La mariage du Viking

fjord, pour l’aider à charger un drakkar. Toutefois, il y avait beaucoup de navires amarrés là-bas, et le fait qu’Einar se soit rendu à l’embarcadère ne signifiait nullement qu’il partait…
    Adelar choisit cet instant pour entrer et, l’air surpris, demanda à la jeune femme :
    — Où va Einar ?
    Meradyce baissa les yeux sur son ouvrage et ne répondit rien.
    — A Hedeby, intervint Olva qui travaillait à son rouet.
    Meradyce sonda alors le regard d’Endera et y surprit une lueur d’amertume. Manifestement, Einar ne faisait jamais part à sa fille de ses allées et venues.
    — Où se trouve Hedeby ? interrogea Adelar en s’approchant de Meradyce.
    — A cinq jours de bateau vers le sud, répondit Olva.
    — Est-ce une ville ?
    — Une grande ville.
    — Et pourquoi y va-t-il ?
    — Pour y faire du commerce.
    — Quand rentrera-t-il ? insista Adelar.
    — C’est difficile à dire, reprit Olva dans un haussement d’épaules. Cela dépend de ce qu’il aura pu vendre ou échanger.
    Meradyce s’efforça de parler d’une voix tranquille quand elle intervint :
    — Je pensais que l’hiver était trop proche pour s’aventurer en mer.
    — Pour se rendre à Hedeby, précisa Olva, il n’y a pas beaucoup de mer à traverser.
    Meradyce se remit au travail, le cœur étreint par l’inquiétude. Qui la protégerait lorsque Einar partirait ? Peut-être son ami, celui que l’on appelait Lars, resterait-il là… ?
    — Emmènera-t-il ses guerriers avec lui ?
    — Non, répondit Olva qui devinait ce que pouvait ressentir la Saxonne. Mais n’aie aucune crainte, Meradyce, personne n’oserait profiter d’une absence d’Einar pour le provoquer.
    Rassérénée, Meradyce esquissa un sourire. Elle savait qu’Olva ne se trompait pas sur les hommes d’Einar, et que ceux-ci ne se risqueraient jamais à défier lâchement leur chef.
    Toutefois, il existait un homme, un seul, qu’aucun scrupule n’arrêterait en l’occurrence…
    — Le guerrier à la chevelure rousse accompagnera-t-il Einar ? hasarda-t-elle.
    — Elle parle d’Ull, expliqua Endera tandis qu’Adelar venait s’asseoir près du feu.
    La main furtive du garçon vint dérober un morceau de pain, mais celle de la jeune fille, plus rapide, le lui arracha aussitôt. Vexé, Adelar s’éloigna.
    — Ull ? reprit Olva. Il ne participe jamais à ces voyages, car il prétend que marchander n’est pas digne d’un guerrier. Mais tout le monde s’accorde à dire que c’est son incapacité à commercer qui l’en empêche.
    — Et votre fils ? poursuivit Meradyce. Est-il un bon marchand, ou est-il d’accord avec Ull ?
    — Einar aime gagner, que ce soit en négociant ou encombattant. Il excelle dans les deux cas. Peut-être que, s’il n’était pas aussi habile dans tout ce qu’il entreprend, Ull ne le haïrait-il pas autant.
    — Ull hait Einar ? demanda Meradyce, interloquée.
    — Sans doute le terme est-il trop fort, reconnut Olva en se remettant à filer la laine. Mais ils ont toujours été rivaux en tout.
    La vieille femme jeta alors un regard entendu à Meradyce, qui dut se détourner pour cacher la rougeur soudaine de ses joues. Elle n’avait aucun désir de voir deux hommes se battre pour elle, et particulièrement des Vikings.
    — Einar est capable de battre n’importe qui, lança Adelar sur un ton décisif. Puis-je aller aussi à Hedeby ?
    — Certainement pas, répondit vivement Meradyce.
    — Et pourquoi ?
    — J’ai besoin de toi ici.
    — Ah…, murmura-t-il sur un ton résigné.
    Dans un soupir, Meradyce reprit son ouvrage.
    Elle avait appris un jour par Olva que la mère d’Endera était morte en couches. Et, malgré le désir qui la tenaillait d’en savoir plus, jamais elle n’avait pu obtenir d’autres explications. Néanmoins, la Saxonne comprenait à présent pourquoi Einar ignorait ainsi Endera : il lui reprochait tout bonnement la mort de Nissa.
    Avec quelle force devait-il aimer cette dernière pour en vouloir à ce point à sa propre fille !
    ***
    Einar pénétra dans une auberge d’Hedeby et balaya la grande salle d’un regard inquisiteur. Il était certain d’y trouver le Saxon nommé Selwyn qui, comme à sonhabitude, devait se dissimuler dans un coin retiré, une servante sur les genoux et une chope de bière à la main.
    Les clients, pour la plupart des étrangers en voyage, levèrent un visage intrigué vers le géant viking qui paraissait sur le seuil. Au