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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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elle.
    — Qui parle
ainsi ? interrogea Pascal, fouillant la foule du regard. Que l’accusateur
s’avance !
    Jeanne hésita.
Elle avait protesté sans réfléchir, courroucée par l’hypocrisie d’Anastase. À
présent, il était trop tard pour reculer. Elle monta hardiment à l’assaut de l’estrade.
    — C’est Jean
Anglicus ! lança quelqu’un.
    Un murmure
traversa l’assistance. Chacun avait entendu parler de la noble attitude de
Jeanne sur le rempart lors de l’attaque sarrasine.
    Anastase s’interposa.
    — Tu n’as
pas le droit de t’adresser à cette assemblée, dit-il. Tu n’es pas romain !
    — Laisse-le
parler ! jeta quelqu’un.
    D’autres
reprirent la même demande en chœur, et Anastase fut forcé de céder.
    — Réitère
ton accusation, Jean Anglicus, ordonna Pascal.
    Jeanne inspira
profondément.
    — L’évêque
Anastase a pactisé avec l’empereur. Je l’ai entendu promettre de rendre Rome à
la couronne franque.
    — Faux prêtre !
Menteur ! grondèrent les partisans d’Anastase, indignés.
    Élevant le ton,
elle expliqua dans quelles circonstances elle avait entendu Lothaire demander à
Anastase son aide pour obtenir que le peuple lui prêtât allégeance, et commentAnastase y avait consenti en échange du soutien politique de Lothaire.
    — C’est une
accusation gravissime, remarqua le primicerius. Qu’as-tu à répondre, Anastase ?
    — Devant
Dieu, ce prêtre ment ! Heureusement, je sais que mes concitoyens ne
mettront pas la parole d’un étranger au-dessus de la mienne !
    — N’as-tu
pas été le premier à défendre l’allégeance ? cria une voix.
    — Et alors ?
riposta un autre. Cela ne prouve rien !
    Les huées fusèrent.
Le débat s’échauffa. Selon que c’était un partisan ou un adversaire d’Anastase
qui prenait la parole, la foule abondait dans un sens ou dans l’autre.
    — Messire
primicerius ! lança Arighis, qui jusque-là n’avait dit mot.
    — Je t’écoute,
vice-dominus, dit respectueusement Pascal, surpris de voir ce vieux serviteur
de la maison papale se mêler d’une querelle politique. Aurais-tu quelque chose
à ajouter pour contribuer au débat ?
    — Oui, opina
Arighis en se tournant vers la foule. Citoyens de Rome, nous ne sommes pas
encore hors de danger. Quand viendra le printemps, les Sarrasins risquent fort
de tenter une nouvelle attaque. Face à une telle menace, nous devons être unis.
Rien ne doit nous diviser. Qui que nous choisissions, notre nouveau pape devra
être quelqu’un qui suscite une approbation unanime.
    Un murmure d’assentiment
parcourut l’assistance.
    — Cet homme
existe-t-il ? demanda Pascal.
    — Il existe,
rétorqua Arighis. C’est un homme de vision et de foi, un puits de science et de
piété : je veux parler de Léon, cardinal de l’église des Sancti Quattro
Coronati !
    Cette suggestion
fut accueillie par un profond silence. Le débat autour de la candidature d’Anastase
avait été si vif qu’on avait cessé d’évoquer une autre possibilité.
    — Le sang de
Léon est aussi noble que celui d’Anastase, reprit le vice-dominus. Son père est
un membre respecté du Sénat. Il a toujours dignement rempli ses devoirs de
cardinal. En outre, qui d’entre nous pourrait avoir oublié son admirable
attitude lors de l’attaque sarrasine, et la façon dont il nous rendit courage ?
C’est un lion de Dieu, un nouveau saint Laurent, un homme qui peut, un homme
qui va nous protéger des infidèles !
    La solennité de l’occasion
avait poussé Arighis à faire montre d’un déploiement d’éloquence inhabituel.
Enflammés par la profondeur de sa conviction, de nombreux Romains l’acclamèrent.
Les partisans du parti papal reprirent les hourras en chœur.
    — Léon !
Léon ! Nous voulons Léon pour pape !
    Les partisans d’Anastase
s’égosillèrent à leur tour, mais l’opinion de la multitude avait visiblement
basculé. Quand il devint évident que le parti impérial ne l’emporterait pas,
ses membres apportèrent leur soutien au cardinal. D’une seule voix, Léon fut
proclamé pape et évêque de Rome.
    Porté en triomphe
sur les épaules de ses compatriotes, le nouveau pontife monta sur l’estrade. C’était
un homme de petite taille, mais bien charpenté et encore dans la fleur de l’âge ;
la vigueur de ses traits était renforcée par ses épais cheveux bruns et par l’éclat
de ses yeux, pétillants de finesse et d’humour. Imbu de son rôle,

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