La mariage du Viking

avait eu raison de lui, de son âme, de son corps !

Chapitre 9
    Allongée auprès de son époux, Olva murmura :
    — Ce qui est arrivé à Meradyce m’a scandalisée. De si beaux cheveux ! Et, quel courage d’oser ensuite se rendre chez Svend pour braver de la sorte le regard des guerriers !
    La vieille femme sentit Thorston rire en silence.
    — J’aurais aimé être là pour voir leurs têtes, dit celui-ci à voix basse. J’imagine que cette brute de Ull en est tombé à la renverse.
    — J’ai peur, Thorston.
    — De quoi ? Qu’elle soit allée trop loin en agissant ainsi ?
    — Non. J’ai peur qu’Einar ne parvienne pas à gagner son cœur.
    — Il a toujours obtenu ce qu’il voulait, tu le sais bien.
    Olva se tourna sur le côté afin de mieux voir le visage de son époux.
    — Je crains qu’il n’essaie même pas, vois-tu.
    — S’il avait d’autres rivaux que Ull, je le craindrais aussi, affirma Thorston. Et comme tous deux se battraient pour un vieil os à ronger…
    — Pourtant, reprit Olva, tu sais bien que, depuis Nissa, Einar ne s’intéresse plus aux femmes. Il prétend qu’aucune ne vaut que l’on se batte pour elle.
    — Tu crois que ce que l’on a raconté au sujet de Nissa et Ull était vrai ?
    — Qui sait ? Je ne serais pas étonnée qu’elle ait partagé le lit de la moitié des hommes du village, même lorsque Einar était là. Ah, jour maudit que celui de leur mariage !
    — Elle était très belle, lui fit remarquer Thorston.
    — La Saxonne l’est aussi, mais je ne pense pas que cela suffira à réconcilier Einar avec les femmes.
    — Pourtant, il ne la traite pas comme les autres. Je l’ai tout de suite compris, à Hedeby, quand il m’en a parlé — où, plutôt, quand il ne m’en a rien dit. Il est resté très secret à son sujet. Et il a totalement ignoré les filles de Nils, alors que, d’habitude, il joue avec elles avant d’en choisir une qui lui réchauffera sa nuit.
    — Quoi ?
    — Olva, c’est un homme. Et puis, ces filles sont jolies, propres et…
    — Il ne me l’a jamais dit, s’indigna-t-elle.
    — Tu es sa mère. Combien d’hommes connais-tu, qui parlent des femmes avec leur mère ?
    — Et toi, tu ne m’as jamais dit qu’Einar et les filles de Nils…
    — Ce n’est pas mon affaire, lui fit remarquer Thorston dans un demi-sourire.
    — Vous vous tenez tous les coudes, maugréa Olva. Mais, dis-moi, mon ami, te serais-tu, toi aussi, laissé tenter par une des jolies filles de Nils ?
    — Je suis flatté que tu me croies susceptible de les intéresser quand Einar se trouve dans les parages, chuchota-t-il en lui déposant un baiser sur le front. Pourtant, si elles me le proposaient…
    — Tu n’es qu’un gredin !
    Dans un rire étouffé, Thorston intercepta la gifle qu’elle lui destinait.
    — Tu ne vas pas demander le divorce, ma douce Olva ? demanda-t-il sur un ton faussement inquiet. Je suis aussi fidèle qu’un chien.
    — Je sais, dit-elle avant de l’embrasser tendrement.
    — Tu aimerais qu’Einar épouse cette femme, n’est-ce pas ?
    — Ce serait mon plus cher désir, avoua Olva. Il l’aime. Jamais je ne l’ai vu comme cela avec une femme. Et puis, elle lui conviendrait à merveille.
    — Et elle ? interrogea Thorston, inquiet. Tu penses qu’elle l’aimerait assez pour lui pardonner de l’avoir enlevée à son pays ?
    — J’aimerais pouvoir l’affirmer. Meradyce est si secrète, si réservée. Son coup d’éclat de ce soir m’a sidérée. Cela ne lui ressemble pas du tout. Et je ne peux m’empêcher d’espérer qu’elle a agi ainsi parce qu’elle apprécie Einar. Il s’est montré doux et attentionné avec elle ; c’est un homme qui a du cœur.
    — Voilà bien des paroles de mère, observa Thorston.
    — C’est la vérité. Il n’a jamais porté la main sur aucune femme, à la différence de certains…
    A la tristesse qui voilait la voix de son épouse, Thorston devina qu’elle songeait à ses jeunes années en pays saxon.
    — Ils sont probablement morts, aujourd’hui, dit-il doucement.
    — Que leurs os pourrissent sous terre, pour ce qu’ils ont infligé à ma famille, et à moi-même.
    — Et, malgré cela, tu veux que ton fils épouse une Saxonne, s’étonna Thorston.
    — Oui, répondit Olva en se blottissant contre son mari. Je veux qu’Einar épouse cette femme. Elle estdouce, gentille et loyale. Ces enfants ne sont pas les siens, et pourtant