La mythologie : Ses dieux, ses héros, ses légendes

homme,
auquel les dieux avaient enseigné son art divin, et il l’épargna, pour lui
permettre de composer de nouveaux chants.
    Le combat – le carnage – avait pris fin et on appela la
vieille nourrice Euryclée et ses servantes pour faire disparaître toute trace
de souillure et remettre de l’ordre dans la salle. Elles entourèrent Odysseus, pleurant,
riant et lui souhaitant la bienvenue en son logis, jusqu’à ce que son cœur s’émût
au point d’être tenté de pleurer, lui aussi. Elles se mirent enfin au travail
mais Euryclée monta dans la chambre de sa maîtresse. Elle s’approcha de son lit.
« Réveille-toi, très chère », dit-elle, « car Odysseus est
revenu et tous les prétendants sont morts. » « O vieille femme
insensée ! » gémit Pénélope. « Mon sommeil était si doux. Va-t’en
vite et réjouis-toi de n’être pas battue comme l’aurait été tout autre qui
aurait osé me réveiller. » Mais Euryclée s’obstina. « En vérité, en
vérité, Odysseus est ici. Il m’a montré la cicatrice. C’est bien lui, en
personne. » Pénélope se refusait encore à la croire ; ne se fiant qu’à
ses yeux, elle descendit en hâte.
    Un homme de haute taille et d’allure princière était assis à
côté de la cheminée, dans la lueur des flammes. Elle prit place devant lui et
le regarda en silence. Elle était perplexe ; un moment, elle croyait le
reconnaître, puis à un autre, il lui paraissait étranger. Télémaque s’écria :
« Mère, Mère, oh, cruelle ! Quelle autre femme se tiendrait à
distance quand son mari revient après vingt ans d’absence ! » « Mon
fils », répondit-elle, « je n’ai plus la force de faire un geste. Si
celui-ci est bien Odysseus, alors nous avons tous deux les moyens de nous
reconnaître. » Odysseus sourit et pria Télémaque de les laisser seuls. «  Maintenant, nous allons nous retrouver »,
dit-il.
    Alors la vaste salle, où tout avait retrouvé sa place, s’emplit
de rires et d’allégresse. Le musicien tira de doux sons de sa flûte et éveilla
en chacun le désir de danser. Gaiement, ils battirent la mesure du pied, les
hommes et les femmes en habits de fête, jusqu’à ce que la grande maison
résonnât sous leurs pas. Car après avoir longtemps erré, Odysseus était enfin
revenu chez lui et tous les cœurs se réjouissaient.

Les aventures d’Enée
    L’autorité première à laquelle
on se réfère pour ce récit est l’Enéide, le
plus grand de tous les poèmes latins. Il fut écrit au moment où Auguste reprit
en mains le monde romain, écroulé dans le chaos qui suivit l’assassinat de
César. Avec fermeté, il mit fin aux furieuses guerres civiles et ramena la paix – Pax Augusta – qui dura près d’un siècle. Virgile et toute sa
génération s’enflammèrent d’enthousiasme pour l’ordre nouveau et l’Enéide fut écrite pour exalter l’Empire, pour doter d’un
héros national et d’un fondateur cette « race destinée à maintenir le
monde sous sa loi. » Ce dessein patriotique de Virgile est probablement
responsable de la différence qui existe entre l’Enée surhumain des premiers
livres et le prodige inhumain des derniers en date. Par sa détermination de
créer un héros romain qui ferait pâlir tous les autres héros, le poète fut
finalement entraîné dans le genre purement fantastique. Cette tendance à l’exagération
était d’ailleurs un trait bien romain. Il va de soi que les noms latins sont
employés ici, ainsi que la forme latine lorsqu’un personnage répond à la fois à
un nom grec et à un nom latin – Ulysse,
par exemple, est le nom latin d’Odysseus.
     
I. De Troie en Italie
    Le fils de Vénus, Enée, compte parmi les héros les plus
fameux qui combattirent pendant la Guerre de Troie. Du côté troyen, il ne le
cédait qu’à Hector. Lorsque les Grecs investirent Troie, il réussit, grâce à
l’aide de sa mère, à s’échapper de la ville avec son père et son petit garçon,
puis à faire voile vers une nouvelle partie.
    Après de longues pérégrinations et bien des épreuves tant
sur terre que sur mer, il atteignit l’Italie où il défit tous ceux qui
s’opposaient à son entrée dans le pays, il épousa la fille d’un roi puissant et
fonda une cité. Il fut toujours tenu pour le véritable fondateur de Rome parce
que Romulus et Rémus, en fait ses fondateurs réels, naquirent l’un et l’autre
dans la ville érigée par son fils : Alba Longa.
    Quand