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La nef des damnes

La nef des damnes

Titel: La nef des damnes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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Il faut prévenir votre abbé et vous barricader dans le monastère. Quant à moi, je dois alerter le camp au plus vite.
    — Attendez ! Attendez ! protesta Henri. Ne nous précipitons pas. Est-ce qu’ils étaient en train de débarquer quand vous les avez vus ?
    — Ma foi non. Ils étaient ancrés au large.
    — Cela nous laisse donc un peu de temps. Vous êtes un guerrier, il y a deux gardes dehors. Nous sommes trois moines solides. Je crois qu’il faut décider avant tout du sort des blessés.
    — Les blessés. Oui, bien sûr, approuva le Normand en se morigénant de n’avoir pas pensé lui-même à tout cela.
    Suffîsait-il que son maître s’en aille pour qu’il soit aussi désarmé qu’un enfançon ? Ce moine avait plus de bon sens que lui. Le camp était loin, il lui fallait d’abord organiser la défense du monastère. La mine soucieuse, il se tourna vers l’infirmier :
    — Comment va le jarl ?
    Grégoire avait recouvré son calme et c’est d’un ton presque normal qu’il répondit :
    — Il a repris connaissance. Venez, messire !
    Il écarta le rideau, laissant passer le jeune homme. Magnus ouvrit les yeux et un vague sourire s’esquissa sur ses lèvres quand il aperçut le Normand.
    — Tancrède... souffla-t-il.
    — Magnus ! Vous voilà de retour parmi nous.
    — Oui, répondit l’Orcadien. Où... Où est Hakon ?
    Tancrède comprit l’inquiétude du jarl pour ses hommes et pour le trésor confié par le roi. Il essaya de le tranquilliser :
    — Au camp. Tout est en ordre, Magnus. Et dès que vous vous sentirez mieux, nous les rejoindrons.
    Magnus serra les dents, les mots sortirent en sifflant de sa bouche.
    — Maintenant. Je vais... bien. A... alors, par... partons.
    L’infirmier haussa les sourcils.
    — Pas question. Restez tranquille. Vous n’êtes pas en état de voyager, pas encore.
    Tancrède entraîna l’infirmier hors de l’alcôve.
    — Pouvons-nous le transporter ?
    — Mais non ! protesta Grégoire. Il est trop tôt. Sa plaie risque de se rouvrir. Et puis le camp est loin.
    — Je ne pensais pas au camp, mais au Castelas.
    — Il ne faut pas le bouger.
    — Si les pirates débarquent, la bergerie n’est pas défendable. Nous devons le conduire au monastère.
    — Mais...
    — Il va nous falloir courir le risque, le coupa Tancrède. Je veux le mettre en lieu sûr ainsi que l’autre blessé. Les gardes vont s’occuper de sa civière, vous porterez la seconde avec frère Thierry. Le camérier et moi protégerons le convoi. Avez-vous une arme, frère Henri ?
    — Mon coutel risque de ne pas suffire, mais je crois qu’il y a une faux dans la remise derrière.
    — Très bien, alors prenez-la. Et allons-y.
    L’infirmier fit la grimace.
    — Les déplacer est dangereux, insista-t-il.
    — Préférez-vous qu’ils se fassent étriper ?
    Le visage de Grégoire s’allongea.
    — Il suffit, mon frère, s’énerva Tancrède que les réticences de l’infirmier agaçaient. Vous avez leurs remèdes avec vous ?
    — Oui.
    — Alors, préparez-les du mieux que vous le pouvez, s’il faut ajouter quelque bandage, faites-le et partons.
    Un plan prenait forme dans sa tête.
    — Dès que nous serons au Castelas, fit-il, vous donnerez l’ordre de sonner le tocsin afin de prévenir le camp.
    — En espérant que le vent porte du bon côté et que vos amis ne confondent pas notre appel avec le souffle de la tempête, remarqua Henri.
    Le jeune homme ressortit sous la pluie. Quelques instants plus tard, ils installaient les blessés sur les civières et la petite troupe prit le chemin du monastère.
    À peine la lourde porte refermée sur eux, la cloche sonna à la volée. L’abbé les rejoignit avec les autres officiers de l’abbaye. Il était encore plus pâle qu’à l’accoutumée.
    — Que se passe-t-il ?
    — Des pirates, mon père, répondit le camérier à la place de Tancrède. Des pirates vont débarquer et messire d’Anaor propose de nous aider à organiser notre défense.
    À ces mots, Tancrède crut que Censius allait s’évanouir. Il ferma les yeux, vacilla et le chancelier Osmond se précipita pour le soutenir.
    — Je vais le ramener à la salle du chapitre, déclara-t-il.
    — Allez, allez ! ordonna frère Henri avec agacement. Et revenez vite. Il faut que tous soient présents.
    Sous le choc, les officiers s’écartèrent en silence devant leur abbé puis leurs rangs se refermèrent.
    Frère Henri s’était

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