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La Liste De Schindler

La Liste De Schindler

Titel: La Liste De Schindler Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Thomas Keneally
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un grand silence s’établit. Kastner et Springmann n’étaient pas des enfants de chœur. Ils avaient passé toute leur vie sous l’œil vigilant de la police secrète. La police hongroise qui soupçonnait vaguement leurs activités avait baissé sa garde en raison des pots-de-vin que Samu lui versait. Mais les juifs « respectables » les tenaient à l’écart. Samuel Stern par exemple, membre du Sénat hongrois, président du Conseil juif, allait considérer le rapport d’Oskar comme un fatras de rumeurs pernicieuses, une insulte à la culture germanique, une mise en accusation du gouvernement hongrois. Springmann et Kastner connaissaient cette musique.
    Ils se trouvaient placés devant un dilemme : faire savoir, mais comment faire savoir à des gens qui refusaient d’entendre ? Le soutien ou les ressources dont ils disposaient leur paraissaient tellement ridicules maintenant qu’ils avaient pris la mesure de l’ennemi ! Car l’ennemi, ce n’était plus Goliath, ce n’était plus un être dont on pouvait plus ou moins prévoir les réactions. Non, l’ennemi, c’était Belzébuth lui-même. Peut-être étaient-ils en train de calculer que les secours ponctuels qu’ils pouvaient programmer – des rations alimentaires pour tel ou tel camp, une fuite organisée pour tel ou tel intellectuel, quelques enveloppes distribuées parmi les SS bien placés – n’y suffiraient pas. Il fallait désormais planifier les secours sur une échelle que seuls les plus motivés parviendraient à gravir.
    Schindler s’affala dans un fauteuil, complètement épuisé. Springmann lui dit toute sa reconnaissance. Ils enverraient, bien sûr, un rapport à Istanbul sur tout ce qu’ils venaient d’apprendre. Les sionistes de Palestine et l’intercomité d’entraide ne manqueraient pas de réagir. Le rapport serait également envoyé aux gouvernements de Churchill et de Roosevelt. Springmann ajouta qu’Oskar avait sans doute raison de craindre qu’on ne le crût pas tant tout cela était incroyable.
    —  C’est pourquoi, ajouta Springmann, je vous conjure d’aller à Istanbul, de raconter là-bas ce que vous avez vu.
    Après une brève hésitation – allait-il une fois encore abandonner le confort des bureaux d’Emalia pour la fatigue et les dangers d’un voyage qui l’obligerait à traverser plusieurs frontières ? – Schindler donna son accord. Il fut convenu qu’il se rendrait là-bas vers la fin de l’année.
    —  Entre-temps, lui dit Springmann, vous verrez le Dr Sedlacek régulièrement à Cracovie.
    Ils se levèrent et Oskar put lire sur leur visage qu’ils n’étaient plus les mêmes hommes. Ils le remercièrent et quittèrent la chambre. En descendant les étages, ils avaient seulement l’air de deux hommes d’affaires de Budapest à qui l’on vient d’apprendre qu’une de leurs succursales a des problèmes.
    Le Dr Sedlacek vint chercher Oskar ce même soir pour l’emmener dîner à l’hôtel Gellert. De leur table, ils pouvaient contempler le Danube avec les bateaux-mouches illuminés comme des arbres de Noël ; ils pouvaient admirer la ville, étincelante de lumière, jusqu’aux plus lointains faubourgs. On ne sentait pas encore la guerre ici, et Oskar retrouva soudain une âme de touriste. Après ce long après-midi d’abstinence, il se mit à boire lentement mais assidûment ce vin rouge de Hongrie, épais et capiteux, que les Hongrois appellent le « sang du taureau », jusqu’à ce qu’une solide rangée de bouteilles vides s’aligne sur leur table.
    Pendant qu’ils dînaient, un journaliste autrichien, le Dr Schmidt, accompagné de son exquise maîtresse hongroise, blonde comme les blés, vint les rejoindre. Schindler fit des compliments sur les bijoux de la jeune fille, précisant qu’il était lui-même grand amateur de pierres. Mais quand ils en furent à l’alcool d’abricot, son ton devint moins amical. Il fronçait légèrement les sourcils en écoutant Schmidt évoquer le marché de l’immobilier, de l’automobile d’occasion ou les courses de chevaux. La fille écoutait Schmidt avec d’autant plus d’admiration qu’elle portait au cou et aux poignets les retombées des petits trafics de son amant. Mais il était clair qu’Oskar désapprouvait. Sedlacek ne pouvait s’empêcher de trouver la situation cocasse : peut-être Oskar voyait-il en cet homme une sorte de pâle reflet de lui-même, un type à l’affût d’affaires juteuses, en marge de

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