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La Papesse Jeanne

La Papesse Jeanne

Titel: La Papesse Jeanne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Donna Cross
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point
que tu m’aies fait le moindre mal.
    — Ai-je à ce
point changé ? Ne me reconnaissez-vous plus ?
    Quelque chose,
dans ces traits ravagés, éveilla soudain un souvenir au tréfonds de la mémoire
de Jeanne.
    — Serait-ce
toi, Marioza ? s’exclama-t-elle, incrédule. Mon Dieu, que t’est-il arrivé ?
    La courtisane
semblait avoir vieilli de trente ans depuis leur rencontre. Elle porta
tristement une main à son visage défi- guré.
    — Le baiser
du poignard, soupira-t-elle. Vous avez sous les yeux le cadeau d’adieu d’un
amant jaloux.
    — Deus
misereatur !
    — « Ne
compte pas bâtir ta fortune sur les faveurs des hommes », m’avez-vous dit
un jour. Eh bien, vous aviez raison ! L’amour des hommes m’a conduite à ma
perte. Ainsi Dieu m’a-t-il punie du mauvais tour que je vous ai joué jadis.
Pardonnez-moi, Très Saint Père, si vous ne voulez pas me voir damnée pour les
siècles des siècles !
    Jeanne traça à la
hâte un signe de croix au-dessus de sa tête.
    — Je te
pardonne volontiers, Marioza, et de tout mon cœur.
    La courtisane
saisit la main de Jeanne et la baisa avec ferveur.
    Sous les
applaudissements du peuple, la procession reprit son chemin. Comme l’on passait
devant l’église Saint-Clément, Jeanne perçut une soudaine agitation sur sa
gauche. Au fond de la foule, un groupe de gueux se mit à jeter une pluie de
pierres en direction du cortège. L’une d’elles atteignit son palefroi à l’encolure.
L’animal se cabra, soulevant Jeanne de sa selle, sur laquelle elle retomba
lourdement. Une terrible douleur s’empara d’elle. Hébétée et haletante, elle n’eut
que le temps d’agripper ses rênes dorées. Les diacres les plus proches se
précipitèrent pour la secourir.
     
     
    Gerold fut le
premier à repérer les fauteurs de trouble. Il piqua sa monture et avança sur
eux avant même que la première pierre eût quitté leurs mains.
    Le voyant
approcher, les coquins déguerpirent. Gerold se lança à leur poursuite. Arrivés
devant le parvis de l’église Saint-Clément, les fuyards firent volte-face,
sortirent des armes des replis de leurs manteaux, et fondirent sur lui.
    Avec un signe aux
gardes qui le suivaient, Gerold tira son glaive. Mais nulle réponse, nul
martèlement de sabots ne s’éleva dans son dos. Et quand les gueux l’encerclèrent
à la façon d’un essaim de guêpes, il était seul. Gerold s’efforça de manier son
épée à l’économie, s’assurant de ne porter que des coups voués à atteindre leur
but. Il blessa ainsi quatre de ses assaillants. À un certain moment, touché d’un
coup de dague à la cuisse, il se laissa tomber à bas de son cheval et feignit d’être
évanoui, mais garda une main crispée sur la poignée de son glaive.
    À peine eut-il
touché terre qu’il se remit debout, épée brandie. Avec un cri de surprise, son
agresseur le plus proche se jeta sur lui. Gerold s’écarta, prit le coquin à
revers et lui entailla le bras d’un coup de glaive puissant. L’homme s’enfuit,
tout ensanglanté. Plusieurs autres marchèrent sur Gerold, mais celui-ci venait
de reconnaître les voix de ses gardes derrière lui. Les renforts l’auraient
rejoint en quelques secondes. Il choisit de reculer tout en gardant un regard
vigilant sur les gueux.
    La dague, surgie
derrière lui, s’enfonça entre ses côtes sans un bruit, aussi furtivement qu’un
voleur s’introduit dans un sanctuaire. Avant qu’il eût le temps de comprendre
ce qui se passait, ses genoux se dérobèrent et il s’affaissa lourdement sur le
sol. À peine eut-il le temps de s’étonner de l’absence de douleur  – il ne
sentit que la chaleur poisseuse des flots de sang qui ruisselaient le long de
son échine.
    Un concert de
cris s’éleva au-dessus de sa tête, suivi d’un grand fracas de métal. Ses gardes
venaient d’arriver, et s’employaient à mettre les gueux en déroute. Je dois
les aider, se dit Gerold. En voulant ramasser son glaive, tombé à terre
près de lui, il s’aperçut qu’il était absolument incapable de remuer sa main.
     
     
    Jeanne avait vu
Gerold se ruer aux trousses des émeutiers. Elle avait aussi vu ses hommes
essayer de le suivre, aussitôt retenus par un cordon humain qui venait de se
former du même côté de la chaussée, comme en réponse à un ordre invisible.
    Un
traquenard ! Elle voulut crier un
avertissement, mais ses mots se perdirent dans le vacarme ambiant. Elle tenta d’ordonner
à son

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