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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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où tu es absent. Voilà pourquoi Lancelot demeure à Kamaalot au lieu de se rendre au tournoi de Caerwynt. Il s’est contenté d’y envoyer ceux de sa maison et fait semblant d’être malade. De cette façon, sa feinte lui permettra, sitôt que tu seras parti, d’aller cette nuit même rejoindre à loisir la reine. »
    En entendant ce discours, le roi Arthur ne put s’empêcher d’y déceler la calomnie : « Agravain, mon cher neveu, répliqua-t-il, ne répète jamais pareille accusation, car je ne suis guère disposé à la prendre au sérieux. Je ne nie certes pas que Lancelot n’ait pas eu désir de la reine : nombre des chevaliers de ma cour sont plus ou moins épris de Guenièvre, cela, je le sais fort bien. Belle et avenante comme est Guenièvre, comment ne susciterait-elle pas des regards d’admiration et d’amour ? Mais de là à croire que Lancelot et Guenièvre sont liés par un amour coupable, assurément, je m’y refuse ! » Agravain se permit néanmoins d’insister : « Bel oncle, dit-il, les apparences, il est vrai, sont parfois trompeuses, mais d’étranges murmures agitent cette cour. Pour mettre un terme à ces médisances, tu devrais, m’est avis, faire épier la reine : ainsi édifié, tu serais à même de clouer les langues… » Le roi haussa les épaules. « Voilà bien des futilités ! dit-il, mais si tu crois le faire pour mon bien, je t’autorise à agir à ta guise et je ne t’en empêcherai pas. » Agravain se déclara satisfait de la permission, et il quitta le roi, le cœur empli de méchante joie.
    Toute la journée, Arthur réfléchit beaucoup aux révélations d’Agravain mais, au fond de lui-même, il n’en était pas tellement troublé. Quand approcha l’heure de partir, il regroupa quelques-uns de ses compagnons et les pria de s’équiper. Or, Guenièvre vint alors le trouver. « Roi, dit-elle, j’assisterais volontiers, s’il te plaisait, à ce tournoi. Il me serait agréable d’y aller, car tout y présage, dit-on, de grands faits d’armes. – Guenièvre, répondit Arthur, je ne souhaite pas que tu viennes cette fois-ci. » Alors, sans insister, la reine se retira. Quant au roi, il vit là un excellent moyen de prouver qu’Agravain mentait.
    Une fois parti avec ses compagnons, notamment Gauvain, Yvain et Girflet, le roi leur parla de Lancelot, et tous déplorèrent qu’il eût dû renoncer au tournoi. Or, à peine celui-ci les sut-il en route pour Caerwynt que, quittant son lit, il s’équipa et, allant trouver Guenièvre : « Dame, dit-il, avec ta permission, j’irai à ce tournoi. – Mais, s’étonna-t-elle, pourquoi n’avoir pas accompagné les autres ? – Reine, c’est que je souhaitais m’y rendre seul et à l’insu de quiconque. – Fort bien, dit Guenièvre, et puisque tel est ton bon plaisir, je consens volontiers à te laisser partir. Cependant, je t’en prie, reviens vite. » Lancelot quitta alors la reine et retourna en son logis pour y demeurer jusqu’à la nuit.
    Quand tout le monde fut couché dans la forteresse de Kamaalot, il se glissa hors de sa chambre et alla trouver son écuyer. « Ami, lui dit-il, il te faut monter à cheval et m’accompagner, car je veux aller au tournoi de Caerwynt. Cependant, comme pour rien au monde je ne voudrais être reconnu en route, nous voyagerons tous deux de nuit. » Après s’être équipé rapidement, l’écuyer s’en alla chercher le meilleur cheval que possédât Lancelot puis, sitôt sortis de la forteresse, les deux hommes se dirigèrent droit vers Caerwynt, et ils chevauchèrent la nuit entière sans prendre le moindre repos.
    Le lendemain, au lever du jour, ils atteignirent une forteresse où le roi avait passé la nuit. Lancelot toutefois s’abstint d’y pénétrer, de peur qu’on le reconnût, et se contenta d’en longer les murs, tête baissée, car au même instant les chevaliers du roi sortaient du château, et il était fort marri d’être arrivé si tôt.
    Cependant, le roi Arthur, qui s’était accoudé sur l’entablement d’une fenêtre, aperçut la monture de Lancelot et la reconnut aussitôt, car il la lui avait lui-même offerte. Lancelot, quant à lui, ne vit pas le roi, puisqu’il avançait toujours tête basse. Pourtant, au détour d’une rue, il se redressa, et le roi le distingua si nettement qu’il dit à Girflet, penché à ses côtés : « Regarde Lancelot ! Hier encore, il se prétendait malade et fatigué, et le voici déjà

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