La mariage du Viking
heureux qu’on le fasse attendre de la sorte, fit remarquer Hamar.
— Je n’ai jamais compris son amour pour la charrue, reprit Thorston.
— Il n’a qu’un sillon à tracer, lui rappela Einar. Je crois surtout qu’il aime à montrer son aptitude à faire autre chose que batailler.
— A la façon dont il s’en vante, c’est certain, répliqua Thorston dans un petit rire.
Au bout d’un instant de silence, ce dernier ajouta :
— C’est un joli berceau que tu rapportes, Einar. Un peu cher, peut-être…
— Thorston, tu prétends toujours que tout ce que j’achète est cher, riposta Einar.
— Je ne le prétends pas, c’est vrai. Mais l’important est qu’il plaise à Meradyce, n’est-ce pas ?
La lumière baissait lentement entre les arbres. Mais, bientôt, le petit groupe de cavaliers se retrouva en haut de la colline qui dominait le fjord. Einar arrêta son cheval et contempla le village. Immobiles à ses côtés, les chiens se mirent à gémir.
Un mauvais pressentiment saisit le Viking.
— Qu’y a-t-il ? demanda Thorston en stoppant à sa hauteur.
A son tour, Hamar rejoignit Einar.
— Il n’y a pas de fumée, articula celui-ci. Je ne vois aucun mouvement dans le village.
Inquiets, les guerriers se regroupèrent derrière eux.
— Thorston, ordonna Einar, prends cinq hommes qui resteront ici avec toi et les chevaux chargés. Vous autres, suivez-moi.
Le Viking éperonna sa monture, dégaina son épée et, suivi de ses guerriers, descendit la colline au galop.
***
Fou d’angoisse et de consternation mêlées, Einar mit pied à terre et considéra les corps mutilés qui jonchaient le sol. Sa mère, son père étaient morts. Bjorn, également, et tant d’autres encore.
Ils rentraient trop tard de leur voyage.
Hamar dégringola de sa monture et, affolé, courut vers sa maison d’où il ressortit aussitôt.
— Ils ont disparu !
— Meradyce ! Endera ! appela Einar d’une voix étranglée.
Seul l’écho lui répondit. Alors, il se rua dans le village et chercha, parmi les morts, le visage de celles qu’il chérissait le plus au monde. La plupart des guerriers se trouvaient au-delà de l’enceinte, mais, à l’intérieur, gisaient des corps de femmes qui, manifestement, étaient mortes en se battant.
Nulle part il ne vit trace de Meradyce, Endera ou Adelar. Femmes et enfants semblaient avoir disparu.
Serrant convulsivement le pommeau de son épée, le Viking ressortit du village, d’une longue foulée nerveuse. En silence, il maudit le responsable de ce carnage, et se jura de lui faire regretter d’avoir vu le jour.
A ses hommes frappés d’indignation, qui restaient regroupés près de la grande porte, il lança :
— Où que soient nos femmes et nos enfants, nous les retrouverons !
— Qui a pu faire cela ? demanda Hamar d’une voix blême.
— Les Saxons !
Einar se retourna lentement, pour apercevoir Ull, méconnaissable, qui émergeait du bâtiment où travaillait habituellement Bjorn. Le visage boursouflé et contusionné, il retenait d’une main son épaule ensanglantée, tandis que son bras pendait lamentablement à son côté.
— Les Saxons… J’ai entendu le gamin s’adresser à leur chef comme à son père, et je l’ai vue — elle, ta femme — avec eux.
— Que veux-tu dire, avec eux ? interrogea Einar, interloqué.
Ull s’approcha, fixant le Viking de ses yeux injectés de sang.
— Je l’ai vue, comme je te vois. Elle s’est avancée vers le chef saxon, de son plein gré, l’a appelé par son nom…
— Quel nom ?
— Kendric.
— Et Endera ?
— Les Saxons l’ont emmenée, répondit Ull.
A cet instant, ce dernier vacilla, manqua de tomber, mais s’accrocha au bras d’Einar. Sur un ton suppliant, il ajouta alors :
— Va la chercher. Endera, ma fille.
Bouleversé par cette révélation, Einar retint Ull qui glissait lentement à ses pieds.
— Pardonne-moi ! articula avec peine le blessé.
Einar acquiesça silencieusement puis appela un de ses hommes restés non loin de lui.
— Emmène-le et soigne-le pour le mieux.
Le Viking les regarda s’éloigner, non sans s’avouer qu’en d’autres circonstances, il aurait étranglé Ull après ce qu’il venait de lui annoncer.
Mais, pour l’heure, il ne songeait qu’à Meradyce et Endera, prisonnières des Saxons, à la merci d’un traître.
— Connais-tu ce Kendric ? lui demanda Hamar qui l’avait vu frémir lorsque Ull lui
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