin pleurait, Ulenspiegel s’élança :
    – Que fais-tu ? demanda Claes.
    – J’ouvre la fenêtre à l’oiseau, répondit-il. En effet,
l’oiseau, qui était un chardonneret, sortit par la fenêtre, jeta un
cri joyeux, monta comme une flèche dans l’air, puis s’allant placer
sur un pommier voisin, se lissa les ailes, du bec, se secoua le
plumage, et se fâchant, dit en sa langue d’oiseau, à Ulenspiegel,
mille injures.
    Claes lui dit alors :
    – Fils, n’ôte jamais à homme ni bête sa liberté, qui est le plus
grand bien de ce monde. Laisse chacun aller au soleil quand il a
froid, à l’ombre quand il a chaud. Et que Dieu juge Sa Sainte
Majesté qui, ayant enchaîné la libre croyance au pays de Flandre,
vient de mettre Gand la noble dans une cage de servitude.

XXX
     
    Philippe avait épousé Marie de Portugal, dont il ajouta les
possessions à la couronne d’Espagne ; il eut d’elle don
Carlos, le fou cruel. Mais il n’aimait point sa femme !
    La reine souffrait des suites de ses couches. Elle gardait le
lit et avait près d’elle ses dames d’honneur, parmi lesquelles la
duchesse d’Albe.
    Philippe la laissait souvent seule pour aller voir brûler des
hérétiques. Tous ceux et celles de la cour faisaient comme lui. De
même aussi faisait la duchesse d’Albe, la noble garde-couches de la
reine.
    En ce temps-là, l’official prit un sculpteur flamand, catholique
romain, pour ce qu’un moine lui ayant refusé le prix, convenu entre
eux, d’une statue en bois de Notre-Dame, il avait frappé de son
ciseau la statue au visage, en disant qu’il aimait mieux détruire
son œuvre, que de la donner à vil prix.
    Il fut, par le moine, dénoncé comme iconoclaste, torturé sans
pitié et condamné à être brûlé vif.
    On lui avait, durant la torture, brûlé la plante des pieds, et
il criait, en cheminant de la prison au bûcher et couvert du
Sanbenito
 :
    – Coupez les pieds ! coupez les pieds !
    Et Philippe entendait de loin ces cris, et il était aise, mais
il ne riait point.
    Les dames d’honneur de la reine Marie la quittèrent pour
assister au brûlement et après elles la duchesse d’Albe qui,
entendant crier le sculpteur flamand, voulut voir le spectacle et
laissa la reine seule.
    Philippe, ses hauts serviteurs, princes, comtes, écuyers et
dames étant présents, le sculpteur fut attaché par une longue
chaîne à une estache plantée au centre d’un cercle enflammé formé
de bottes de paille et de fascines, qui devait le rôtir lentement,
s’il voulait se tenant au poteau, fuir le feu vif.
    Et on le regardait curieusement essayant, nu qu’il était ou peu
s’en fallait, de raidir sa force d’âme contre la chaleur du
feu.
    En même temps, la reine Marie eut soif sur son lit d’accouchée.
Elle vit la moitié d’un melon sur un plat. Se traînant hors de son
lit, elle prit de ce melon et n’en laissa rien.
    Puis, à cause du froid de la chair du melon, elle sua et
frissonna, resta sur le plancher, sans pouvoir bouger.
    – Ah ! dit-elle, je me réchaufferais si quelqu’un pouvait
me porter dans mon lit.
    Elle entendit alors le pauvre sculpteur qui criait :
    – Coupez les pieds !
    – Ah ! dit la reine Marie, est-ce un chien qui hurle à ma
mort ?
    En ce

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