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La Légion Des Damnés

La Légion Des Damnés

Titel: La Légion Des Damnés Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sven Hassel
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manger, bien vivre, avoir votre voiture, voyager dans le monde entier, profiter de l'existence sans anxiété ni contrainte. Il y a assez de tout, et plus qu'assez pour tout le monde.
    Mais personne n'y croit. Ou plus exactement, personne n'ose y croire. Quelle est cette malédiction qui nous rend tous inertes, apathiques, au point que nous ne trouvons jamais le courage d'arracher aux généraux leurs privilèges ? Nous sommes des ânes, pour la plupart, des ânes paresseux et ignares qui béatement opinent du bonnet quand ils entendent quelque solennelle balançoire sur « l'équilibre des forces », « l'interpénétration des pouvoirs » et autres sensationnelles conne-ries. Equilibre des forces. Sans blague ! Si chaque Pierre, Paul et Philippe, si la masse unanime exigeait que l'argent consacré à l'armement et à la guerre fût employé à son profit, il n'y aurait plus de guerre. Mais Pierre, Paul et Philippe ne pensent qu'à frapper du poing sur la table et à faire savoir au monde qui détient le pouvoir et comment ce pouvoir doit être utilisé. Ceci, parce que Pierre, Paul et Philippe ne sont pas assez évolués, assez éduqués, et s'appuient uniquement sur leurs émotions, qui sont des choses instables auxquelles on ne peut pas se fier. 
    Ça finira bien par changer un jour et nous ne sommes pas si mal partagés après tout et ceux qui sont au gouvernement ne pensent jamais qu'à remplir leurs poches dès qu'ils ont les doigts dans l'assiette au beurre. Si vous dites à Pierre, Jacques ou Philippe qu'ils pourraient avoir une voiture à bon compte et sans payer d'impôts ; si vous leur dites que l'essence pourrait fort bien ne coûter que quelques francs le litre, ils rigolent, parce qu'ils ne savent rien de rien. Et si vous essayez de le leur démontrer, noir sur blanc, ils se mettent en colère, parce que c'est une façon comme une autre de leur prouver qu'ils sont les rois des cloches de dilapider ainsi, sans nécessité aucune, l'argent gagné à la sueur de leur front.
    Quelques heures suffirent pour envoyer à la ferraille un train blindé dont les canons seuls, avec leur alésage de précision, représentaient une fortune. Nous étions prisonniers d'un enfer hurlant d'artillerie lourde et, bien que nous détruisions tank sur tank, ils se refermaient graduellement sur nous comme d'hallucinants insectes à la carapace luisante.
    Puis le contrôle central se tut. Fiévreusement, Pluton tenta de rétablir le contact avec les autres wagons, mais nous étions bel et bien isolés. Désormais, le Vieux portait seul la responsabilité de notre part du combat Nous n'étions plus qu'à huit cents mètres du pont et de « Breslau », mais « Breslau » flambait, de la locomotive au wagon de queue, et toutes ses pièces étaient silencieuses.
    Une énorme explosion secoua notre wagon et quelques-uns des membres de l'équipage se mirent à pousser des cris mal faits pour nous calmer les nerfs, tandis que des flammes et de la fumée jaillissaient de la tourelle n° 1 à l' intérieur du wagon. Coup direct. Nous maîtrisâmes l'incendie à l'aide de nos extincteurs et fîmes l'inventaire des dégâts : quatre tués, sept blessés. Hugo Stege s'en tirait, heureusement, avec quelques brûlures superficielles aux deux mains.
    Mon canon était le seul qui pût encore tirer. Nous ruisselions de sueur dans la tourelle surchauffée qu'une flamme envahissait à chaque nouveau projectile lâché. L'un après l'autre, tous les wagons se taisaient et le convoi s'immobilisa totalement, livré aux coups ajustés de l'ennemi.
    Puis il y eut une autre explosion formidable. Une flamme blanche emplit la tourelle. Je reçus un coup violent dans la poitrine et perdis à moitié connaissance. J'entendis mon propre grognement. J'avais l'impression que mon corps venait d'être broyé. Même en respirant très lentement, il me semblait qu'on m'enfonçait des couteaux acérés dans la poitrine. Je ne pouvais pas bouger. J'étais coincé dans un étau composé du canon — jeté à bas de son assise — et de la paroi d'acier de ma tourelle.
    J'étais couvert de sang des pieds à la tête. Mon sang ou celui de quelqu'un d'autre, je n'en savais rien. Près de moi, gisait l'un des servants du canon, le haut du crâne proprement scalpé comme un œuf à la coque. Son cerveau éparpillé m'avait largement aspergé le visage et les épaules, et une puanteur insupportable m'emplissait les narines : sang et tripes crevées, dominant l'odeur

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