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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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trouver ce qu’il
cherchait. Jeanne... Il ne l’avait pas revue depuis quinze années, mais
son image restait gravée dans son esprit aussi nettement que s’ils s’étaient
quittés la veille : il lui semblait entendre encore vibrer sa voix
profonde et mélodieuse et voir les boucles d’or pâle qui encadraient son front
haut. Il revit aussi ses grands yeux gris-vert, si sagaces pour son jeune âge.
    Il chassa l’image
de ses pensées. Mieux valait ne pas trop s’attarder sur certaines choses.
    Un mille environ
au-delà du hameau, sous la haute croix qui signalait un carrefour, une femme et
cinq enfants en haillons demandaient l’aumône. À l’approche de Gerold et de ses
cavaliers, la petite famille eut un mouvement de recul.
    — La paix
soit avec toi, gente mère, dit Gerold. Nous ne te voulons aucun mal.
    — Auriez-vous
quelque nourriture de réserve, messire ? Pour le salut de mes enfants ?
    Quatre marmots
coururent vers le comte, mains tendues en une supplique muette. Leurs traits
enfantins étaient tirés par la faim. La plus grande, un joli brin de fille de douze
ou treize ans aux cheveux noirs, resta en arrière, accrochée à la robe de sa
mère.
    Gerold détacha de
sa selle la sacoche de peau de mouton où il gardait sa ration de vivres pour
les prochains jours. Elle contenait encore une miche de pain de bonne taille,
un morceau de fromage et un peu de viande de chevreuil salée. Comme il s’apprêtait
à rompre le pain en deux, il croisa le regard fixe et fiévreux des enfants. Nous serons à Rome dans quelques jours, se dit-il, et il leur tendit la
miche entière. D’ici là, je puis bien me contenter des biscuits du chariot à
provisions.
    Avec des cris de
joie, les enfants se jetèrent sur le pain comme un vol de moineaux affamés.
    — Tu viens
de là-bas ? demanda Gerold à la femme, montrant du doigt les ruines
noircies.
    — Mon mari
est le meunier de ce hameau, répondit-elle en hochant la tête.
    Gerold eut grand
peine à masquer sa surprise. La pitoyable créature qu’il avait sous les yeux
ressemblait à tout, sauf à une prospère épouse de meunier.
    — Que s’est-il
passé ?
    — Il y a trois
jours, juste après les semailles, des hommes sont arrivés. Des soldats de l’empereur.
Ils nous ont dit qu’il nous fallait jurer allégeance à Lothaire ou mourir
sur-le-champ. Alors, bien entendu, nous avons juré.
    Gerold acquiesça.
Les doutes de Lothaire quant à la loyauté de cette région de la Lombardie n’étaient
pas entièrement infondés, car elle n’avait été qu’assez récemment rattachée à l’empire
 – par son grand-père, le grand Charlemagne.
    — Puisque
vous leur avez juré fidélité, comment se fait-il que votre village ait été
détruit ?
    — Les
soldats ne nous ont pas crus. Ils nous ont traités de menteurs et ont commencé
à jeter des torches enflammées sur nos toits. Lorsque nous avons essayé d’éteindre
les brasiers, ils nous ont repoussés de leurs lances. Ils ont également brûlé
nos greniers, sans entendre les supplications que nous leur adressions pour le
salut de nos enfants. Ils se sont contentés d’éclater de rire, en répondant que
cette engeance de traîtres méritait bien de crever de faim !
    — Les gueux !
s’exclama Gerold, outré.
    Il avait
plusieurs fois tenté de persuader Lothaire de se servir non pas de la force,
mais de la négociation et du droit pour s’assurer de la loyauté de ses sujets.
Comme d’habitude, ses paroles étaient tombées dans l’oreille d’un sourd.
    — Ils ont
emmené tous nos hommes, poursuivit la femme, sauf les très jeunes et les très
vieux. L’empereur marchait sur Rome, disaient-ils, et ils avaient besoin d’un
supplément de soldats pour l’infanterie, ajouta-t-elle, fondant en larmes. Ils m’ont
pris mon mari et deux de mes fils, alors que le plus jeune a tout juste onze ans !
    Gerold fit la
grimace. Il fallait que la situation fût bien délicate pour que Lothaire se
trouvât réduit à enrôler de force des enfants.
    — Qu’est-ce
que cela signifie, messire ? demanda la femme. L’empereur aurait-il l’intention
d’attaquer la cité sainte ?
    — Je l’ignore.
    Jusque-là, Gerold
s’était dit que Lothaire cherchait seulement à intimider le pape Serge et les
Romains au moyen d’une éclatante démonstration de force. Mais la destruction de
ce village était de mauvais augure. Quand il se laissait aller à ses humeurs
vengeresses, Lothaire

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