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La Marque du Temple

La Marque du Temple

Titel: La Marque du Temple Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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et de l’honorer comme une épouse doit l’être par son mari.
    Je portais, depuis plus de trois ans, un amour sans fin à la dame de ma vie. J’avais parcouru pechs et combes, levé une véritable conspiration du silence, traversé bien trop d’embûches envers et contre tous au péril de ma vie pour prouver son existence en chair et en os, pour m’arrêter au moment où j’allais pouvoir jouir prochainement de mon Graal de chair.
    Pour cause d’une infirmité qui, quelle qu’en soit la gravité pour icelle, me poussait au contraire à lui crier mon amour encore plus haut et à ne l’en aimer que plus tendrement.
    « Comment cela s’est-il produit, Éléonore, lui demandai-je l’air hébété.
    — Un accident, semble-t-il, à la suite d’un choc qu’elle aurait reçu sur le crâne il y a près de six ans ; elle perdit conscience pendant plusieurs jours et, lorsqu’elle ouvrit à nouveau les yeux, elle pleura, car elle ne voyait plus que des souvenirs, des ombres, comme si ses paupières étaient closes. »
    Je comprenais mieux à présent sa dévotion quasi monacale, ses longues et fréquentes retraites, ses chevauchées en compagnie du chevalier hospitalier Gilles de Sainte-Croix, leurs nombreuses visites aux maladreries…
    « Éléonore, j’ai besoin de prendre l’air. Je reviendrai tantôt pour tenir ma promesse et vous livrer le secret de l’eschaquier, ainsi que je m’y suis engagé », dis-je d’une voix blanche.
    La châtelaine, en un bref instant d’humanité ou de compassion, ne s’y opposa pas, persuadée en outre que j’allais vérifier cette bouleversante information.
     
     

     
     
    Encore sous le choc de cette terrible nouvelle, je rejoignis la châtelaine en son logis quelques heures plus tard vers none, sans avoir dîné. Le ciel était plus plombé que le fer d’un mortel aspersoir d’eau bénite. Une fine pluie apportait une humidité qui suintait sur les murs, malgré le feu qui asséchait l’air.
    Nous dûmes affouer trois bougies de cire. Pas de suif. Les délicates bronches de la baronne ne supportaient que la cire d’abeille. Moins de fumée, une odeur de miel, un éclairage plus doux, plus tamisé, me dit-elle en éteignant la petite alumelle soufrée qu’elle tenait en main, un léger sourire sur les lèvres, en me fixant de ses yeux de biche qui ardaient toute la sensualité dont la trop belle dame était parée.
    Nous déclenchâmes la mécanique qui ouvrait la couverture en bois du codex pour en extraire avec moult précautions le précieux parchemin. Éléonore posa les quatre chevaliers du jeu d’échecs sur les angles du document qui avait une fâcheuse tendance à se refermer sur ses plis.
    J’y substituai aussitôt quatre rocs, réservant les chevaliers à la démonstration que je m’apprêtai à administrer, et servis un peu de vin d’hippocrace dans deux gobelets en argent. Elle porta une santé au trésor des Albigeois, avant d’élever la coupe à ses lèvres. Je fis de même, bien que le cœur n’y fut pas.
    Ses yeux brillaient d’un éclat satanique à la lumière des chandelles, dont la flamme accentuait le dessin de ses rides autour des yeux et le relief de ses pommettes. Nous nous assîmes sur le banc. Elle pressa ses fesses contre les miennes. Les effluves de son nouveau parfum à base de fougère et de musc auraient pu me faire perdre la raison. Mais raison je gardai, en glissant le cul de quatre pouces à sa dextre.
    Non, je n’étais pas assis séant à sa dextre, ce jour-là. Si, tous comptes faits, je siégeai bien à sa dextre, et je ne m’étais écarté que d’un demi-pouce. Son parfum me prenait la tête. Je faillis bien me donner deux claques sur les joues. Mes joues étaient déjà rosies sous l’effet de l’alcool. Or donc, je n’en fis rien, mon cœur n’étant pas disposé à quelque chatterie.
     
    Il convenait de procéder avec méthode. Pour expliquer la signification de cet arcane essentiel, j’empreuntai une plume et un parchemin de belle qualité et décomposais le mouvement du cavalier sur l’eschaquier :
    « Ma dame , vous connaissez les règles de son déplacement en ce remarquable jeu d’échecs : le chevalier saute deux cases dans tous les sens avant de se poser une case plus loin, à dextre ou à senestre.
    — Certes, mais le texte que nous avons sous les yeux stipule : un cavalier et non un chevalier …
    — Lisez attentivement la suite de l’énigme : Il sauta sans vider les étriers

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