La lumière des parfaits
dans les écuries du roi Salomon, sous les colonnes du Temple. Et de garder contre les Maures, les Sarrazins et toutes les peuplades qui, au gré des circonstances, s’alliaient pour bouter les Francs hors des Lieux saints.
• Les hérétiques albigeois présentaient, du fait des principes de leur religion, une redoutable menace pour le pouvoir spirituel de la papauté et pour le pouvoir temporel de la royauté. Elle pouvait, à terme, saper les bases de notre société féodale en l’émancipant de ses contraintes religieuses, politiques, sociales et militaires. Avaient alors convergé les intérêts du Saint-Siège et de la couronne de France, pour en tailler les ramifications, en couper le tronc et en arracher les racines.
En outre, si les papes avaient eu connaissance du secret de l’Ordre du Temple, peu leur challait d’exterminer les hérétiques albigeois sans prendre la peine de les soumettre à la question.
• En ordonnant, sous pli cacheté remis à tous les prévôts et les baillis, une semaine plus tôt, l’arrestation des Templiers de son royaume, un certain vendredi 13 octobre 1307, l’avant-veille des ides, le roi Philippe le Bel, dont la décision avait été mûrie un an plus tôt en conseil étroit avec Enguerrand Le Portier de Marigny, recteur du royaume, et Guillaume de Nogaret, garde des sceaux, entendait mettre fin à la puissance sans cesse grandissante du Temple.
Ne disait-on pas qu’un frère templier pouvait chevaucher sur des milliers de lieues sans que le sabot de sa monture ne touchât d’autres sols que ceux de leur cinq mil commanderies ? L’Ordre faisait ombrage à l’autorité du roi sur son royaume, représentait un contre-pouvoir dont il redoutait les conséquences.
Sans oublier que le trésor royal, qu’il leur avait confié en la tour du Temple à Paris, et ce qu’il en restait, était fortement gagé par les avances consenties par le Trésorier de l’Ordre. Dans l’incapacité de rembourser ses dettes, le roi Philippe le Bel avait-il voulu faire main basse sur le trésor du Temple ?
Cette hypothèse était peu plausible pour deux raisons : il avait récupéré ce qu’il restait du trésor royal, la veille, et il avait accepté que les commanderies templières et les gras revenus qui en résultaient soient dévolues à l’Ordre de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem.
• Il apparaissait clairement que le roi Philippe le Bel redoutait la puissance militaire de l’Ordre du Temple (il s’était un jour réfugié dans leur forteresse, lors d’une émeute de la population de Paris) et sa puissance financière (le trésor royal leur devait des sommes considérables). Des facteurs d’humiliation d’autant plus graves que les frères, réunis en chapitres, lui avaient refusé son admission parmi eux.
Pourquoi le pape Clément avait-il toléré, alors, que les Inquisiteurs instruisent à charge le procès en hérésie de ses Pauvres soldats du Christ ?
La raison me paraissait évidente : le pape Clément, alors qu’il n’était qu’archevêque de Bordeaux, devait au roi Philippe le Bel de l’avoir hissé sur le trône de Saint-Pierre…
Partagé entre son devoir de protection envers les Templiers et la reconnaissance qu’il devait au roi de France, il avait tergiversé pendant huit longues années. Lassé des pressions continuelles qui s’exerçaient sur sa tiare, il avait fini par les abandonner à la justice séculière.
Les minutes des interrogatoires conduits en l’an 1308 par trois cardinaux actant en tant que légats pontificaux en la ville de Chinon, diocèse de Tours, confirmaient les aveux recueillis sous la torture, l’année précédente, par les tourmenteurs du roi Philippe.
Mais les accusés, ayant fait acte de repentance, avaient été absous et réconciliés avec l’Église, au nom du pape Clément.
En prenant l’initiative de faire arrêter et de soumettre les frères du Temple à la question, en raison de ce qui aurait été leur mauvaise réputation, Philippe le Bel entendait faire pression sur le pape pour le contraindre à ouvrir un procès posthume contre son prédécesseur, le pape Boniface, huitième du nom. Icelui était coupable, aux yeux du roi, d’avoir tenté d’affirmer ses prérogatives plénières, spirituelles et temporelles au sein du royaume de France…
Dès lors, le pape Clément s’était vu contraint d’ouvrir une double procédure : deux enquêtes conjointes, l’une sur les
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