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La Louve de France

La Louve de France

Titel: La Louve de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Druon
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vouloir qu’on les prît et qui, amenés devant le roi
d’Angleterre, lui dirent :
    — Sire, que cherchez-vous
ici ? Nos Escots sont retournés dans les montagnes, et Sire Robert, notre
roi, nous a dit de vous en avertir, et aussi qu’il ne vous combattrait plus
pour cette année, à moins que vous ne le veniez poursuivre.
    Les Anglais s’avancèrent, prudents,
craignant un piège, et soudain furent devant quatre cents marmites et chaudrons
de campement, pendus en ligne, et que les Écossais avaient laissés pour ne
point s’alourdir ni produire de bruit dans leur retraite. Également on
découvrit, formant un énorme tas, cinq mille vieux souliers de cuir avec le
poil dessus ; les Écossais avaient changé de chaussures avant de partir.
Il ne restait comme créatures vivantes dans ce camp que cinq prisonniers
anglais, tout nus, liés à des pieux, et dont les jambes avaient été brisées à
coups de bâtons.
    Poursuivre les Écossais dans leurs
montagnes, à travers ce pays difficile, hostile, où l’armée, fort fatiguée déjà
aurait à mener une guerre d’embuscade pour laquelle elle n’était pas entraînée,
apparaissait comme une pure folie. La campagne fut déclarée terminée ; on
revint à York et l’ost fut dissous.
    Messire Jean de Hainaut fit le
compte de ses chevaux morts ou hors d’usage, et présenta un mémoire de quatorze
mille livres. Le jeune roi Édouard n’avait pas autant d’argent disponible dans
son Trésor, et devait aussi payer les soldes de ses propres troupes. Alors
messire Jean de Hainaut, ayant grand geste comme de coutume, se porta garant
auprès de ses chevaliers de toutes les sommes qui leur étaient dues par son futur
neveu.
    Au cours de l’été, Roger Mortimer,
qui n’avait aucun intérêt dans le nord du royaume, bâcla un traité de paix.
Édouard III renonçait à toute suzeraineté sur l’Écosse et reconnaissait
Robert Bruce comme roi de ce pays, ce qu’Édouard II tout le long de son
règne n’avait jamais accepté ; en outre, David Bruce, fils de Robert,
épousait Jeanne d’Angleterre, seconde fille de la reine Isabelle.
    Était-ce bien la peine, pour un tel
résultat, d’avoir déchu de ses pouvoirs l’ancien roi qui vivait reclus à Berkeley ?
     

VII

LA COURONNE DE FOIN
    Une aurore presque rouge incendiait
l’horizon derrière les collines du Costwold.
    — Le soleil va bientôt poindre,
sir John, dit Thomas Gournay, l’un des deux cavaliers qui marchaient en tête de
l’escorte.
    — Oui, le soleil va poindre,
sir Thomas, et nous ne sommes point encore arrivés à notre étape, répondit John
Maltravers qui cheminait à côté de lui, au botte à botte.
    — Quand le jour sera venu, les
gens pourraient bien reconnaître qui nous conduisons, reprit le premier.
    — Cela se pourrait, en effet,
mon compagnon, et c’est juste ce qu’il nous faut éviter.
    Ces paroles étaient échangées d’une
voix haute, forcée, afin que le prisonnier qui suivait les entendît bien.
    La veille, sir Thomas Gournay était
arrivé à Berkeley, ayant traversé la moitié de l’Angleterre pour porter depuis
York, à John Maltravers, les nouveaux ordres de Roger Mortimer concernant la
garde du roi déchu.
    Gournay était un homme de physique
peu avenant ; il avait le nez court et camard, les crocs inférieurs plus
longs que les autres dents, la peau rose, tachetée, piquetée de poils roux
comme le cuir d’une truie ; ses cheveux trop abondants se tordaient,
pareils à des copeaux de cuivre, sous le bord de son chapeau de fer.
    Pour seconder Thomas Gournay, et
aussi pour le surveiller un peu, Mortimer lui avait adjoint Ogle, l’ancien
barbier de la tour de Londres.
    Au soir tombant, à l’heure où les
paysans avaient déjà avalé leur soupe, la petite troupe quittant Berkeley
s’était dirigée vers le sud à travers une campagne silencieuse et des villages
endormis. Maltravers et Gournay chevauchaient en tête. Le roi allait encadré
par une dizaine de soldats que commandait un officier subalterne du nom de
Towurlee. Colosse à petit front et d’une intelligence parcimonieusement mesurée,
Towurlee était un homme obéissant, bien utile pour les tâches qui réclamaient à
la fois de la force et qu’on les exécutât en se posant un minimum de questions.
Ogle fermait la marche, en compagnie du moine Guillaume, lequel n’avait pas été
choisi parmi les meilleurs de son couvent. Mais on pouvait avoir besoin de lui
pour une

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