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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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Nantes n’importe sous quel costume, mais que j’y entrerai.
    – Pardieu ! nous aussi nous entrerons. La question n’est pas là ! Pour moi, je trouverais par trop innocent d’aller se jeter ainsi dans la gueule de ce Carrier que Dieu confonde !
    – J’ai prévu tout cela, interrompit Marcof ; ne vous inquiétez de rien. Nous nous arrêterons à Saint-Étienne pour laisser souffler nos chevaux ; là nous trouverons un ami qui nous fournira trois vêtements complets de sans-culottes : nous serons méconnaissables !
    – Corbleu ! cela m’agace de penser que je vais me salir par le contact de pareilles défroques.
    – Connaissez-vous un meilleur déguisement ?
    – Non.
    – Eh bien, alors ?
    – Va donc pour cette livrée de valets de bourreau !
    – J’endosserais celle du diable, répondit le marin, pour arriver à mon but !
    – Et vous auriez raison, mon brave ami ! J’ai tort, je le confesse ; ne pensons qu’à Philippe.
    – Et à Yvonne ! murmura Keinec.
    Marcof l’entendit.
    – Tu espères donc encore ? demanda-t-il.
    – J’espérerai tant que je n’aurai pas acquis une certitude.
    – Pauvre enfant ! soupira le marin.
    – J’ai fouillé toutes les villes de Bretagne, excepté Nantes, continua Keinec ; peut-être Yvonne y est-elle ?
    – Qu’est-ce qu’Yvonne ? demanda Boishardy.
    – Celle que j’aime, monsieur le comte.
    – Au fait, Boishardy ne connaît pas cette histoire, ajouta Marcof. Raconte-la-lui, Keinec ; elle l’intéressera, et peut-être te donnera-t-il d’excellents conseils.
    – Parle, mon gars, fit affectueusement le chef royaliste en écartant un peu son cheval pour que Keinec pût s’approcher.
    Le jeune homme poussa sa monture entre celles des deux cavaliers, puis il réfléchit quelques instants. Enfin, dans ce style d’une rusticité sauvage mais pleine de poésie qui n’appartient qu’au paysan breton, il entama la légende de ses amours et de celles de Jahoua. Keinec s’animait en parlant ; au souvenir d’Yvonne enlevée par Diégo, des larmes de rage sillonnèrent son visage ; son poing crispé meurtrissait le pommeau de sa selle, et, par une contraction des muscles, il étreignit si vivement son cheval que le pauvre animal poussa un hennissement de douleur.
    En entendant prononcer les noms du chevalier de Tessy et du comte de Fougueray, Boishardy échangea un regard rapide avec Marcof.
    – Ce sont les mêmes, n’est-ce pas ? lui demanda-t-il.
    – Oui, répondit le marin.
    – Eh bien ! la chose s’éclaircit au lieu de se compliquer, c’est bon signe.
    – Sans doute ; mais je ne saurais oublier les dernières paroles prononcées par ce misérable chevalier.
    – Quand vous l’avez trouvé mourant à l’abbaye de Plogastel ?
    – Oui.
    – Et quelles étaient ces paroles ?
    – Les voici : « Venge-moi de ceux qui m’ont assassiné, tu les livreras à la justice… elle n’est pas notre sœur, c’est sa maîtresse à lui… à… » Et il expira sans pouvoir achever, ajouta Marcof avec un mouvement de colère.
    – Mais qui accusait-il de sa mort ?
    – Le comte de Fougueray.
    – Son frère ?
    – Il disait que cet homme n’était pas son frère !
    – Comment cela ?
    – Voilà ce que je ne sais pas, ce que je donnerais tout au monde pour savoir.
    – Peut-être ce misérable n’avait-il plus sa raison et délirait-il en parlant ainsi ; l’agonie causée par le poison amène souvent des hallucinations étranges.
    – Malheureusement ; mais cependant je crois volontiers que cet homme avait conscience de ses paroles.
    – Qui vous porte à le croire ?
    – Une vérité qu’il m’a avouée et qui prouve évidemment qu’il n’était pas le frère du comte.
    – Qu’est-ce donc ?
    – Je l’ai reconnu pour un ancien bandit que j’avais rencontré jadis dans les Abruzzes. À cette époque, je ne l’avais vu que quelques minutes, mais cela s’était passé dans des circonstances telles que sa figure était demeurée gravée dans ma mémoire.
    – Et il a avoué cela ?
    – Parfaitement, n’est-ce pas, Keinec ?
    – Je l’ai entendu, ainsi que Jahoua.
    – Que pensez-vous de cela, Marcof ?
    – Je ne sais que supposer ! Était-ce Raphaël (ce misérable se nommait ainsi), était-ce Raphaël qui trompait le comte de Fougueray ; était-ce le comte de Fougueray qui se servait de cet homme ? C’est dans la réponse que se trouverait le nœud de cette

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