La mariage du Viking
fut son bonheur quand, à la nuit tombante, le vaisseau s’engagea dans le fjord. Le cœur léger, Einar adressa un lent sourire à Lars, son capitaine. Aussi épuisé que lui par cette éprouvante traversée, celui-ci s’exclama :
— Par la foudre de Thor, je ne dédaignerais pas un bon repas et quelques pintes d’ale !
Einar se tourna alors vers la Saxonne, frileusement enveloppée dans un sac de peau destiné à entreposer vivres et armes durant le jour, et dont les marins se couvraient la nuit.
Il la savait éveillée. A la vérité, il doutait même qu’elle eût un seul instant fermé l’œil durant ce voyage mouvementé. Car, non seulement elle semblait terrifiée par lui-même et son équipage, mais elle avait dû sans cesse soigner les enfants qui souffraient du mal de mer.Ceux-ci dormaient maintenant, blottis sous la cape de fourrure dont il les avait recouverts tandis que la tempête faisait rage.
Malgré la terrible épreuve de la traversée, sa prisonnière demeurait d’une digne et farouche beauté, et cette attitude ne cessait de l’impressionner.
Sans doute redoutait-elle de le voir se jeter sur elle pour la violer. D’ailleurs, les autres guerriers se demandaient probablement pourquoi leur chef n’avait pas déjà abusé d’elle. Violer une captive constituait pour eux un acte de bravoure, dont ils ressortaient en général couverts de griffures et de morsures qu’ils exhibaient avec fierté. Ils prétendaient aussi qu’une femme violée devenait une femme soumise.
Einar, cependant, préférait que ses compagnes se montrent coopératives, bien qu’il dût admettre avoir été tenté à plusieurs reprises de posséder la belle Saxonne, consentante ou non. Un soir, au plus fort de la tempête, n’avait-il pas cru surprendre chez elle un regard brillant de convoitise à son égard ? Sans toutefois s’attarder sur cette impression fugace, il avait aussitôt décidé d’offrir sa prisonnière à Svend, pour le remercier de lui avoir offert le commandement de ce navire.
En voyant une telle beauté, peut-être même que son père lui pardonnerait d’avoir transgressé les ordres en la gardant en vie. En revanche, au vu d’une telle désobéissance, chaque chef de clan le soupçonnerait maintenant de vouloir se hisser à la tête de leur peuple. Et certains, parmi ses hommes, penseraient même que tel était son réel désir.
Einar demeura songeur. Combien de fois Ull avait-il laissé entendre que Svend se faisait trop vieux pour être leur chef, sous-entendant ainsi qu’Einar devraitle remplacer ? Ull ne semblait pas comprendre que ce dernier aurait préféré mourir plutôt que de se montrer déloyal envers son père.
Non, à la réflexion, le présent qu’il rapportait en trophée chasserait sans doute les craintes que Svend pouvait nourrir à ce sujet. C’était aussi le meilleur moyen d’empêcher les autres hommes de se battre pour la Saxonne.
Et, par Thor, cette femme était digne que l’on se batte pour elle, même dans l’état de détresse où elle se trouvait en ce moment ! Rien ne pouvait amoindrir sa beauté. Une beauté qu’Einar connaissait, pour avoir touché, tandis qu’elle se défendait contre lui, les formes exquises de son corps. Il savait aussi que le calme imperturbable de cette créature pouvait dissimuler une passion sauvage. Ne s’était-elle pas battue comme une tigresse pour protéger ses enfants ?
Et Einar ne pouvait qu’admirer la façon dont elle avait su se ressaisir à l’issue de leur combat, après s’être rendu compte que toute résistance serait vaine.
Si au moins ses guerriers savaient se maîtriser d’aussi belle façon ! Tels des enfants, ils se querellaient sans arrêt à propos des esclaves ou des butins qu’ils rapportaient à bord.
Einar se tourna de nouveau vers sa prisonnière et, aussitôt, sentit son sang palpiter dans ses veines. Rien ne l’empêchait de la posséder sur-le-champ, s’il le désirait. Svend, d’ailleurs, ne s’en offusquerait pas et se demanderait même pourquoi aucun de ses deux fils n’avait déjà profité d’elle.
Cependant, ce n’était pas de la terreur qu’Einar espérait lire dans le regard de cette femme, mais du désir. Il ne voulait nullement la forcer ; il voulait qu’elle se donne à lui de son plein gré.
Et s’il ne l’offrait pas à Svend… ?
Brusquement, Hamar s’élança vers la pointe extrême de la proue.
— Gunnhild ! s’écria-t-il à l’adresse
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