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La nuit de l'ile d'Aix

La nuit de l'ile d'Aix

Titel: La nuit de l'ile d'Aix Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Prouteau
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côtés galope le fidèle Amaudru, piqueur qui fait office de courrier et qui porte à la ceinture un couteau de chasse à tête d’aigle. Napoléon sursaute en voyant la dague.
    —  Mais il va nous faire remarquer. Ali, dis-lui de te rendre son couteau. Amaudru renâcle en rendant l’arme   :
    —  Et si nous sommes attaqués   ?
    Au sommet de la côte, le piqueur pique des deux.
    —  Où va-t-il   ? demande Napoléon.
    —  Il va préparer les relais à Coignères.
    En arrivant à Coignères, les chevaux n’étaient pas prêts. Napoléon s’inquiète   :
    —  Nous allons perdre un temps précieux. Et si des tueurs sont lancés à notre poursuite...
    Ali hâte le relais avec le maître de poste.
    —  Vous n’avez pas vu Amaudru, notre coursier   ?
    —  Je n’ai vu personne.
    Et tandis qu’on ferre les chevaux, c’est l’Empereur qui piaffe   :
    —  Enfin où est-il   ?
    —  Sire, je ne sais pas, personne ne l’a vu, je ne le vois pas. Et comme il sent Napoléon inquiet, Ali s’efforce de le rassurer.
    —  Je crois qu’il était un peu éméché. Il a dû faire un détour par Versailles pour embrasser sa famille. Nous le rejoindrons au relais suivant.
    Ni au relais suivant ni à un autre. Ni jamais. Amaudru s’est volatilisé dans les bois de Saint-Cloud. Personne n’entendra plus jamais parler de lui. Cette défection assombrit encore l’humeur de l’Empereur. Elle lui apparaît comme un présage des abandons à venir.
    À 8 heures la voiture s’enfonçait dans les allées forestières de Rambouillet. Napoléon fit arrêter la calèche. M. Savary et Beker le regardaient étonnés.
    —  Entendez-vous   ?
    C’était le fond sonore de ses vingt ans de règne, l’indicatif musical qui jetait ses derniers interludes   : le canon grondait par intervalles réguliers.
    —  C’est Exelmans, dit Savary. Nous aurons un courrier demain.
    L’ombre commençait d’investir la forêt lorsque Napoléon, jusque-là muet, dit d’une voix morne   :
    —  Nous allons nous arrêter au château.
    « Les derniers rayons du soleil frappaient la façade aux ailes circulaires, flanquée d’un côté d’une énorme tour duXIV e siècle à crémaillère et mâchicoulis, et de l’autre d’une tourelle en poivrière. Devant la façade, une petite cour d’honneur et une pièce d’eau nommée « Le Miroir {49}   ». Elle correspondait avec le vaste bassin bordé d’avenues boisées, semé d’îles verdoyantes où Marie-Louise aimait aborder en gondole.
    Hébert, le concierge du château qui avait été le valet de chambre de Napoléon en Égypte {50} , s’empressa autour des voyageurs.
    Il était 9 heures du soir. Napoléon fit quelques pas, leva les yeux vers un ciel liquide et constellé, respira cette nuit de fougères, de rossignols et de vers luisants. Et d’une voix lasse   : « Allons souper. »
    Après le dîner lugubre et silencieux, Napoléon emmena Bertrand dans sa chambre.
    —  Monsieur le grand maréchal, vous annoncerez à nos compagnons de voyage que je suis fatigué et que j’ai décidé de dormir ici.
    Beker et Rovigo que Gourgaud venait de rejoindre dans le grand salon marquèrent leur étonnement.
    —  L’Empereur m’a demandé de monter auprès de lui, dit le grand maréchal, je vous préviendrai de l’heure du départ.
    —  Vous lui avez dit que j’étais arrivé ? dit Gourgaud.
    —  Oui, et il vous demande d’effectuer des rondes sur la route de Paris d’où peuvent venir des estafettes. Des officiers porteurs d’un message urgent.
    —  Mais quel message   ? insiste Gourgaud.
    —  L’Empereur est encore persuadé qu’on va le rappeler.
    Gourgaud soupira   :
    —  J’irai, bien sûr, mais je sais déjà que c’est peine perdue.
    Lorsque Bertrand frappe à la porte, Napoléon répond   : entrez, d’une voix lointaine. Le grand maréchal entre à pas feutrés, il croyait Napoléon assoupi, il le trouve penché sur une carte d’Amérique déployée sur la table.
    —  Approchez, Bertrand, il faut commencer à nous familiariser avec notre future patrie. Venez près de moi, regardez..., notre salut c’est la mer.
    « Depuis ma jeunesse je me suis toujours senti une complicité avec les vagues. En Corse quand j’ai échappé à Paoli sur une barque démâtée. En Égypte quand j’ai joué la flotte avec Nelson. À mon retour quand j’ai rallié la Corse. Et puis quand j’ai débarqué à Golfe-Juan l’été dernier..., la

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