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La Marque du Temple

La Marque du Temple

Titel: La Marque du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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l’entrée des familles de manants et de nos vivres dans le village de Commarque pour rendre visite à la châtelaine. Certes, mes trois compains écuyers s’acquittaient remarquablement de leur tâche, mais moult petits problèmes se présentaient continuellement qu’il convenait de régler, sans parler de l’organisation des défenses et du rôle qui reviendrait à chacun.
     
    Entre Marguerite et moi, s’établissaient des relations d’une nature curieuse et ambiguë. Elle n’assurait plus à présent que le service de la baronne et le mien, prenait son souper avec moi dans ma chambrette, les rares fois où je ne me joignais pas aux gens d’armes de la place, et passait toutes ses nuits à mes côtés, sous la garde de Clic, de Clac et de… Cloc.
    Outre sa conversation toujours enjouée, mon seul plaisir était d’admirer la nudité de son dos lorsqu’elle quittait ses vêtements pour enfiler une grande chainse de laine pour la nuit. Par Saint-Georges, que c’est beau le dos d’une femme nue ! De belles épaules, un col dégagé, une taille fine, des fesses pleines et charnues, des bras et des jambes déliés, des poignets et des chevilles d’une adorable finesse.
    C’étaient là mes seuls fantasmagories nocturnes et je me contentais de jouir de ce maigre plaisir lorsque nous nous retrouvions pour passer la nuit en toute chasteté à la façon de saint Augustin. Certes, nous ressentions forte envie de nous emmistoyer comme de jeunes fauves que nous étions, mais nous étions convenus de n’avoir aucun contact charnel tant que notre village et ses gens resteraient sous la menace d’un siège godon.
    Ce prétexte fallacieux, je l’avais imaginé pour préparer mon corps et mon esprit à accueillir prochainement ma petite fée aux alumelles, Isabeau de Guirande, qui devait rejoindre notre village avant les fêtes de la Noël, avions-nous appris par un chevaucheur.
    Marguerite s’en accommoda de mauvaise grâce, mais elle ne tenta aucune provocation, n’eut aucun geste de colère, aucune parole blessante. Elle s’était résignée et se contentait de jouir du moment présent. Carpe Diem.
    Elle savait l’amour étonnant que je portais à mon inconnue, Isabeau, mais fort curieusement, elle ne semblait pas s’inquiéter de l’inévitable changement de situation qui en résulterait. Sans doute, savait-elle aussi qu’elle bénéficierait toujours de ma protection et de mon amitié, même si le mot est un peu faible pour qualifier la très forte attirance qu’elle m’inspirait.
     
     

     
     
    Par une fin de matinée glaciale, le vent se leva, chassa de lourds nuages et écuma les feuilles jaunes et rouges des arbres. Ce jour-là, les deux nouveaux écuyers que feu le baron avait pris à son service, Philippe de Castelja et Amould de Ségur, se présentèrent devant les portes de la barbacane.
    Nous eûmes enfin des nouvelles fraîches : de fortes bannières anglaises de cent à deux cents lances se dirigeaient vers nous, sans aucun doute possible.
    Ils m’apprirent que Foulques de Montfort avait été investi du commandement de la forteresse de Beynac. En attendant que soient réglés les problèmes de succession de feu Fulbert Pons, baron de Beynac. Il m’adressait ses compliments et me recommandait grande prudence et grande vaillance. Il espérait pouvoir chevaucher vers nous dans le courant des mois de novembre ou de décembre.
    Je priai les deux écuyers de taire la nouvelle de la mort du baron et de ne s’en ouvrir à personne au sein du village de Commarque. Je justifiai ma requête en leur expliquant que je m’apprêtai à démasquer un traître à notre cause, et n’y parviendrais point s’ils ne savaient tenir leur langue. Ils comprirent aussitôt qu’ils pourraient bien être accusés de complicité de félonie s’ils parlaient, sans que j’eusse à leur préciser le châtiment que je réserverais à iceux.
    Je leur confiai deux messages revêtus de mon seing et de mon sceau à remettre en mains propres. L’un était destiné à Foulques de Montfort et l’autre rédigé, en latin, au barbier du château de Beynac. Bien évidemment, j’avais tu les terribles soupçons que je portais sur le nouveau maître de la baronnie. Un maître par intérim. Comme moi je l’étais, à Commarque.
    Ils étudièrent attentivement notre système de défense et discutèrent avec quelques chevaliers des dispositions générales que nous avions prises. Nous dînâmes ensemble, puis ils

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