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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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les
rigueurs d’une longue route, l’autre immaculée et resplendissante, somptueux foisonnement
de robes ecclésiastiques. Derrière le pape, le toit de la basilique Saint-Pierre
se dressait, formidable, incandescent, bardé de feuilles d’argent où se
réfléchissait la lumière du matin  – le cœur spirituel de l’Église, le
phare du monde, le plus sacré de tous les sanctuaires de la chrétienté. Devant
une telle gloire, plus d’un empereur s’était incliné.
    Lothaire mit pied
à terre, mais ne daigna pas s’agenouiller pour baiser la première marche du
perron comme l’exigeait la coutume. Suivi d’un groupe d’hommes en armes, il
gravit les degrés d’un pas hardi. Les prélats assemblés devant les portes
ouvertes de la basilique eurent un petit mouvement de recul. Les gardes
pontificaux esquissèrent un cercle protecteur autour de Serge, une main sur la
poignée de leurs glaives.
    Tout à coup, les
portes de Saint-Pierre grincèrent et se mirent en branle. Lothaire fit un bond
en arrière. Ses hommes tirèrent leurs épées, puis restèrent plantés là,
médusés, à regarder de tous côtés. Il n’y avait personne à proximité de l’entrée.
Les portes pivotaient lentement sur leurs gonds, mues par une force invisible.
Enfin, elles se fermèrent entièrement, avec un bruit sourd.
    Maintenant, se dit Jeanne. Le moment était venu pour Serge d’agir.
    Comme si le pape
avait entendu son injonction muette, il se leva et étendit solennellement les
bras. L’homme malade et affaibli n’existait plus. Avec sa chasuble splendide et
sa robe de fil d’or, il était plus imposant que jamais.
    Il parla en
langue tudesque pour être sûr que les soldats de Lothaire le comprendraient à
demi-mot.
    — Prenez
garde à la main de Dieu, gronda-t-il, car elle vient de vous fermer les portes
du plus sacré de tous les autels !
    Les hommes de
Lothaire émirent des cris d’effroi. L’empereur resta immobile, mi-inquiet, mi-soupçonneux.
    — Si pura
mente et pro salute Reipublicae huc advenisti... reprit
le pontife. Si vous avez l’esprit pur et empli de bonnes intentions envers la
chose publique, entrez et soyez bienvenus. Sinon, aucun pouvoir terrestre ne
vous ouvrira ces portes !
    Lothaire hésita.
Serge venait-il d’accomplir un miracle ? Il en doutait, mais comment s’en
assurer ? Les voies de Dieu étaient impénétrables. En outre, sa propre
position se trouvait soudain considérablement affaiblie, car ses hommes,
terrifiés, tombaient à genoux les uns après les autres, lâchant leurs armes.
    Avec un sourire
contraint, l’empereur ouvrit les bras à Serge. Les deux hommes se donnèrent l’accolade,
et leurs lèvres se rencontrèrent en un baiser de paix tout à fait officiel.
    — Benedictus
qui venit in nomine Domini, chanta joyeusement le
chœur des chantres. Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !
    À cet instant,
les portes se remirent en mouvement. Sous les yeux incrédules d’une foule
frappée de respect, leurs panneaux bardés d’argent basculèrent vers l’extérieur,
jusqu’à s’ouvrir entièrement. Côte à côte, tandis que d’allègres alléluias
fusaient à leurs oreilles, Serge et Lothaire s’avancèrent dans la basilique afin
de se recueillir devant l’autel du prince des Apôtres.
     
     
    Tout n’était pas
réglé. Il faudrait encore offrir des explications à Lothaire, lui présenter des
excuses, négocier des avantages, faire des concessions. Mais le danger immédiat
était écarté.
    Jeanne repensa à
Gerold. Sans doute se serait-il réjoui de l’usage qu’elle venait de faire de
son système hydraulique. Elle se le représenta, l’œil clair, illuminé de
gaieté, et la tête renversée en arrière afin de mieux libérer ce rire généreux
si profondément gravé dans sa mémoire...
    Le cœur était
décidément un organe singulier. On pouvait survivre des années à la perte d’un
être cher, s’y habituer, se réconcilier avec la vie, et cependant, sans crier
gare, dans un moment de faiblesse, le chagrin pouvait resurgir d’un seul coup,
aussi douloureux qu’une plaie à vif.

 
22
    Gerold laissa
échapper un soupir de soulagement dès que ses hommes eurent achevé leur
descente des dernières pentes du Mont-Cenis. Les Alpes étaient enfin derrière
eux ; la partie la plus difficile du voyage était terminée. La Via
Francigena s’étirait jusqu’à l’horizon, plate et lisse  – car elle avait
conservé ses pavés, posés

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