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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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fierté.
    — Ne t’inquiète pas, maman, ça ira pour moi ! Retrouve vite Ann et tue Emma. Avec ça !
    Il lui avait tendu le poignard de Niklaus, l’œil farouche. Mary n’avait pas eu le cœur de refuser. Elle savait à quel point son fils tenait à son « épée ».
    — Tu peux y compter, mon chéri. Je tiendrai ma promesse.
    — Je sais, avait-il conclu en s’écartant d’elle pour saisir la main de Corneille, donnant à sa mère le courage qui lui manquait pour se séparer de lui.
    Junior avait grandi. Plus qu’elle ne l’aurait imaginé.
    Mais la route lui avait semblé longue jusqu’à Paris.
     
    Au premier coup d’œil, la capitale n’avait pas changé. Hormis quelques travaux enfin achevés, Mary en reconnut les parfums. Pas l’atmosphère.
    Elle avait quitté les Parisiens criant famine, prompts au chapardage et à l’agression. Grâce au traité de Ryswick qui avait mis fin à la guerre, le peuple souriait. On ne manquait ni de viande ni de pain. Le printemps avait été clément, offrant de belles récoltes, les greniers s’en trouvaient remplis et Paris foisonnait d’activité.
    Mary laissa son regard errer sur les étals d’un marché où les commerçants vantaient leurs légumes ou leur volaille, où les enfants se cachaient sous les roues des charrettes en quête d’une farce, où les jeunettes rougissaient sous les œillades et les sifflets, leurs paniers au bras, tandis que les plus âgées, rondes et avenantes, marchandaient d’une voix forte et assurée.
    Elle traversa la place en repoussant du pied les miséreux qui, eux, avaient gardé leurs habitudes de tire-bourses, même s’ils affichaient des joues moins creuses sur leurs dents gâtées.
    Elle gagna la rue de l’Hirondelle après s’être fait expliquer son itinéraire à plusieurs reprises.
    La France bénéficiait d’une trêve. La France souriait. Elle laissa cette belle humeur la gagner. Dans quelques jours, elle verrait Ann. Dans quelques jours, Emma de Mortefontaine mourrait.
     
    Mary loua une chambre dans une ruelle proche du lieu de son rendez-vous. Elle avait eu tout le temps de réfléchir durant son trajet, n’étant pas assez idiote pour se jeter dans l’embuscade qui, certainement, l’attendait. Elle avait pris soin de passer ses cheveux au brou de noix avant de quitter Saint-Marcel. Retrouvant l’art du déguisement, elle s’était empâté le nez, puis avait recouvert d’un fard ses taches de rousseur. Pour finir, elle avait crayonné ses sourcils trop clairs à l’aide d’un bout de charbon.
    Elle était méconnaissable et apte ainsi à surveiller sans se faire remarquer.
     
    Les deux journées suivantes, elle se plaça à l’angle du relais de poste qui faisait face à l’hôtel de la Salamandre.
    Par chance, on y allait et venait sans discontinuer, et sa présence n’inquiéta pas davantage que celle d’autres mendiants ou estropiés qui profitaient du flot pour tendre leurs écuelles en pleurnichant. Elle aurait pu les imiter, mais ne voulait pas risquer leur courroux. Corneille lui avait expliqué autrefois que ces gueux se regroupaient en une communauté. A la cour des Miracles, un roi dictait les règles et tous devaient s’y conformer. Il valait mieux ne pas s’en moquer. Elle se contenta donc de baisser son chapeau sur ses yeux et d’afficher l’air désœuvré de quelque simplet, tout en s’informant sur le propriétaire de l’hôtel de la Salamandre, maître Dumas, dont l’épouse était décédée l’hiver précédent.
    « C’est le diable en personne qui est venu la chercher. Son époux ne tardera pas à les rejoindre, vous pouvez m’en croire. C’est pas chrétien ce qui se passe dans cette maison ! » avait raconté une marchande des quatre-saisons à Mary.
    Celle-ci en avait ri dans un premier temps. Très vite, pourtant, elle dut constater que le vieillard était en effet tel qu’on le décrivait. Etonnamment vert pour son grand âge. Même si elle mettait en doute les racontars du voisinage dont il était le sujet favori de conversation, elle dut bien admettre, le voyant aller et venir pour son marché, qu’on lui parlait avec crainte et respect. Lui-même se montrait distant, voire suspicieux. Et, surtout, Mary ne parvenait pas à comprendre ce qu’un homme de sa trempe, ancien procureur au Châtelet de surcroît, pouvait avoir en commun avec Emma de Mortefontaine et l’enlèvement de sa fille.
    Elle faillit aller le lui demander, le pistolet au

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