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LA LETTRE ÉCARLATE

LA LETTRE ÉCARLATE

Titel: LA LETTRE ÉCARLATE Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nathaniel Hawthorne
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s’imagina entrevoir, non son image en petit, mais un autre visage dans le sombre miroir. Un visage au sourire démoniaque et méchant qui offrait toutefois une ressemblance avec un autre qu’elle avait bien connu, encore que rarement avec un sourire, et jamais avec un air méchant. C’était comme si un esprit mauvais eût possédé la petite fille et se fût montré, soudain, par moquerie. Hester devait bien souvent par la suite être torturée par la même illusion encore qu’avec moins d’intensité.
    L’après-midi d’un certain jour d’été, alors que Pearl était devenue assez grande pour courir çà et là, elle se fit un jeu, ayant ramassé des fleurs sauvages, de les lancer une à une à la poitrine de sa mère, dansant et bondissant comme un vrai lutin toutes les fois qu’elle touchait la lettre écarlate. Le premier mouvement d’Hester avait été de couvrir sa poitrine de ses mains mais, par fierté ou résignation, ou parce qu’il lui sembla ne pouvoir mieux faire pénitence qu’en endurant une aussi inexprimable douleur, elle resta assise, immobile et droite, aussi pâle que la mort, en regardant tristement la petite Pearl dans les yeux.
    Les décharges continuaient à toute volée, atteignant presque toujours leur but et couvrant la poitrine de la mère de coups pour lesquels elle ne voyait de baume ni dans ce monde ni dans l’autre. Enfin, ses munitions étant toutes épuisées, l’enfant se tint debout, sans plus bouger, à regarder Hester, tandis que la petite image au sourire démoniaque montait – Hester du moins l’imaginait – du fond de l’insondable abîme de ses yeux noirs.
    – Enfant, qui donc es-tu ? cria la mère.
    – Je suis ta petite Pearl, répondit l’enfant.
    Mais, ce disant, elle se mit à danser avec les fantasques gesticulations d’un diablotin dont le prochain caprice pourrait être de s’envoler par la cheminée.
    – Es-tu tout de bon mon enfant ? demanda Hester.
    Et elle ne posait pas la question tout à fait en l’air : durant un instant elle y mit quelque sérieux. Pearl était, en effet, d’une intelligence si merveilleuse que sa mère se demandait presque si elle n’aurait pas connu le secret de sa naissance et n’allait pas le dévoiler.
    – Oui, je suis ta petite Pearl ! répéta l’enfant en continuant ses entrechats.
    – Tu n’es pas mon enfant, non ! Tu n’es pas ma petite Pearl, dit Hester plutôt par plaisanterie, car il arrivait souvent qu’au milieu de ses plus profondes souffrances, un élan l’emportât vers le jeu. Dis-moi qui tu es et qui t’a envoyée ici ?
    – Dis-le-moi, toi, Mère, dit l’enfant sérieusement en allant à Hester et se pressant contre ses genoux. Dis-le-moi !
    – Notre Père qui est aux cieux t’a envoyée, répondit Hester.
    Mais elle avait parlé après une hésitation qui n’échappa point à la finesse de l’enfant. Mue soit par un de ses caprices habituels, soit par l’inspiration d’un esprit méchant, Pearl leva son petit index et le posa sur la lettre écarlate.
    – Non, ce n’est pas lui qui m’a envoyée, déclara-t-elle résolument. Je n’ai pas de père dans le ciel.
    – Chut ! Pearl ! Chut ! il ne faut point parler ainsi ! répondit la mère en étouffant une plainte. C’est Lui qui nous envoie tous en ce monde. Il m’y a bien envoyée, moi ta mère, alors toi à plus forte raison ! Sinon, d’où viendrais-tu, étrange petit enfant-lutin ?
    – Dis-le-moi ! Dis-le-moi ! reprit Pearl, non plus sérieusement, mais en se remettant à rire et à sauter par toute la pièce. C’est toi qui dois me le dire !
    Mais Hester ne pouvait trancher la question, perdue qu’elle était elle-même dans les sombres labyrinthes du doute. Entre un sourire et un frisson, elle évoquait les propos des gens de la ville qui, n’arrivant pas à trouver qui était le père de cette petite fille, au surplus singulière, la disaient née du démon. On avait vu semblables marmots, par-ci, par-là, sur cette terre, depuis les temps les plus reculés du catholicisme. Ils venaient au monde par l’entremise du péché de leur mère et pour perpétrer quelque funeste besogne. Luther, d’après les calomnies de ses ennemis les moines, eût été un rejeton de cette infernale espèce et Pearl n’était pas seule à se voir attribuer une aussi maudite origine parmi les enfants des Puritains de la Nouvelle-Angleterre.

CHAPITRE VII – CHEZ LE GOUVERNEUR
    Hester Prynne se rendit un

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