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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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ne te connaît autant que moi, murmura-t-il encore avant de la faire sienne, lentement, comme l’océan se jouerait d’un navire, encore et encore, jusqu’à ce qu’elle s’y noie.

18
     
     
    E mma de Mortefontaine tremblait d’une excitation malsaine en se faisant déposer devant la demeure du marquis de Baletti.
    Ses hommes étaient déjà en place grâce à Giuseppe Boldoni, qui avait rouvert pour la circonstance un portail reliant les deux jardins. Le piège allait inexorablement se refermer sur les amants. Elle avait mis longtemps à le préparer, à le peaufiner avec Boldoni et l’ambassadeur. Mais elle voulait cependant jouir de cette confrontation avant de livrer Mary Read à la République. Forte de ce qu’elle savait des relations entre Mary et Forbin, elle avait fabriqué de fausses preuves qui les associaient tous deux pour porter préjudice à la Sérénissime. Dans cette lettre, tout était révélé : le nom de Cork, ses recrutements de miséreux pour le compte de Baletti, chargés de commerce avec les Impériaux, et leur intention de faire peser les soupçons sur l’ambassadeur de France.
    Le doge s’en était trouvé embarrassé. Il admirait et respectait le marquis de Baletti, mais ne pouvait réfuter ces accusations sans en référer au Grand Conseil.
    — Laissez-moi faire, avait susurré Emma. Le marquis est sous le charme de cette aventurière. Je suis persuadée qu’elle s’est servie de lui. Un seul nom, celui de cette garce, suffirait à Venise. Si Baletti me la livre, il sauvera son honneur. N’envoyez vos gardes qu’au matin. Je me fais fort de le convaincre.
    Le doge avait cédé. Baletti était aimé à Venise, très aimé. Son arrestation serait du plus mauvais effet. Emma l’avait quitté rassurée mais déterminée. Elle ne commettrait pas l’erreur de Breda. Gabriel avait lui-même vérifié que les tourtereaux étaient au nid, pour qu’elle puisse les y cueillir sans peine.
    — Je suis attendue par le marquis, dit-elle avec grâce au laquais qui ouvrit le portail.
    Elle était seule et on la laissa passer. Il lui suffit de pousser un sifflement aigu, à peine parvenue dans le patio d’entrée, pour que ce même laquais s’effondre, poignardé puis attiré dans l’ombre d’un bosquet. Emma de Mortefontaine récupéra le pistolet que lui tendit Gabriel.
    — Nous sommes prêts, affirma celui-ci.
    Baletti comptait six personnes à son service. Boldoni avait donné tous les détails nécessaires pour qu’ils soient neutralisés sans peine.
    — Allons-y, décida Emma. Cette petite garce ne m’échappera pas, cette fois.
    Lorsque Pietro ouvrit la porte à laquelle Emma frappa, il se retrouva nez à nez avec le canon d’un pistolet et n’eut d’autre choix que de s’effacer pour les laisser passer.
    — Où sont-ils ? chuchota Emma à son oreille.
    — Dans le petit salon, répondit Pietro de même.
    — J’irai seule, assura Emma, donnant ainsi à Gabriel le signal qu’il attendait.
    D’une main plaquée sur sa bouche, il empêcha Pietro de crier tandis que de l’autre il lui enfonçait avec violence un poignard au côté. Pietro s’effondra sans bruit contre Gabriel. Silencieusement, les hommes d’Emma se faufilèrent vers les portes que leur avait indiquées Boldoni pour en finir avec le reste de la maisonnée.
    Emma ne garda que Gabriel et deux autres pour l’escorter, se dirigeant vers cette musique douce et mélodieuse qui leur parvenait.
     
    *
     
    Mary l’entendait à peine, cette sonate que pourtant Baletti jouait pour elle au clavecin. Elle n’avait cessé de donner le change depuis qu’elle avait quitté Corneille. Ce n’étaient pas tant les caresses de celui-ci qui la perturbaient, mais ce qu’il avait dit. Elle ne pouvait nier qu’il y eût une part de vérité dans son constat. Une part sans doute plus grande que ce qu’elle voulait.
    Elle avait ouvert les fenêtres sur le canal pour se nourrir du flamboiement des dernières lueurs du jour. Comme chaque fois, elle s’en régala.
    La voix de fausset d’un gondolier accompagnant les accords brisés d’une mandoline égratigna son oreille, se mêlant désagréablement au timbre parfait de la voix de son amant. A l’image de ses pensées tumultueuses, leur association était dissonante. Elle referma la croisée. Son plaisir du soir était indiscutablement gâché. Elle se retourna vers Baletti pour se conforter de sa présence sécurisante en soupirant de regret. Elle

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