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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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qu’elle devrait sa victoire.
    Il va sans dire qu’il avait étudié tous les habitants de l’hôtel d’Etioles.
    Et il n’y avait qu’un personnage qu’il n’était pas parvenu à déchiffrer : c’était Henri d’Etioles lui-même.
    Il finit par le juger un mari insignifiant, uniquement occupé de ses chiffres… en quoi il se trompait.
    Il y avait aussi à l’hôtel d’Etioles un homme que Berryer ne comprit pas, ou plutôt qu’il dédaigna d’analyser, en raison de ses fonctions subalternes… en quoi il se trompait encore.
    Cet homme, c’était Damiens.
    Quoi qu’il en soit, lorsque le lieutenant de police quitta Poisson et Crébillon après la scène que nous avons retracée de notre mieux, il se crut sûr de sa fortune dans l’avenir.
    Dehors, il retrouva son secrétaire intime qui le suivait dans toutes ses expéditions et pour qui il n’avait rien de caché. Cet homme s’appelait François-Joachim de Pierres de Bernis. Il était un peu poète, un peu abbé, un peu tout ce qu’on voulait.
    – Eh bien ! demanda-t-il familièrement à Berryer, le Poisson a-t-il mordu à l’hameçon ?
    – Admirablement, mon cher Bernis, dit le lieutenant de police. Mais nous avons mieux encore : nous avons le précieux concours d’un homme d’esprit…
    – Diable ! méfiez-vous des gens d’esprit, monsieur le lieutenant général !
    – En ce cas, je devrais commencer par me défier de vous, Bernis !…
    – Merci. Voilà un compliment qui vaut son pesant d’or, venant de vous… Quoi qu’il en soit, vous savez que je ne suis pas capable d’une trahison.
    – Si fait, mon cher. Vous en êtes parfaitement capable. Seulement, vous ne me trahirez pas…
    – Et pourquoi, je vous prie ? Je serais curieux de le savoir.
    – Parce que vous voulez monter. Vous êtes jeune. Vous avez résolu de grimper quatre à quatre les échelons branlants de cette échelle qu’on appelle la faveur royale. Or, vous avez compris que le meilleur moyen de réussir dans ce périlleux exercice, c’est de vous accrocher aux basques de quelqu’un qui grimpe… Et si vous lâchiez ces basques, vous tomberiez, mon cher, et vous vous casseriez les reins…
    L’œil de Bernis jeta un éclair.
    Berryer ne vit pas cet éclair rapide qui lui eût peut-être donné à réfléchir.
    – Vous avez raison, reprit Bernis, surtout si vous ajoutez qu’avant de choisir un maître, j’ai longuement réfléchi, c’est-à-dire que j’ai adopté, pour m’y accrocher, les basques les plus solides qui soient sur la fameuse échelle…
    Ils se mirent à rire.
    – Pour en revenir à l’homme d’esprit en question, reprit alors Berryer, c’est l’un de vos confrères en poésie, ce brave et digne Crébillon…
    – Un homme heureux ! soupira Bernis. Pourvu qu’il ait du tabac pour sa pipe, du mou pour son chat et du papier pour ses vers, le voilà plus roi que le roi !… Il vous a donc promis son concours ?
    – Voici la chose, Bernis, dit Berryer.
    Bernis dressa les oreilles, comprenant qu’il allait apprendre du nouveau.
    – Demain soir, à neuf heures et demie, vous amenez au carrefour Buci, devant la porte de la Lebon, un solide carrosse dont la portière demeure ouverte…
    – A neuf heures et demi : très bien. Qui conduira ?
    – Vous-même !
    Bernis ne put réprimer un tressaillement.
    – Et qui sera dans le carrosse ?
    – Moi ! dit Berryer. A dix heures, M me  d’Etioles sort de la maison, elle monte dans le carrosse, je ferme la portière… elle crie ou ne crie pas, c’est mon affaire… vous fouettez !
    – Et je m’arrête ?…
    – A Versailles !… Le reste me regarde !
    – Admirable ! dit Bernis. C’est simple et majestueux comme un cinquième acte de Corneille.
    Le lieutenant de police savoura modestement ce tribut payé à son génie d’intrigue. Puis il ajouta :
    – Allez donc, mon cher Bernis, vous occuper de l’importante affaire du carrosse. Je ne pourrai vous voir demain de toute la journée. Songez que si nous réussissons je grimpe du coup une dizaine d’échelons à la fois…
    – Et comme je suis accroché à vos basques…
    – Vous les grimpez avec moi, soyez tranquille !…
    Les deux hommes se séparèrent.
    Berryer, quelques minutes plus tard, entrait au Louvre, et demanda à parler au roi. Le roi dormait. Force fut à Berryer de remettre au lendemain l’entretien qu’il voulait avoir avec Sa Majesté.
    Le lendemain matin, de bonne heure, le

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