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La Louve de France

La Louve de France

Titel: La Louve de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Druon
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offert aussi à lui procurer quelques follieuses, par paire ou
par tercet, pour le distraire de ses soucis. Mais Mortimer n’avait cédé à
aucune tentation, au point qu’on se demandait d’où lui venait cette rare vertu,
et s’il ne partageait pas les mœurs de son roi.
    On ne pouvait imaginer la vérité, à
savoir que cet homme, le même qui avait parié son salut sur la mort d’un
corbeau, avait misé son retour en fortune sur sa chasteté. Il s’était fait la
promesse de ne pas toucher femme avant d’avoir retrouvé et la terre
d’Angleterre, et ses titres, et sa puissance. Un vœu de chevalier, tel
qu’auraient pu le prononcer un Lancelot, un Amadis, un compagnon du roi Arthur.
Mais Roger Mortimer devait s’avouer, après tant de mois, qu’il avait choisi son
vœu un peu légèrement, et ceci contribuait à lui assombrir l’humeur…
    Enfin de satisfaisantes nouvelles
arrivèrent d’Aquitaine. Le sénéchal du roi d’Angleterre, messire Basset, homme
d’autant plus sourcilleux que son nom prêtait à rire, commença de s’inquiéter
de la forteresse qui s’élevait à Saint-Sardos. Il y vit une usurpation des
droits de son maître, et une insulte à sa propre personne. Ayant réuni quelques
troupes, il entra dans Saint-Sardos à l’improviste, mit la bourgade au pillage,
appréhenda les officiers chargés de surveiller les travaux et les pendit aux
poteaux fleurdelisés qui signalaient la suzeraineté du roi de France. Messire
Ralph Basset n’était point seul dans cette expédition ; plusieurs
seigneurs de la région lui avaient prêté la main.
    Robert d’Artois, le jour qu’il en
fut informé, alla quérir aussitôt Mortimer et l’entraîna chez Charles de
Valois. Il débordait de joie et de fierté, Monseigneur d’Artois ; il riait
plus fort que de coutume et donnait à ses familiers d’amicales tapes qui les
envoyaient rebondir contre les murs. Enfin l’on tenait l’occasion, née de son
inventive cervelle !
    L’affaire fut aussitôt évoquée au
Conseil étroit ; on fit les représentations d’usage, et les coupables du
sac de Saint-Sardos se virent assignés devant le parlement de Toulouse.
Allaient-ils se présenter, reconnaître leurs torts, faire soumission ? On
le craignait.
    Par chance, l’un d’entre eux, un
seul, Raymond Bernard de Montpezat, refusa de se rendre à la convocation. Il
n’en fallait pas davantage. On rendit un jugement par défaut, et Jean de Roye,
qui avait succédé à Pierre-Hector de Galard comme grand maître des
arbalétriers, fut envoyé en Guyenne avec petite escorte afin de se saisir du
sire de Montpezat, de ses biens, et de présider au démantèlement de son
château. Or ce fut le sire de Montpezat qui l’emporta. Il retint prisonnier
Jean de Roye et exigea rançon pour le rendre. Le roi Édouard n’était pour rien
dans cet incident mais son cas s’aggravait par la force des choses ; et
Robert d’Artois exultait. Car un grand maître des arbalétriers n’est pas un
homme qu’on séquestre sans qu’il s’ensuive des conséquences graves !
    De nouvelles représentations furent
adressées au roi d’Angleterre, directement cette fois, et assorties d’une
menace de confiscation du duché. Au début d’avril, Paris vit arriver le comte
de Kent, demi-frère du roi Édouard, secondé de l’archevêque de Dublin ;
ils venaient proposer à Charles IV, pour régler leur différend, de
renoncer tout simplement à l’hommage d’Édouard. Mortimer, qui rencontra Kent à
cette occasion – leurs rapports restèrent courtois bien que leur situation
fût difficile – lui démontra l’inutilité totale de cette démarche. Le
jeune comte de Kent en était d’ailleurs lui-même persuadé ; il
s’acquittait de sa mission sans plaisir. Il repartit en emportant le refus du
roi de France, transmis de méprisante manière par Charles de Valois. La guerre
inventée par Robert d’Artois semblait sur le point d’éclater.
    Mais voici que dans le même temps la
nouvelle reine, Marie de Luxembourg, mourut brusquement, à Issoudun, en
accouchant avant terme d’un enfant qui n’était pas viable.
    On ne pouvait décemment déclarer la
guerre pendant le deuil, d’autant que le roi Charles était vraiment très abattu
et presque incapable de tenir conseil. Le sort le poursuivait, décidément, dans
son destin d’époux. Trompé d’abord, ensuite veuf… Il fallut que Valois, tout
souci cessant, s’employât à découvrir une

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